Violences intrafamiliales et RÉSILIENCE des jeunes victimes

Violences intrafamiliales et RÉSILIENCE des jeunes victimes

Les violences intrafamiliales sont une réalité très préoccupante qui touche de nombreuses personnes en France, dès l’enfance.

Face à ces situations traumatisantes, la résilience apparait souvent comme un objectif salvateur. Elle désigne la capacité à rebondir et à se reconstruire après avoir vécu des expériences traumatiques, une sorte d’évolution cicatrisante, positive malgré les horreurs vécues.

Pour beaucoup de soignants, thérapeutes, scientifiques, travailler la résilience, et cela dès le plus jeune âge, est une solution pour prévenir ou réparer les dégâts psychologiques des violences intrafamiliales.

Voici quelques bénéfices observés :

1. Reconstruire sa vie

La résilience permet aux victimes de violences intrafamiliales de se relever et de reconstruire leur vie après une période difficile. Elle leur offre une lueur d’espoir et la possibilité de se réapproprier leur existence.

2. Trouver un sens à la violence vécue

La résilience peut transformer la souffrance en une force qui pousse les victimes à lutter contre les violences et à aider les autres. Venir en aide à son tour redonne parfois un sens à l’expérience de violence pour la faire vivre autrement.

3. Briser le cycle des violences

La résilience permet de rompre le cycle des violences intrafamiliales en donnant aux victimes la force et les ressources nécessaires pour s’affirmer et protéger leurs enfants. Elle peut favoriser une transmission positive des valeurs et des comportements pour éviter que la violence se reproduise.

4. Préserver l’estime de soi

En développant leur résilience, les survivants peuvent renforcer leur estime personnelle en surmontant les obstacles et en exerçant leur capacité à se reconstruire.

Interrogé dans un podcast, Boris Cyrulnik, médecin neuropsychiatre et psychanalyste ayant vulgarisé le concept de résilience, témoigne :

On sait maintenant qu’un enfant qui acquière un lent développement est un enfant qui acquière confiance en lui.

Au lieu de les stigmatiser ou de les mépriser, on doit augmenter chez les enfants les facteurs de protection, pour mieux les protéger dans la vie. Si le bébé est entouré par une niche familiale affective sécurisante, il acquière des facteurs de projection qui vont faire que chez lui la résilience va être facile. Alors qu’un bébé dont la mère a été traumatisée par la violence conjugale a acquis un facteur de vulnérabilité qui fait que pour lui le processus de nouveau développement sera difficile.

On sait maintenant, en neurobiologie, qu’un être humain seul développe une atrophie cérébrale qu’aujourd’hui on photographie sans aucune difficulté. Or on constate dès qu’on propose un soutien affectif et verbal à ces blessés que ces atrophies se reconstruisent rapidement. Dès qu’on trouve un moyen de sécuriser l’enfant, son électro-encéphalogramme redevient normal en 24h.

Mais si c’est 24h ou 48h chez un bébé, il faut reconnaitre que la plasticité cérébrale est beaucoup moins grande quand on vieillit. Plus on attend, plus la résilience sera difficile à enclencher. Mais si on les aide, on voit qu’un très grand nombre d’enfants reprend un bon développement. Ça ne veut pas dire qu’ils oublient. Ils prennent un autre cadre de vie.

Boris Cyrulnik, médecin neuropsychiatre et psychanalyste

Toutefois, la résilience ne fait pas tout. Il est important d’exprimer certaines limites notamment dans le cadre de violences.

1. Injonction à la résilience

La société a souvent tendance à promouvoir une vision idéalisée de la résilience, plaçant une pression sur les victimes pour qu’elles se relèvent rapidement et surmontent leurs traumatismes. Cela peut créer une forme d’injonction à être « fort » et dissuader les victimes de demander de l’aide.

2. Nier la souffrance

En mettant l’accent sur la résilience, on risque de minimiser la souffrance des victimes. Malgré la résilience, les traumatismes peuvent demeurer et ne doivent pas être niés.

3. La charge émotionnelle

Les victimes de violences intrafamiliales peuvent ressentir une pression supplémentaire lorsqu’elles sont confrontées à des attentes de résilience. Cette charge émotionnelle peut être épuisante et culpabilisante.

4. Les ressources disponibles

Sans un accès adéquat aux services de soutien et aux interventions spécialisées, il peut être difficile pour les victimes de développer leur résilience. Les facteurs sociaux, économiques et culturels jouent un rôle déterminant et souvent injuste dans la capacité d’une personne à se remettre des violences intrafamiliales.

On ne peut que souhaiter aux victimes de violences intrafamiliales d’être résilientes, si cela leur permet de se reconstruire, de préserver leur estime de soi, de briser le cycle des violences et de trouver un sens à leur histoire.

Cependant, ne rajoutons pas de pression au point de nier la souffrance. Une approche équilibrée, adaptée à chacun, serait de valoriser la résilience tout en reconnaissant la nécessité d’un soutien approprié et d’interventions spécialisées pour accompagner les victimes de violences intrafamiliales dans leur processus de guérison.

En fin de compte, la résilience ne doit pas être considérée comme la solution ultime, mais plutôt comme une possibilité pour ceux qui le souhaitent de se reconstruire et de se rétablir à leur propre rythme.


Pour comprendre les conséquences de la violence sur la santé des victimes nous vous conseillons nos articles « Les conséquences des violences conjugales sur les enfants témoins : une reconnaissance officielle en France » et « Violences sexuelles : des conséquences dévastatrices sur la santé des victimes« . Vous pouvez également consulter notre livret « Repérer, prévenir et agir contre les violences sexuelles faites aux enfants« .

Violences sexuelles : des conséquences dévastatrices sur la santé des victimes

Violences sexuelles : des conséquences dévastatrices sur la santé des victimes

En mars 2015, une collecte nationale de données sur le parcours de soin des victimes de violences sexuelles a lieu, à l’initiative de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie. Celle-ci a mené une enquête auprès de 1214 victimes de violences sexuelles âgées de 15 à 72 ans pour évaluer l’impact des violences sur leur vie et leur parcours de prise en charge.

Les données ont été collectées à partir d’un questionnaire anonyme auto-administré par ordinateur, composé de 184 questions diffusées via des sites web, des réseaux sociaux et des médias. Les données ont été analysées par une équipe de professionnels de la santé et de la victimologie.

L’objectif était d’améliorer l’identification, la protection et la prise en charge des victimes de violences sexuelles.

Voici ce que raconte l’enquête et qui est toujours actuel.

Les violences sexuelles ont des conséquences dévastatrices sur la santé des victimes, à court, moyen ET long terme. Sans soins adaptés, elles vont détériorer le psychisme ainsi que le corps de la victime tout au long de leur vie. Les symptômes peuvent se manifester dès l’agression ou être des bombes à retardement qui risquent d’exploser des années plus tard parfois, via un détail qui rappelle les violences.

Avoir subi des violences sexuelles pendant l’enfance est considéré comme l’un des facteurs délétères les plus importants de la santé, même après cinquante ans. Les conséquences (décès prématuré par accidents, maladies et suicides, maladies cardiovasculaires et respiratoires, diabète, obésité, épilepsie, de troubles du système immunitaire et de troubles psychiatriques) sont proportionnelles à la gravité et à la fréquence des violences subies ainsi qu’aux circonstances aggravantes.

1/ Les traumatismes psychologiques

Les traumatismes psychologiques sont l’un des risques les plus courants associés à ces violences, avec un taux d’état de stress post-traumatique pouvant atteindre 80% chez les victimes de viol et 87% chez celles ayant subi des violences sexuelles dans l’enfance. Les troubles dépressifs, les tentatives de suicide, les troubles alimentaires et les conduites addictives sont également plus courants chez les victimes de violences sexuelles. Le fait que celles-ci soient subies dans l’enfance augmente considérablement le risque de personnalité borderline et les diagnostics de trouble limite de la personnalité.

La plupart des victimes de violences sexuelles présentent une variété de symptômes qui créent une situation de détresse psychique insoutenable. Parmi les symptômes les plus courants, on trouve une perte d’estime de soi, des troubles anxieux, des troubles du sommeil, l’impression d’être différent des autres, le stress et l’irritabilité.

D’autres troubles plus handicapants comprennent les troubles phobiques, les symptômes intrusifs, les troubles de l’humeur, la fatigue chronique, les symptômes dissociatifs, l’hypervigilance et les troubles sexuels. Dans l’enquête, les répondants sont 58% à évaluer leur souffrance mentale actuelle comme importante et 64% à l’avoir estimée comme maximale au moment où elle a été la plus importante.

2/ Les traumatismes physiques

Les conséquences sur la santé sont également physiques. Les victimes de violences sexuelles sont plus susceptibles de présenter de nombreuses pathologies, notamment cardio-vasculaires, pulmonaires, endocriniennes, auto-immunes et neurologiques, ainsi que des douleurs chroniques et des troubles du sommeil. Ces violences peuvent également causer des atteintes des circuits neurologiques et des perturbations endocriniennes des réponses au stress. Les atteintes cérébrales sont visibles par IRM, avec une diminution de l’activité et du volume de certaines structures, une hyperactivité pour d’autres, ainsi qu’une altération du fonctionnement des circuits de la mémoire et des réponses émotionnelles.

Des altérations épigénétiques avec la modification du gène NR3C1, impliqué dans le contrôle des réponses au stress et de la sécrétion des hormones de stress, ont également été mises en évidence chez les victimes de violences sexuelles dans l’enfance. Et bien-sûr, si les violences sexuelles entraînent une grossesse, l’impact est décuplé à tous les niveaux. Entre les interruptions volontaires de grossesse, les fausses couches spontanées, les grossesses menées à terme, parfois par des mineures, les conséquences physiques, psychologiques, économiques, sociales, etc. sont très nombreuses pour les victimes.

3/ Un rapport à la santé altéré

Les victimes de violences sexuelles ont une consommation médicale plus importante, avec davantage de consultations en médecine générale, aux urgences et plus d’interventions chirurgicales rapportées, souvent inutiles car liées à la mauvaise image de soi. Paradoxalement, les victimes ont un seuil élevé de résistance à la douleur, ce qui peut les conduire à négliger des pathologies avant de consulter un médecin. Enfin, des conduites addictives, auto-agressives, des conduites sexuelles à risques, des troubles alimentaires de type anorexique et/ou boulimiques sont également fréquents et peuvent entrainer des conséquences dramatiques.

4/ Urgence d’installer des soins adaptés

Les intervenants doivent être conscients que plus les violences ont eu lieu dans l’enfance, plus les répercussions sont durables et profondes sur leur vie. Il faut à la fois agir vite, de manière adaptée et également mettre en place un vrai suivi dans le temps des victimes. En général, plus la prise en charge médicale est précoce et moins les victimes de violences sexuelles seront susceptibles de développer un état de stress post-traumatique et d’autres complications par la suite. Il est donc crucial que le personnel médical pose systématiquement la question des violences afin d’améliorer la prise en charge et la signalisation les situations de violence, en particulier lorsqu’il s’agit de mineurs ou de personnes vulnérables.

5/ Propositions d’améliorations

Voici des propositions à la fin de l’enquête pour améliorer la prise en charge des victimes de violences sexuelles. Idéalement, il faudrait faciliter les démarches des victimes, mieux les informer via des professionnels de santé, des administrations, des plateformes web et téléphoniques. Des centres spécialisés pluridisciplinaires pourraient offrir une prise en charge globale et anonyme. La formation de tous les professionnels impliqués au dépistage les violences est urgente, ce qui inclut de croire les victimes et de reconnaître leur souffrance. Organiser des groupes de parole, donner du temps et un espace dédié au repos des victimes sont également des recommandations importantes. Enfin, l’éducation de la population est essentielle pour rompre le silence.


Sur l’impact sur la santé des violences sexuelles vous pouvez également consulter l’article « Violences sexuelles et troubles alimentaires, un lien intime« .

Vous pouvez également télécharger notre guide « Repérer, prévenir et agir contre les violences sexuelles faites aux enfants« .

Violences sexuelles et troubles alimentaires, un lien intime

troubles alimentaires et violence sexuelle

En janvier 2022, des chercheurs français ont établi un lien entre les désordres du comportement alimentaire et les violences sexuelles ayant eu lieu dans l’enfance.

Aurore Malet-Karas, Delphine Bernard et Eric Bertin ont analysé 12600 témoignages de personnes agressées sexuellement, recueillis par le Collectif Féministe Contre le Viol. Un nombre important de personnes parmi ces victimes évoquait spontanément des troubles alimentaires, plus exactement 4.3% des témoignages (soit 538 femmes et 8 hommes), pourcentage largement sous-estimé du fait de la spontanéité des témoignages, non orientés sur cette problématique.

Un profil type de la victime a pu être établi suite à ces analyses. Les personnes déclarant des troubles alimentaires liés à des violences avaient souvent :

  • subi des violences sexuelles très jeunes (13 ans en moyenne),
  • été agressées par une personne du cercle familial (inceste).
  • accumulé des troubles supplémentaires : anxiété, TOC, dépressions, tentatives de suicide, mutilations, auto médications, chocs post-traumatiques, alcoolisme…

Violences sexuelles et troubles alimentaires

Cette étude apporte un regard déterminant dans la prise en compte des violences sexuelles et notamment des violences sexuelles faites aux enfants.

En effet, s’il est diffusé et entériné par les professionnels, ce rapport établissant les troubles alimentaires comme conséquence d’un traumatisme sexuel dans l’enfance, peut aider à plusieurs niveaux :

  • Mieux prendre en charge les personnes en proie à ces dysfonctionnements en ayant un angle supplémentaire pour les soigner. Les approches thérapeutiques pourront être adaptées aux besoins des traumatismes.
  • Permettre aux victimes de violences sexuelles d’être davantage dépistées, plus vite et plus tôt.
  • Éviter les erreurs de diagnostiques : dépressif, bipolaire, borderline ? Non, plus probablement victime d’inceste…

Pourquoi ce lien entre les troubles du comportement alimentaire et les violences sexuelles ?

La relation entre les deux est complexe. Néanmoins, les victimes partagent plusieurs schémas psycho-émotionnels :

  • L’apaisement que provoque la nourriture est très puissant. Se sentir « plein » apporte un bien-être immédiat (même si temporaire)
  • Technique d’évitement, la déformation (en plus ou en moins) est une tentative de ne plus attirer le regard de l’agresseur, pour se protéger
  • Se remplir permet de lui boucher symboliquement l’accès, pour qu’il ne puisse plus « rentrer ».
  • Le contrôle alimentaire redonne du pouvoir (= je contrôle ce qui rentre en moi). L’association anorexie et violences sexuelles est très minimisée parce que l’anorexie est socialement mieux acceptée que les autres troubles.
  • Enfin, ces troubles alimentaires entrent dans la grande famille des addictions comportementales telles que l’alcoolisme, la prise de drogues, l’automédication… Même si c’est nocif, le cerveau, grand créateur d’habitudes, préfère rester sur sa route habituelle plutôt que de sortir de ce qu’il connait. Cela explique en partie la totale normalisation des violences intra-familiales et des compulsions alimentaires

Les femmes sont les premières touchées par la corrélation des violences sexuelles et l’existence de troubles alimentaires.

« Les troubles alimentaires concernent l’image corporelle et le rapport à soi. Et il y a beaucoup plus de pression sur l’apparence physique des femmes que sur celle des hommes. Cela va amener chez les femmes plus de volonté de faire des régimes, des dérégulations qui vont entrainer des désordres hormonaux et déclencher des troubles alimentaires. »

Aurore Malet-Karas, doctoresse en neurosciences

La recherche sur la question des violences sexuelles est encore à ses balbutiements en France, alors qu’elle est bien plus avancée dans d’autres pays. Pourtant, l’impact de ces recherches récentes permettrait de mettre à jour les formations des intervenants : médecins, psychologues, diététiciens, magistrats…

Actuellement, les victimes françaises ont rarement la chance d’être suivies par des professionnels formés aux traumatismes polymorphes des violences sexuelles. Pourtant, l’ampleur des besoins est monstrueux.

En France, 9 enfants toutes les 30 minutes sont victimes d’inceste !

Pour faire bouger la société, n’hésitez pas à partager cette publication. Il est urgent que tout le monde change de regard et s’informe, les citoyens comme les professionnels. Car c’est seulement en diffusant largement la diversité des traumatismes générés par les violences sexuelles que l’information infusera la société. Demandons aux politiques de faire leur part, faisons changer les lois, les cursus… Et en tant que particulier, partageons les savoirs récents pour faire bouger les croyances !

*******

Si vous avez besoin d’aide, n’hésitez pas à consulter les ressources en ligne du site de Delphine Bernard, Le regard du miroir, où vous trouverez un accompagnement bienveillant et éclairé sur les troubles du comportement alimentaire.

Sources :

Instagram : https://www.instagram.com/auroremaletkaras_phd/?hl=fr. et  https://www.instagram.com/d.bernard51/?hl=fr

Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100009730025943
https://www.facebook.com/auroremaletkaras https://www.facebook.com/RegardDuMiroir/

Twitter : https://twitter.com/KarasMalet

Liens : le regard du miroir
https://cfcv.asso.fr/
www.auroremaletkaras.com

Publications : https://www.madmoizelle.com/les-troubles-du-comportement-alimentaire-sont-une-consequence-meconnue-des-violences-sexuelles-ces-chercheurs-tirent-lalarme-1284511
https://www.leparisien.fr/sentinelles/en-maigrissant-je-disparaissais-un-peu-troubles-alimentaires-lautre-consequence-meconnue-des-violences-sexuelles-02-04-2022-LXX5RGSNMNCN5KMHN5CXOKB4YI.php

Cela vous a intéressé ? Alors aidez-nous à diffuser cet article et soutenez notre travail.

1. Partagez cet article sur le lien entre les troubles alimentaires et les violences sexuelles intrafamiliales sur les réseaux sociaux.

2. Utilisez ce visuel si vous en avez besoin pour relayer l’article sur vos réseaux sociaux, Pinterest, Blog…

3. Faites un don à l’Association Protéger l’enfant pour soutenir notre travail d’information et d’aide aux victimes de violences conjugales.

4. Suivez-nous sur nos différents réseaux sociaux
Instagram
Facebook
Twitter
Pinterest

Pourquoi les Centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs

La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

Qu’est-ce que les centres médiatisés ?

Dans un cadre de relations familiales conflictuelles, les centres médiatisés sont des lieux de rencontres instaurés par la justice où tous les membres d’une famille peuvent se retrouver de manière encadrée. (On les confond avec les lieux neutres mais ce sont 2 procédures différentes). Les objectifs des centres sont de développer les actions de prévention, soutenir la coparentalité, renforcer les coopérations entre les différents acteurs et limiter leurs impacts sur les liens parents-enfants.

Sauf que si ces rencontres sont probablement bénéfiques dans le cadre de conflits simples, elles deviennent très problématiques dans un contexte de violences conjugales. Quand on force des enfants qui dénoncent des faits de violences à revoir régulièrement le parent accusé ou condamné, la justice ne fait que rajouter de la violence dans leur vie.

La problématique des centres médiatisés en cas de violences intrafamiliales

Pourquoi imposer à des enfants qui dénoncent un parent violent (parfois reconnu coupable et condamné) de le revoir ? L’argument de maintenir à tout prix le lien parent-enfant n’est plus recevable quand l’adulte est malveillant. Un parent maltraitant n’est pas un bon parent. Le revoir, c’est perpétuer la torture. Comment peuvent-elles guérir de leurs traumatismes si on oblige les victimes à revoir leur bourreau tous les mois ?

Le droit de l’enfant doit absolument primer sur le droit à l’enfant. Or actuellement, pour les juges français, le droit du parent accusé prime tandis que le témoignage des parents protecteurs est systématiquement remis en question. Il est grand temps de privilégier le principe de précaution à la présomption d’innocence, qui permet au parent violent de perpétrer son emprise. Cela fait donc partie de la problématique des centres médiatisés.

Quelle neutralité ?

Quand il s’agit de protéger les enfants victimes de violence psychologiques, sexuelles, etc, la neutralité n’existe pas. La justice ne doit pas maintenir des liens néfastes mais prendre partie pour les victimes et les éloigner à tout prix de leurs bourreaux. Les centres médiatisés ne sont pas des espaces protecteurs actuellement, ils ne font qu’alimenter des traumatismes.

Pire. De par leur mission, ils doivent signaler à la justice les incidents et transmettre une note de fin de mesure. Sauf que le jeu est faussé. Le personnel est rarement formé et se laisse facilement influencer par les parents violents, habitués à faire illusion. Notre association ne compte plus le nombre de rapports remis à la justice inexacts et ne reflétant pas la réalité des victimes. Ce n’est pas cela veiller à la sécurité des enfants et du parent protecteur.

La problématique des centres médiatisés est que cette neutralité affichée incongrue aboutit à de la complicité. Si les intervenants étaient plus présents et formés, ils entendraient les dénigrements, les interrogatoires, les critiques systématiques sur l’autre parent.

Le parent dysfonctionnel l’a bien compris. Si le centre médiatisé ne fait pas de rapport au juge, alors c’est la preuve que tout se passe bien. Et cela amène le juge à lui accorder un droit de visite où la violence pourra se reproduire à nouveau. Les enfants perdent confiance dans les intervenants, ils les sentent alliés de leur bourreau. Ils ne se confient plus. Et ils ne sont pas protégés.

Lutter contre les silences est capital. Il faudrait travailler étroitement avec le parent qui a dénoncé les violences et mieux prendre en compte la parole des enfants, même ceux sous emprise. Et si la parole advient, venir en aide, pour ne pas être complice.

Propositions d’amélioration :

On l’a vu la problématique des centres médiatisés englobe de nombreux domaines. Voici quelques points essentiels à améliorer.

Aucun droit de visite en centre médiatisé pour les parents violents. Les juges doivent prendre en compte tout incident connu de violence et donner la priorité à la sécurité des victimes. Au moindre soupçon, les visites sont stoppées.

Faire des centres médiatisés un lieu de bienveillance pour les victimes. Un lieu sans menace, pour stopper le cycle des violences. Ne pas laisser seuls les enfants avec les parents.

Mieux former les éducateurs sur les mécanismes d’emprise, de manipulation, sur le contrôle coercitif mais également sur les psycho-traumatismes et la variété des comportements possibles chez les victimes. Parfois il suffit d’un regard d’un parent pour réduire au silence un enfant.

Améliorer la circulation des infos vitales. Les centres médiatisés doivent être notifiés des poursuites pour violences et y porter une attention particulière. Inversement, ils doivent remonter les attitudes toxiques des adultes, les craintes des enfants et leurs refus d’interactions avec le parent accusé. Mettre à disposition du juge les vidéos des rencontres au besoin.

Respecter la volonté de l’enfant. Si ce dernier refuse de voir un de ses parents, ne pas accuser l’autre adulte de manipulation. Trop souvent, un enfant qui a envie de voir un de ses parents = bon signe relationnel, alors qu’un refus = enfant manipulé… Soutenons la parole des mineurs, redonnons-lui sa valeur. C’est hyper important dans cette problématique des centres médiatisés mais c’est valable partout !

Lutter contre la loi du silence. Souvent, au nom de la neutralité, la notion de violence n’est pas abordée, renforçant les mécanismes du déni, de la loi du silence et la souffrance.

Interdire l’accusation d’aliénation parentale. La théorie du SAP ne permet pas de protéger la mère et ses enfants contre la violence car son vrai objectif est de permettre à l’agresseur de maintenir le contact avec ses victimes, mère et enfants. Tout espace rencontre qui n’est pas clair sur cette réalité ne peut pas continuer à exercer son activité.

S’alerter des critiques systématiques du parent accusé envers le parent protecteur. Il faut s’interroger si il ne cesse de se victimiser ou de parler avec les intervenants au lieu de se concentrer sur les moments avec les enfants.

Obliger l’embauche d’un psy formé aux violences intrafamiliales et aux abus sexuels sur les enfants. Ses rapports doivent rendre compte de l’état psychique de l’enfant, de celui de ses parents, sans déformations, interprétation ou omission d’informations essentielles.

Respecter la décision des juges. Si ils n’écrivent pas que les sorties en extérieur sont autorisées, cela vaut pour les centres médiatisés. Les enfants restent sous surveillance. Les intervenants n’ont pas à s’allier au parent violent pour convaincre les enfants de suivre les demandes de celui-ci.

Sortir de l’illusion de la repentance sans long suivi psychologique avéré : un parent violent ne va pas frapper ses enfants dans un centre médiatisé, cela va de soi. Le centre n’apporte donc aucune garantie.

– En parallèle à une réforme en profondeur pour que les centres médiatisés deviennent ENFIN des endroits protecteurs, il faut interdire les Lieux neutres où les rencontres décidées par le JAF se font sans surveillance !!!

Les centres médiatisés savent peut-être régler des conflits mais ne sont pas adaptés en cas de violences intrafamiliales. Car la problématique est différente : les victimes ne recherchent pas la construction d’une coparentalité mais la protection. Pour trop d’intervenants, les violences sont du passé et il faut construire la suite. Or l’avenir n’est pas le « vivre ensemble » mais bien le soin des victimes.

Ce soin ne pourra advenir que par la conscience et la reconnaissance des violences à l’œuvre par tous (centre médiatisé inclus). Un problème non nommé ne peut jamais être traité. Les violences intrafamiliales, inceste inclus, ne s’arrêtent pas avec la fin du couple, elles continuent de s’exercer dans le lien forcé maintenu par la justice. Il faut en finir avec la neutralité et s’engager contre, requestionner les postures idéologiques sur la parentalité dans l’intérêt des enfants et de la société entière.

Cela vous a intéressé ? Alors aidez-nous à diffuser cet article et soutenez notre travail.

1. Partagez cet article sur la problématique des centres médiatisés sur les réseaux sociaux.

2. Utilisez ce visuel si vous en avez besoin pour relayer l’article sur vos réseaux sociaux, Pinterest, Blog…

La problématique des centres médiatisés, dans un cadre de violences intrafamiliales est méconnue. Pourtant il faut la comprendre pour protéger les victimes.

3. Faites un don à l’Association Protéger l’enfant pour soutenir notre travail d’information et d’aide aux victimes de violences conjugales.

4. Suivez-nous sur nos différents réseaux sociaux
Instagram
Facebook
Twitter
Pinterest