Violences sexuelles et troubles alimentaires, un lien intime

troubles alimentaires et violence sexuelle

En janvier 2022, des chercheurs français ont établi un lien entre les désordres du comportement alimentaire et les violences sexuelles ayant eu lieu dans l’enfance.

Aurore Malet-Karas, Delphine Bernard et Eric Bertin ont analysé 12600 témoignages de personnes agressées sexuellement, recueillis par le Collectif Féministe Contre le Viol. Un nombre important de personnes parmi ces victimes évoquait spontanément des troubles alimentaires, plus exactement 4.3% des témoignages (soit 538 femmes et 8 hommes), pourcentage largement sous-estimé du fait de la spontanéité des témoignages, non orientés sur cette problématique.

Un profil type de la victime a pu être établi suite à ces analyses. Les personnes déclarant des troubles alimentaires liés à des violences avaient souvent :

  • subi des violences sexuelles très jeunes (13 ans en moyenne),
  • été agressées par une personne du cercle familial (inceste).
  • accumulé des troubles supplémentaires : anxiété, TOC, dépressions, tentatives de suicide, mutilations, auto médications, chocs post-traumatiques, alcoolisme…

Violences sexuelles et troubles alimentaires

Cette étude apporte un regard déterminant dans la prise en compte des violences sexuelles et notamment des violences sexuelles faites aux enfants.

En effet, s’il est diffusé et entériné par les professionnels, ce rapport établissant les troubles alimentaires comme conséquence d’un traumatisme sexuel dans l’enfance, peut aider à plusieurs niveaux :

  • Mieux prendre en charge les personnes en proie à ces dysfonctionnements en ayant un angle supplémentaire pour les soigner. Les approches thérapeutiques pourront être adaptées aux besoins des traumatismes.
  • Permettre aux victimes de violences sexuelles d’être davantage dépistées, plus vite et plus tôt.
  • Éviter les erreurs de diagnostiques : dépressif, bipolaire, borderline ? Non, plus probablement victime d’inceste…

Pourquoi ce lien entre les troubles du comportement alimentaire et les violences sexuelles ?

La relation entre les deux est complexe. Néanmoins, les victimes partagent plusieurs schémas psycho-émotionnels :

  • L’apaisement que provoque la nourriture est très puissant. Se sentir « plein » apporte un bien-être immédiat (même si temporaire)
  • Technique d’évitement, la déformation (en plus ou en moins) est une tentative de ne plus attirer le regard de l’agresseur, pour se protéger
  • Se remplir permet de lui boucher symboliquement l’accès, pour qu’il ne puisse plus « rentrer ».
  • Le contrôle alimentaire redonne du pouvoir (= je contrôle ce qui rentre en moi). L’association anorexie et violences sexuelles est très minimisée parce que l’anorexie est socialement mieux acceptée que les autres troubles.
  • Enfin, ces troubles alimentaires entrent dans la grande famille des addictions comportementales telles que l’alcoolisme, la prise de drogues, l’automédication… Même si c’est nocif, le cerveau, grand créateur d’habitudes, préfère rester sur sa route habituelle plutôt que de sortir de ce qu’il connait. Cela explique en partie la totale normalisation des violences intra-familiales et des compulsions alimentaires

Les femmes sont les premières touchées par la corrélation des violences sexuelles et l’existence de troubles alimentaires.

« Les troubles alimentaires concernent l’image corporelle et le rapport à soi. Et il y a beaucoup plus de pression sur l’apparence physique des femmes que sur celle des hommes. Cela va amener chez les femmes plus de volonté de faire des régimes, des dérégulations qui vont entrainer des désordres hormonaux et déclencher des troubles alimentaires. »

Aurore Malet-Karas, doctoresse en neurosciences

La recherche sur la question des violences sexuelles est encore à ses balbutiements en France, alors qu’elle est bien plus avancée dans d’autres pays. Pourtant, l’impact de ces recherches récentes permettrait de mettre à jour les formations des intervenants : médecins, psychologues, diététiciens, magistrats…

Actuellement, les victimes françaises ont rarement la chance d’être suivies par des professionnels formés aux traumatismes polymorphes des violences sexuelles. Pourtant, l’ampleur des besoins est monstrueux.

En France, 9 enfants toutes les 30 minutes sont victimes d’inceste !

Pour faire bouger la société, n’hésitez pas à partager cette publication. Il est urgent que tout le monde change de regard et s’informe, les citoyens comme les professionnels. Car c’est seulement en diffusant largement la diversité des traumatismes générés par les violences sexuelles que l’information infusera la société. Demandons aux politiques de faire leur part, faisons changer les lois, les cursus… Et en tant que particulier, partageons les savoirs récents pour faire bouger les croyances !

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Si vous avez besoin d’aide, n’hésitez pas à consulter les ressources en ligne du site de Delphine Bernard, Le regard du miroir, où vous trouverez un accompagnement bienveillant et éclairé sur les troubles du comportement alimentaire.

Sources :

Instagram : https://www.instagram.com/auroremaletkaras_phd/?hl=fr. et  https://www.instagram.com/d.bernard51/?hl=fr

Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100009730025943
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Liens : le regard du miroir
https://cfcv.asso.fr/
www.auroremaletkaras.com

Publications : https://www.madmoizelle.com/les-troubles-du-comportement-alimentaire-sont-une-consequence-meconnue-des-violences-sexuelles-ces-chercheurs-tirent-lalarme-1284511
https://www.leparisien.fr/sentinelles/en-maigrissant-je-disparaissais-un-peu-troubles-alimentaires-lautre-consequence-meconnue-des-violences-sexuelles-02-04-2022-LXX5RGSNMNCN5KMHN5CXOKB4YI.php

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Rapport CIIVISE : résumé et préconisations supplémentaires

Rapport Commission Inceste (CIIVISE) du 31 mars 2022 : résumé et préconisations supplémentaires ...de la part de l’association Protéger l’enfant et l’association Sous le regard d’Hestia

…de la part de l’association Protéger l’enfant et l’association Sous le regard d’Hestia.

Nous remercions chaleureusement la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants) d’avoir, une fois de plus, posé les enjeux liés à la protection de l’enfance de manière claire, précise et agissante. Afin de répondre à la demande de la Commission telle que formulée lors des rencontres de la CIIVISE à Paris, le 16 février, les adultes et parents protecteurs se sont constitués en association en rejoignant l’association Protéger l’enfant en partenariat étroit avec l’association ressource « Sous le regard d’Hestia ».

C’est dans ce contexte que nous souhaitons porter à votre connaissance et celle du grand public, à la fois nos remerciements à la Commission pour le travail historique qu’elle réalise et nos réflexions, qui vous sont remises en partage.

Vous trouverez ci-dessous, un résumé de votre rapport, le rappel de vos préconisations ainsi que les compléments de préconisations que nous souhaitions partager à votre commission ainsi qu’à la société française dans son ensemble.


AXE 1 : Le repérage des enfants victimes

1. Constat de la CIIVISE : Les violences sexuelles ne sont pas l’apanage d’un groupe social particulier, il n’y a pas de profil type de l’agresseur. Le repérage systématique en posant la question de l’existence de violences sexuelles est demandée car la pratique du repérage par signe est insuffisante. Le questionnement systématique est recommandé par la Haute Autorité de Santé (HAS).

La révélation sans protection est une mise en danger supplémentaire

  • Préconisation CIIVISE 1 : Organiser le repérage systématique des violences sexuelles de tous les enfants, par tou.te.s les professionnel.le.s.
  • Complément de préconisation des associations Protéger l’enfant et Sous le regard d’Hestia : Si le nombre d’enfants victime est aussi élevé, il faut considérer que les agresseurs sont bien potentiellement partout. Afin d’assurer un repérage efficace, il est demandé à ce que soit utiliser le protocole d’audition des enfants NICHD (National Institute of Child Health and Human Development- Institut national pour la santé des enfants et le développement humain) pour les professionnels et le protocole CALLIOPE pour les enfants (importé du Québec par Alexis Danan de Bretagne).

2. Constat de la CIIVISE : L’existence de l’outil de formation Eliza utilisé par les formateurs de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) est capital. Il s’agit d’un outil officiel gouvernemental pour former les agents publics.

  • Préconisation CIIVISE 2 : Organiser le repérage systématique des violences sexuelles dans l’enfance auprès de tous les adultes par tous les professionnels.
  • Complément de préconisation : Ce repérage ne pourra être organisé que si tous les professionnels sont (vraiment) formés. Par exemple : les mères qui dénoncent des violences sexuelles sur leurs enfants, et qui par ailleurs indiquent avoir elles- mêmes été victimes dans leur enfance de ce même type d’agression auprès des services sociaux, vont souvent être stigmatisées comme faisant reporter le mal être de cette situation sur leur enfant. Les services sociaux ou psychologues auront tendance à considérer que la mère se projette sur l’enfant, même si cette dernière a suivi à titre personnel un parcours de prise en charge psychologique.

3. Constat de la CIIVISE : Le Service national d’accueil téléphonique de l’enfance en danger (SNATED) ou 119 répond principalement aux enfants en danger et aux adultes proches (famille, voisinage) mais aussi aux professionnels.

  • Préconisation CIIVISE 3 : Créer une cellule de conseil et de soutien pour les professionnel.le.s destinataires des révélations de violences sexuelles de la part d’enfants.
  • Complément de préconisation : Il est proposé que soit mis en place une formation pratique visant à effectuer les signalements ou informations préoccupantes à chaque fois qu’ils sont confrontés à un soupçon d’agression sexuelle.

4. Constat de la CIIVISE : Le médecin a une faculté de signalement qui est trop rarement utilisée car d’après la Haute autorité de santé (HAS) les signalements des médecins représentent moins de 5% des signalements (2014).

  • Préconisation CIIVISE 4 : Clarifier l’obligation de signalement des enfants victimes de violences sexuelles par les médecins.

5. Constat de la CIIVISE : Un parent agresseur peut porter plainte auprès du conseil départemental de l’ordre des médecins contre le médecin qui aura réalisé le signalement.

  • Préconisation CIIVISE 5 : Suspendre les poursuites disciplinaires à l’encontre des médecins protecteurs qui effectuent des signalements pendant la durée de l’enquête pénale pour violences sexuelles contre un enfant.

Complément de préconisation : La grande majorité des procédures concernant les violences sexuelles sur enfant se terminent par des classements sans suite. Donc cela ne protège le médecin qu’un temps, le temps de l’enquête pénale, mais après ? Il est donc simplement proposé que tout signalement par un médecin ne puisse jamais faire l’objet d’une poursuite disciplinaire dans le cas de violences sexuelles sur mineur. C’est comme si toutes les personnes et professionnels de tout ordre qui faisaient des signalements au titre de l’information préoccupante via les CRIP pouvaient être dénoncés d’un point de vue disciplinaire. (CRIP – cellules de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes). L’asymétrie de risques de mise en cause des médecins par rapport à toutes les autres personnes pouvant faire des signalements est à questionner.


AXE 2 : Le traitement judiciaire des violences sexuelles

6. Constat de la CIIVISE : Le traitement judiciaire des violences sexuelles faites aux enfants est l’un des aspects principaux des revendications des victimes. Pour limiter l’impact anxiogène des traitements judiciaires, il est important de maîtriser les délais de décision et d’adapter le vocabulaire employé auprès des victimes (ex « classement sans suite » ou ordonnance de « non-lieu » signifie une absence de poursuite pénale et non que les faits n’ont pas eu lieu.)

  • Complément de constat par les associations Protéger l’enfant et Sous le regard d’Hestia : Pour rappel : « Le croisement des enquêtes Contexte de la sexualité en France et Cadre de vie et sécurité nous permet d’estimer que, en France, chaque année, 160 000 enfants subissent des violences sexuelles », indique la Ciivise. 70% des 160 000 plaintes sont classées sans suite. Il reste 30% = 48 000. Sur ces 48 000 il y a 1,64% de condamnations : 790. Donc sur 160000 plaintes, il y a 30% x 1,64% = 0,5% de condamnations. Propos d’Ernestine Ronai lors de la conférence de la CIIVISE  d’octobre 2021 à Paris.
  • Préconisation CIIVISE 6 : Garantir que toutes audition d’un enfant victime au cours de l’enquête sera réalisée conformément au protocole NICHD par un.e policier.e ou gendarme spécialement formé.e et habilité.e.
  • Complément de préconisation : Le principe de précaution contenu dans le principe de droit qui indique que « le Pénal tient le civil en l’Etat », doit être appliqué dans le cadre précis de la protection de l’enfant. Au regard des dysfonctionnements liés à la gestion des procédures et du parcours de protection dans son ensemble, nous demandons à ce que, les mesures conservatoires de suspension de droit de visite et d’hébergement soit systématiquement prononcées, le temps de l’enquête. Au regard de la spécificité et de l’asymétrie des rapports entre un enfant et un adulte, au regard des mécanismes d’amnésie traumatiques, il parait raisonnable, qu’au même titre que la garde à vue effectuée dans tout autre cas de suspicion de délits ou de crime, cette bonne pratique puisse être mise en place. Il s’agirait à ce titre, sans aucun coût pour la société, simplement de donner un signal fort à toute la population française. Il faudrait désormais que le continuum de prise en charge de ces violences par des professionnels, des parents qui signalent, en passant par la Police ainsi que tout le système judiciaire, décide de considérer l’intérêt et la protection des enfants avant celui de l’agresseur supposé.

7. Constat de la CIIVISE : Pour protéger les petites victimes, il faut que soit organisée une prise en charge globale et pluridisciplinaire (médicale, médico-légale, sociale et judiciaire)

  • Préconisation CIIVISE 7  : Déployer sur l’ensemble du territoire national des unités d’accueil et d’écoute pédiatrique, à raison d’une UAPED (unité d’accueil pédiatrique des enfants en danger) par département conformément au second plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2020/2022, ainsi que les salles Mélanie, à raison d’une salle d’audition par compagnie dans les zones de gendarmerie.

8. Constat de la CIIVISE : Le nombre d’experts judiciaires (psychiatre, pédopsychiatre, psychologue, pédiatre) inscrits sur les listes des cours d’appel est nettement insuffisant. Notons la création du diplôme universitaire Expertise légale en pédopsychiatrie et psychologie de l’enfant sous la direction du Pr Mamzer (Laboratoire de Médecine légale Université de Paris), coordonné par les Dr Jean Marc Ben Kemoun et Maurice Berger.

  • Préconisation CIIVISE 8 : assurer la réalisation des expertises psychologiques et pédopsychiatriques par des praticien.ne.s formé.e.s et spécialisé.e.s.
  • Complément de préconisation  Incorporer dans le programme universitaire de base des psychologues et psychiatres, la psychotraumatologie, victimologie enfant/adulte car il manque d’experts en général. Au-delà de toute la connaissance et formations liées aux causes et conséquences des violences (y compris les violences éducatives ordinaires), une formation à la parentalité positive doit être enseignée à tous les professionnels. Il y a de grandes chances que la reconnaissance des violences ou son impossibilité à la reconnaitre par les professionnels en raison de leur histoire personnelle soit un obstacle au traitement de la violence faite aux enfants dans son ensemble. (préconisation 18)

9. Constat de la CIIVISE : La France est le 2ème pays hébergeur de pédopornographie en Europe et le quatrième dans le monde. Le fichier Fijais répertorie les auteurs d’infractions sexuelles et violentes. La France manque de moyens humains et matériels pour une lutte efficace (1 enquêteur pour 2,2 millions de personnes/ GB : 1 enquêteur pour 200000 personnes/Pays Bas : 1/100000).

  • Préconisation CIIVISE 9  : Doter les services de police judiciaire spécialisés dans la cyber-pédocriminalité des moyens humains et matériels nécessaires.

10. Constat de la CIIVISE : Article 706-52 code procédure pénale : l’audition d’un mineur victime de violences sexuelles doit faire l’objet d’un enregistrement audiovisuel. Cela réduit le nombre d’audition et permet de donner des éléments d’appréciation difficilement retranscrits par écrit (émotions, expressions non-verbales, mouvements, silences), permet d’observer éventuellement la peur, la sidération voir la régression (quand il s’agit d’un adulte qui redevient l’enfant aux moments des faits) et l’âge de la victime (délais de procédures longs). La CIIVISE recommande de doter les forces de police et de gendarmerie d’un logiciel de retranscription.

  • Préconisation CIIVISE 10 : Systématiser le visionnage par les magistrat.e.s des enregistrements des auditions des enfants victimes de violences sexuelles.
  • Complément de préconisation  Ils ne sont pas assez nombreux et n’ont donc pas le temps. Il faut donc former plus de magistrats. Il est  primordial que les magistrats voient ces petites victimes. Cela ne peut qu’augmenter le potentiel empathique et donc favoriser leur protection.  Quand les enfants sont petits, ils n’ont pas forcément les mots et dans des procédures écrites tel que c’est la tradition dans le monde judiciaire, il est clair que les enfants sont profondément désavantagés par rapport à des adultes. Voir et apprendre à lire des comportements des enfants devrait être une obligation professionnelle pour les Juges.

11. Constat de la CIIVISE : 70% des plaintes déposées pour violences sexuelles infligées aux enfants font l’objet d’un classement sans suite, le plus souvent au motif que l’infraction est insuffisamment caractérisée. La CIIVISE a demandé et obtenu qu’une mission d’évaluation soit réalisée afin d’analyser les causes de ce taux important de classements sans suite pour renforcer la chaine de protection. L’absence de poursuites pénales peut être interprétée comme une défiance à l’égard de la parole de la victime, comme une incapacité des institutions à la protéger ou comme la consécration de l’impunité de l’agresseur.

  • Préconisation CIIVISE 11 : Systématiser la notification verbale des classements sans suite à la victime par le procureur de la République.
  • Complément de préconisation  Idem que pour la préconisation 10 : devoir rendre des comptes verbalement est plus impliquant pour un procureur ou son représentant et permettra peut-être de limiter les classements sans suite hâtifs.

12. Constat de la CIIVISE : Mise en évidence du déficit de reconnaissance de la place de la victime dans la procédure pénale : La partie civile ne peut faire appel que sur la partie de la décision relative à l’action civile (dommages et intérêts) et non sur la partie de la décision relative à l’action publique (pénal, culpabilité et peine).

  • Préconisation CIIVISE 12 : Permettre à la partie civile de faire appel des décisions pénales sur l’action publique.

13. Constat de la CIIVISE : Article D47-11-3 du code de procédure pénale : lorsqu’un parent mis en cause pour non présentation d’enfant allègue que l’enfant est victime de violences par l’autre parent, le procureur de la République doit faire vérifier ces allégations avant toute poursuite pour non-représentation d’enfant.

  • Préconisation CIIVISE 13 : Prévoir, dans la loi, la suspension de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi pour viol ou agression sexuelle incestueuse contre son enfant.
  • Préconisation CIIVISE 14 : Prévoir, dans la loi, le retrait systématique de l’autorité parentale en cas de condamnation d’un parent pour violence sexuelles incestueuses contre son enfant.
  • Complément de préconisation : Il faut absolument prévoir dans la loi également le retrait systématique de l’autorité parentale en cas de condamnation d’un parent pour violence sur l’autre parent.  Il s’agit d’aller bien au délà du décret du 23 novembre 2021 qui reconnait l’enfant co-victime des violences conjugales et ne lui permet seulement que de se constituer partie civile. Quand on est un enfant, victime par exposition à la violence conjugale, que la société lui demande de faire à son tour des procédures, est une violence institutionnelle de plus. La protection de l’enfant doit être automatique quand il y a violence sur l’autre parent.

De plus, il faut envisager des modalités de prise en charge de l’agresseur :

  • Obligation d’un suivi psychologique avec vérification du suivi par la justice (par exemple : vérification une fois par an jusqu’à la majorité des enfants victimes)
  • Constituer une liste des agresseurs (utiliser Fijais / www.coabuse.com), qui continueront à travailler et qui seront obligés de souscrire à un fond d’aide aux victimes (enfants et parents protecteurs). 

AXE 3 : La réparation par le soin et l’indemnisation

14. Constat de la CIIVISE : Conséquences des violences sexuelles subies dans l’enfance : Troubles durables de la personnalité ou du développement, préjudice scolaire, sexuel, professionnel

  • Symptômes : conduites d’évitement (lieu, personne, activité), cauchemars et difficultés pour s’endormir, hyperactivité, irritabilité, signes de souffrance physique sans cause organique, état de dissociation cognitive, corporelle et émotionnelle. Symptômes qui deviennent chroniques s’ils ne sont pas traités. Autrement dit, si les enfants ne reçoivent pas de soins immédiatement après la première révélation des violences, ils risquent de développer des symptômes et pathologies chroniques lourdes.
  • Impact : ½ font des tentatives de suicide et ½ font des dépressions à répétition, ½ à 1/3 présentent des conduites addictives, conduites à risque et mises en danger, et des troubles alimentaires.
  • Pathologies somatiques : diabète, troubles cardio-vasculaires, immunitaires, endocriniens, digestifs (colopathies, anisme).
  • Risques : IST (infection sexuellement transmissible) et grossesse sur viol.
  • Mémoire Traumatique : la réminiscence, les intrusions, les flashbacks des violences subies, font revivre sans cesse ces violences comme si elles étaient en train de se reproduire, obligeant les victimes à recourir à des conduites d’évitement et/ou dissociantes à risque pour éviter ou anesthésier ce trauma.

15. Constat de la CIIVISE : Il y a un nombre insuffisant de psychologues ou de pédopsychiatres et la spécialisation en psychotrauma des praticien.ne.s doit être mieux organisée et vérifiée. Il n’est pas envisageable de prodiguer utilement des soins à un enfant victime encore contraint de rencontrer son agresseur. La France est signataire de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, qui prévoit « la mise en place de centres d’aide d’urgence pour les victimes de viol et de violences sexuelles, appropriées, facilement accessible et en nombre suffisant. (art 25) »

  • Préconisation  CIIVISE 15 : Garantir des soins spécialisés en psychotrauma aux enfants victimes de violences sexuelles et aux adultes qu’ils deviennent.
  • Complément de préconisation :
  • Où peut-on trouver ce type de centre ? En suisse pour la protection en urgence des familles subissant de la violence intrafamilialle, existe des « maisons protégées » où les familles peuvent vivre de manière cachée, le temps de la prise en charge judiciaire.
  • Il est aussi important d’apporter tout le soutien en matière de parentalité positive aux parents ayant extraits leurs enfants de violences mais qui continuent d’en subir les effets et conséquences. Il faut pouvoir apprendre aux parents à comprendre les comportements de leur enfant pour mieux les accueillir et les entourer pour qu’ils puissent apprendre à grandir dans un environnement sécure. Ayant été abusé par un adulte proche ou non, l’enfant n’aura plus de repères ni externes ni internes. Il faut aider aussi les parents / ou le parent protecteur à retisser un lien et aider l’enfant à retrouver des repères internes et externes. Cela s’apprend (méthode de la communication non violente est très efficace cf.Mme Filliozat, Mme Gueguen). 

16. Préconisation CIIVISE 16 : Garantir une réparation indemnitaire prenant réellement en compte la gravité du préjudice en :

Remboursant l’intégrité des frais du médecin conseil.

Complément constat : aujourd’hui, les frais sont à la charge de la victime.

-> Réparant le préjudice sous forme de provision pendant la minorité de la victime avec réévaluation à l’âge adulte.

Complément constat : Les conséquences sur la vie d’adulte sont difficiles à évaluer quand la victime est enfant.

-> Créant des chambres spécialisées sur intérêt civil en matière de violences sexuelles et une commission d’indemnisation dédiées aux violences sexuelles ; -> Reconnaissant un préjudice intrafamilial spécifique en cas d’inceste.

Complément constat : division et déni familial, perte de confiance dans les structures protectrices telles que famille ou société en général ; perte de confiance en soi-même, impossibilité à vivre avec la disparition des repères internes et externes.

-> Reconnaissant de façon plus juste le préjudice sexuel.

Complément constat : Dans les témoignages rendus à la CIIVISE, 9 personnes sur 10 indiquent que les violences sexuelles ont eu un impact sur leur vie affective et sexuelle.


AXE 4 : La prévention des violences sexuelles

17 . Constat de la CIIVISE : Pour mobiliser la société toute entière, il sera nécessaire de réaliser une grande campagne nationale de prévention. Les violences sexuelles imposées à l’enfant est une récusation de celui-ci comme sujet, une chosification de l’enfant qui devient un objet de jouissance pour son agresseur. L’agresseur, souvent dépositaire d’une autorité, exerce des violences sexuelles dans un rapport asymétrique de domination qui rend difficile à l’enfant de s’opposer à l’adulte ou au plus grand.

Il faut apprendre à l’enfant à connaître le registre de l’intimité (corporelle, affective, émotionnelle). Il faut respecter sa pudeur dans le cadre scolaire et des activités sportives spécifiquement (attention à l’organisation des vestiaires). Le respect de l’intimité conduira l’enfant à approfondir les enjeux de la périnatalité ou des contextes incestueux.

  • Préconisation CIIVISE 17 : Former les professionnel.le.s en contact avec les enfants au respect de l’intimité corporelle de l’enfant.

Complément de préconisation : Il faut absolument apprendre à un enfant à dire non à l’adulte. Il faut également former tous les professionnels mais aussi les parents à mettre fin aux violences éducatives ordinaires, terreau des dominations et soumissions des enfants. Ces soumissions ordinaires sont propices à ce que l’enfant ne sache pas dire non lorsqu’un adulte lui impose des choses qu’il ne souhaite pas faire. (ex : forcer un enfant à faire un bisou à un adulte, ne lui apprend pas à dire non, lorsque son père, oncle ou cousin incesteur lui demande de faire la même chose). Les violences éducatives ordinaires soumettant les enfants, sont un avantage pour les agresseurs souhaitant abuser sexuellement des enfants.

18. Préconisation CIIVISE 18 : Renforcer la formation initiale et continue de tou.te.s les professionnel.le.s concerné.e.s sur la protection de l’enfance et la lutte contre les violences sexuelles, avec un module spécifique validé dans les diplômes.

  • Complément de préconisation : La formation doit comprendre la formation à la prévention aux violences éducatives ordinaires et aux rapports de dominations qui en sont la principale cause.

19.  Constat de la CIIVISE

  1. « Quand on te fait du mal » : brochure de prévention pour les enfants de maternelle, jusqu’au CE1 de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie, distribuée gratuitement et disponible en ligne.
  2. « Le Loup » : album écrit par Mai Lan Chapiron pour briser le tabou de l’inceste et aborder la problématique des violences sexuelles faites aux enfants.
  • Préconisation CIIVISE 19 : Assurer la mise en œuvre effective à l’école des séances d’éducation à la vie affective et sexuelle et garantir un contenu d’information adapté au développement des enfants selon les stades d’âge.
  • Complément de préconisation : La formation aux violences éducatives ordinaires et à la parentalité positive sont des formations qui devraient être proposées gratuitement pour tous les parents.

20. Constat de la CIIVISE : Des campagnes existent, mais sont mal distribuées faute de moyens :

  1. Association Innocence en danger : en 2015, « Lui ne peut pas parler, vous, vous pouvez »
  2. Face à l’inceste : en Janvier 2021, sur les insuffisances du cadre légal en matière de lutte contre l’inceste.
  3. Colosse aux pieds d’argile : septembre 2019, prévention contre les violences sexuelles faites aux enfants dans le milieu du sport.
  4. Pouvoirs publics :Campagnes nationales de 2002 : « Se taire, c’est laisser faire »
  5. Pouvoirs publics et 2022 : sensibilisation de la prostitution des mineur.e.s
  • Préconisation CIIVISE 20 : Organiser une grande campagne nationale sur les violences sexuelles faites aux enfants afin de faire connaître leurs manifestations et leurs conséquences sur les victimes, de faire connaître les recours possibles pour les victimes, de mobiliser les témoins en rappelant que ce sont des actes interdits par la loi et sanctionnés par le Code pénal.
  • Complément de préconisation :
  1. Mettre en avant les associations d’aide aux adultes subissant des attirances sexuelles envers les enfants (pedoHelp) pour empêcher le passage à l’acte.
  2. Mettre en avant les associations d’appui à la parentalité positive (ex : Communication non violente, Montessori…)
  3. Publier et distribuer des flyers donnant les chiffres des violences sexuelles faites aux enfants, comment les reconnaître (signes, parole de l’enfant) et comment réagir.
  4. Faire une information systématique ciblée pour les professionnels de l’enfance (social, psy…).(Nous travaillons actuellement sur un flyer dont nous pourrons vous soumettre le contenu bientôt)
  5. Proposer des formations en ligne gratuites et en accès libre pour tous les parents sur les violences éducatives ordinaires et sur la parentalité positive comme alternative.

Pour toutes informations sur le sujet :

Site d’information et ressources :  https://sousleregarddhestia.fr/

Site d’entraide et ressources : www.protegerlenfant.fr 

Email de contact : contact@protegerlenfant.fr

4 propositions pour mieux protéger les enfants victimes de violences

4 propositions pour mieux protéger les enfants victimes de violences

Vous pouvez signer ici notre pétition =>

4 propositions pour mieux protéger les enfants victimes de violences

Etat des lieux

1. La violence faite aux enfants : un fléau national

Des chiffres dramatiques *

•             1 infanticide tous les 5 jours.

•             Près de 165.000 enfants chaque année victimes de

              violences sexuelles.

•             80% des violences sexuelles sont des violences

              intrafamiliales.

•             Seules 15% des violences sexuelles font l’objet d’une

              plainte.

•             73% des plaintes pour viol sont classées sans suite.

•             Seules 8% des victimes qui ont parlé ont été

              protégées.

* Sources : Enquête Ipsos de l’association Association Mémoire Traumatique et Victimologie « violences sexuelles de l’enfance » 2019 – enquête de victimation CSF 2008, ONDRP 2012-2017, VIRAGE 2017, OMS, 2014

Les violences sur enfants sont minimisées voire invisibilisées.

« On dit qu’il y a 165 000 enfants victimes tous les ans et il y a moins de 1 000 condamnations pour viol adultes et enfants. Pour les viols aggravés, c’est-à-dire les viols sur enfants, il y a 400 condamnations pour viol. Les viols sur mineur sont probablement le crime le plus impuni qui soit. »

Dre Emmanuelle Piet – Membre du Haut Conseil à l’Egalité, présidente du Collectif féministe contre le viol (CFCV)

Les enfants témoins des violences conjugales sont des co-victimes. Si la Justice éloigne le parent violent du parent victime, elle doit aussi en éloigner les enfants.

2. La parole de l’enfant est remise en question

Depuis l’affaire Outreau la parole de l’enfant a été désacralisée. Pourtant, les 12 enfants concernés ont bien été reconnus victimes de viols et d’agressions sexuelles. Depuis lors, la Justice présume trop souvent que les enfants sont instrumentalisés. A la suite de cette affaire le nombre de  condamnations pour viols et violences sexuelles s’effondre de 23% alors que les plaintes augmentent. En dix ans, le nombre de personnes condamnées pour viol a chuté de 40 %*.

*Sources : Le Monde 14/09/2018 (source Ministère de la Justice, Fichier statistique du casier judiciaire national)

« Le risque réel auquel sont confrontés les professionnels intervenant dans le champ pénal ou celui de la protection de l’enfance n’est pas d’inventer ou de surinterpréter des révélations de violences sexuelles subies, mais au contraire de laisser passer sous leurs yeux des enfants victimes sans les protéger. »

Édouard Durand, juge des enfants, co-président de la commission inceste

3. La parentalité à tout prix : un danger

Aujourd’hui le droit à l’enfant prime sur le droit de l’enfant.

Dans le cadre d’une séparation des parents, la Justice présume souvent que le parent protecteur qui dénonce des faits de maltraitance sur l’enfant de la part de l’autre parent est manipulateur ou menteur.

En réduisant les violences dénoncées par l’un des parents à un « conflit familial », les magistrats prennent le risque d’appliquer des mesures inadaptées voire destructrices pour l’enfant. Le syndrome d’aliénation parentale trop souvent invoqué revêt « un caractère controversé et non reconnu » (réponse du Ministère de la Justice publiée dans le JO Sénat du 12/07/2018 – page 3477).

« Un conflit est un conflit, des violences sont des violences. La frontière entre les deux est très claire : on voit très bien ce que c’est qu’un être qui a peur, qui n’ose pas s’exprimer, qui est sous l’emprise d’un autre. En maintenant des rencontres sans protection, on permet à l’agresseur de maintenir l’emprise sur la famille, même dix ans après la séparation. » 

Édouard Durand, juge des enfants, co-président de la commission inceste

4. La double peine pour l’enfant et son parent protecteur

Confronté à une décision de justice qui accorde des droits de visite et d’hébergement ou une garde alternée au parent violent, le parent protecteur se refuse à exposer son enfant à de nouvelles maltraitances. Il commet alors le délit de non représentation d’enfant.

La Justice n’hésite pas alors à condamner le parent protecteur (amendes et peines de prison), à transférer la garde de l’enfant au parent potentiellement violent, ou encore à placer l’enfant en foyer.

Ces situations aussi aberrantes que dramatiques surviennent lorsque les plaintes déposées contre le parent violent sont classées sans suite ou encore en cours d’instruction.

Pour rappel, les principaux motifs de classement sans suite des plaintes pour violences sexuelles sur mineurs et majeurs sont l’infraction insuffisamment caractérisée (65%) et l’absence d’infraction (11,8%)*.

Un classement sans suite ne signifie pas que l’infraction n’a pas eu lieu.

Le classement sans suite continue à agir comme une chape de plomb aboutissant à nier la parole de l’enfant et à abandonner ces petites victimes à leur triste sort… Ce contre-sens juridique a des conséquences judiciaires désastreuses sur la protection des enfants.

Pascal Cussigh, Avocat

Nous regrettons que les juridictions civiles et pénales ne communiquent pas mieux entre elles sur la situation des enfants en danger.

Plusieurs milliers d’entre eux se retrouvent ainsi non protégés en grande souffrance, et leur parent protecteur sous le coup de la loi.

4 Propositions pour une société qui protège ses enfants

1. Hypervigilance

Toutes les violences sont graves.

Il ne faut pas attendre qu’il y ait un cumul de violence car la première violence révélée ne signifie pas la première violence vécue.

Il faut reconnaître toutes les formes de violences, physiques, sexuelles, psychologiques, financières. Aucune ne doit être banalisée par la police et par la Justice.

La connaissance des mécanismes du contrôle coercitif est indispensable, il s’étend au-delà̀ de la violence physique et comprend intimidations, isolement, contrôle, dévalorisation de la victime, inversion de culpabilité, instauration d’un climat de peur et d’insécurité.

Les professionnels doivent savoir que l’exercice de l’autorité́ parentale après la séparation devient pour la personne violente LE moyen de perpétuer sa violence et son emprise sur son ex-conjoint et sur ses enfants. Le harcèlement et la domination s’exercent alors via la coparentalité.

Si des groupes de recherche comme le Réseau International des Mères en Lutte (RIML) travaillent efficacement sur le sujet du contrôle coercitif post séparation, ces concepts ne sont pas encore bien maîtrisés par la Justice qui se retrouve instrumentalisée par le parent agresseur.

Nous demandons la reconnaissance du contrôle coercitif : il permettrait d’apporter des preuves matérielles identifiables concrètement.

2. Présomption de crédibilité de la parole de l’enfant

Il est nécessaire de donner autant de poids à la présomption de crédibilité de la victime qu’à la présomption d’innocence de l’accusé.

On ne dit pas que le parent accusé est forcément coupable, on dit que la victime doit être entendue en cas de violence vraisemblable.

Il est important que les professionnels – gendarmes, policiers, professionnels de santé et de l’éducation, intervenants sociaux – accueillent de façon adaptée la parole de l’enfant.

Nous souhaitons que le Protocole NICHD et la formation Calliope soient généralisés. Ils permettent de diminuer la suggestibilité des intervieweurs et d’adapter leurs questions en fonction des capacités des enfants et d’aider ceux-ci à fournir un récit plus riche et plus détaillé tout en étant exact.

Pour ce faire l’accueil doit être bienveillant, sécurisant, respectueux et accorder suffisamment de temps à l’enfant.

Dans cette optique nous appelons à :

  • la généralisation des pôles d’accueil commissariat/gendarmerie spécialisés violences conjugales et familiales.
  • la création spécialisés dédiés aux violences intra-familiales. L’Espagne y est parvenue. Pourquoi pas nous ?

3. Appliquer pour l’enfant le principe de précaution

On doit protéger immédiatement l’enfant qui révèle des violences.

Ne pas signaler et/ou réagir est de la non-assistance à personne en danger.

Il est urgent que les professionnels de santé puissent attester des violences sans craindre des sanctions et être suspendus par leur ordre.

Il est inaudible d’entendre l’Ordre des Médecins sanctionner un des leur sous prétexte qu’il y a eu « immixtion dans la vie familiale ». Par extension il est nécessaire de protéger toutes les personnes qui effectuent des signalements.

Enfin il est indispensable dans l’intérêt de l’enfant de protéger le parent protecteur du parent violent. Il faut donc réformer le délit de non représentation d’enfant.

Si une plainte pour inceste/violence/maltraitance est en cours d’instruction OU si la plainte a été classée sans suite mais qu’il existe un doute plausible, les droits de visite et d’hébergement du parent accusé devraient être suspendus.

Il ne s’agit pas de supprimer ce délit qui est utile en cas d’enlèvement d’enfant ou de séquestration d’enfant mais de faire disparaître l’infraction pour les parents protecteurs.

Lorsqu’il y a retrait de l’autorité parentale, il faut évidemment l’accompagner du retrait des droits de visite et d’hébergement.

4. Plus de moyens humains et financiers

Pour mieux protéger les enfants, les accueillir, réduire les délais d’instruction, que moins de plaintes soient classées sans suite, donnons les moyens humains et financiers à tous les intervenants, magistrats, greffiers, policiers, gendarmes… Chaque jour compte quand on demande la suspension des droits de visite et d’hébergement pour des faits d’abus sexuels ou de violences.

Faute de temps et de moyens le juge des enfants peut accorder une importance trop grande aux rapports des enquêteurs sociaux, or or la complexité des psycho-trauma de l’enfant n est pas reconnue ou mal prise en compte ; ces personnes peuvent être prises au piège de la personnalité complexe du parent agresseur et/ou être victimes de préjugés selon lesquels les femmes sont surprotectrices, veulent s’approprier l’enfant, veulent se venger…

On pourrait imaginer une traçabilité des plaintes : nous devrions pouvoir consulter grâce à un  » numéro de plainte  » l’état de la plainte, tout comme lorsque nous envoyons notre colis. Cela permettrait une transparence du processus.

Enfin, en dehors du champs judiciaire, il faut investir également dans la prévention. 3 enfants par classe sont victimes de violences sexuelles ; il faut y ajouter les enfants victimes de graves violences  physiques ou psychologiques. Pourquoi ne pas organiser régulièrement en classe des interventions afin que les enfants puissent imaginer rompre le silence ? Il faudrait également plus d’infirmières scolaires dans les établissements.

Protégeons les enfants ! Plaçons les droits de l’enfant au cœur du dispositif législatif de la famille !

Apprenons à protéger nos enfants

violences intra-familiales inceste

On le sait désormais, les violences intra-familiales sont majoritaires. C’est contre-intuitif, mais le danger n’est pas l’inconnu et ses bonbons, mais des figures familiales bien connues.

Les violences sexuelles commises sur les mineurs ont à 80% lieu dans un cadre familial, dans un cercle intime, celui-là même qui devrait garantir la sécurité, l’amour, le respect et l’épanouissement.

Ce sont des crimes non vus, impunis et avec un déni colossal. Pourtant les enfants parlent, émettent des signaux de souffrance, mais nous ne sommes pas capables de les entendre.

Les violences intra-familiales, des chiffres affolants

🔸 Les plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite dans 73% des cas.

Seules 11,8% de ces plaintes classées sans suite le sont pour absence d’infraction… dans l’écrasante majorité des cas ces plaintes sont classées pour « Infraction insuffisamment caractérisée »
(source : http://www.justice.gouv.fr/art_pix/stat_infostat_160.pdf).

🔸 S’agissant des viols sur mineurs, seules 4% des victimes portent plainte, seules 10% de ces plaintes aboutissent aux assises, et parmi elles seules 30% d’entre elles sont jugées comme étant criminelles. C’est un constat d’échec total.

🔸 Depuis l’affaire Outreau la parole de l’enfant a été désacralisée, les condamnations pour viols et agressions sexuelles ont chuté de 23% à partir de 2005.

« Le risque réel auquel sont confrontés les professionnels intervenant dans le champ pénal ou celui de la protection de l’enfance n’est pas d’inventer ou de surinterpréter des révélations de violences sexuelles subies, mais au contraire de laisser passer sous leurs yeux des enfants victimes sans les protéger. » (Édouard Durand, juge des enfants, co-président de la commission inceste)

🔴 Il est inacceptable que la justice échoue à protéger les victimes.

protéger des enfants des violences familiales

Le cas horrible de l’inceste

« Il y a pour tout le monde une incorporation de la peur et de la grammaire du silence autour de l’inceste. Le véritable interdit ou tabou de l’inceste, ça n’est pas de le commettre, puisque ça arrive partout, tout le temps, mais c’est d’en parler. » Dorothée Dussy

Dans le cadre des violences intra-familiales, l’inceste fait figure d’effrayant emblème. Il existe en proportion gigantesque mais reste tabou. Le mécanisme du silence de l’inceste est puissant.

🔸 Quand la vérité est exposée, très souvent, les relations familiale avec l’incesteur ne sont pas altérées. Non seulement les victimes ont d’immenses difficultés à être soutenues et entendues. Mais c’est souvent elles qui se retrouvent exclues du cercle familial.
Ce qui pose problème à la famille est moins l’acte que son dévoilement. La réputation passe avant la protection de l’enfant. La victime qui a parlé est jugée pour avoir apporté l’opprobre.

🔸 Qui sont les incesteurs ? 96% des incesteurs sont des hommes. Ils seraient environ 1 million, rien qu’en France.
Portrait robot de l’incesteur :
– C’est une personne dominante
– C’est une personne qui est conflictuelle et ne fait rien pour apaiser le conflit
– La justice fait partie de son pouvoir de nuisance, c’est un nouvel instrument

🔸 Il y a tellement d’incestes perpétrés en France que nous connaissons forcément les auteurs de ces violences. Statistiquement, tout le monde a rencontré un incesteur.

3 enfants sur 30 sont victimes d'inceste

Pour en savoir plus :
👉 Livre « Le voyage dans l’Est » Christine Angot
👉 Livre « Le berceau des dominations : anthropologie de l’inceste », Dorothée Dussy
👉 Livre « Les silences de la loi : une magistrate face à l’inceste » Marie-Pierre Porchy
👉 Podcast Les couilles sur la table « Qui sont les incesteurs ? » : https://www.binge.audio/podcast/les-couilles-sur-la-table/qui-sont-les-incesteurs
👉 https://www.protegerlenfant.fr/2021/05/19/mecanismes-silence-inceste/
👉 https://www.protegerlenfant.fr/2021/05/15/qui-sont-les-incesteurs/

Source : https://facealinceste.fr/blog/dossiers/le-nouveau-chiffre-de-l-inceste-en-france

Le droit à la parole de l’enfant

la parole des enfants

Les viols sur mineur sont probablement le crime le plus impuni qui soit.” (Dr Emmanuelle Piet)

🔸 Il est inacceptable que la justice échoue à protéger les victimes. Les chiffres sont affolants : 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 13 subissent des violences sexuelles , dont la moitié sont incestueuses. Aujourd’hui les violences sur enfants sont invisibilisées.

🔸 Pourtant les enfants parlent, émettent des signaux de souffrance, mais nous ne sommes pas capables de les entendre.

parole des enfants



🔸 Nous souhaitons que la parole de l’enfant soit mieux prise en compte, que l’on applique le principe de précaution pour l’enfant, et que les magistrats, policiers, gendarmes, psys, personnel de l’éducation nationale, professionnels de l’enfance et de santé soient mieux formés : aux mécanismes de contrôle coercitif et de violences post séparation, au recueil de la parole de l’enfant sur le modèle du Protocole NICHD et de la formation Calliope.
Enfin nous souhaitons que ne soient pas utilisés de façon inappropriée les termes « aliénation parentale » « conflit familial » ou « instrumentalisation ».

🔸 Notre société doit apprendre à protéger ses enfants. Nos institutions doivent entrer dans une culture de la protection : un parent violent n’est pas un bon parent, le lien parent – enfant n’est souhaitable que si le parent respecte son enfant.

Nous vous conseillons la vidéo @konbini sur ce sujet :
👉 https://www.instagram.com/tv/CSWZG88oN4M/?utm_source=ig_web_copy_link
👉 https://fb.watch/7i1BoRMM6U/

Merci à Jeannine, bénévole à Protéger l’enfant, pour le texte des slides.

Formons les magistrats aux différents contrôles coercitifs

contrôle coercitif

Les magistrats sont insuffisamment formés aux mécanismes de contrôle coercitif. Le contrôle coercitif s’étend bien au-delà de la violence physique et sexuelle, il peut comprendre des intimidations, l’isolement, le harcèlement, le dénigrement systématique, etc. Il existe hélas une palette très variée des violences (psychologiques, économiques, domination…).

Ces mécanismes sont très présents lors des séparations où l’un des conjoints exerce une emprise sur l’autre. Pourtant, la justice ne les prend pas en compte, ne les voit pas ou est à sous tour instrumentalisée. Elle devient un outil entre les mains du parent agresseur, pour maintenir l’emprise.

C’est le parent toxique qui va prendre le pouvoir par des procédures et continuer ainsi son emprise sur ses victimes.

contrôle coercitif



🔸 Des groupes de recherche comme le Réseau International des Mères en Lutte travaillent sur le sujet du contrôle coercitif post séparation, mais ces concepts ne sont pas encore bien maitrisés par la justice. Les magistrats devraient pouvoir bénéficier d’une formation sur ces sujets.

🔸 Une piste intéressante : pourquoi ne pas créer des tribunaux de la famille qui regrouperaient, civile et pénal, Juge aux affaires Familiales, Juge des Enfants et Juge d’instruction pour une même famille ? Ils pourraient ainsi travailler ensemble, qu’ils partagent les informations et se coordonnent afin d’être moins manipulés. Actuellement il n’y a pas de véritable coordination entre les juridictions et leurs intervenants.

🔸 On pourrait imaginer la création de tribunaux spécifiques dédiés aux violences intra-familiales, avec une formation spécifique au recueil de la parole de l’enfant et aux mécanismes des violences conjugales et familiales.

Pour en savoir plus sur le contrôle coercitif

Voici quelques articles à lire pour creuser le sujet.

👉 Qu’est-ce que le contrôle coercitif ?

👉 Le huis-clos se referme sur les victimes

L’invention du syndrome d’aliénation parentale

L'histoire de l'invention du syndrome d'aliénation parentale

L’histoire du SAP, le syndrome d’aliénation parentale est intimement liée à son créateur, Richard Gardner

Richard Alan Gardner, psychologue américain né en 1931, est considéré comme l’inventeur du syndrome d’aliénation parentale.

Il a créé en 1987 cette théorie en s’appuyant sur ses observations personnelles de familles vivant des conflits de garde d’enfants.

Richard Gardner possède son cabinet de consultation à la Colombia University mais il gagne sa vie autrement. Il est utilisé comme expert psy par des avocats qui défendent principalement des pères accusés d’abus sexuels sur leurs enfants. Il est grassement payé à chaque victoire.

Gardner explique devant les juges que les dénonciations des enfants sont dans la majorité des mensonges fomentés par la mère.

L’enfant est manipulé par celle-ci dans le cadre du « conflit parental ». Il s’agirait d’un mécanisme d’autodéfense des mères pour pouvoir conserver la garde de leurs enfants.

Gardner publie plusieurs articles et établit alors le syndrome d’aliénation parentale (SAP), qui est décrit comme une manipulation de l’enfant qui, de manière continue, rabaisse et insulte un parent sans justification.

Les profils types de ces manipulateurs, selon Richard Gardner, sont très schématiques

Le parent aliénant cherche à se venger de l’autre parent par l’intermédiaire de l’enfant dont il « lave le cerveau ».

Quant à l’enfant, il a une absence de culpabilité face aux conséquences potentielles de ses accusations.

Gardner recommande une grande rigueur voire une certaine brutalité envers les enfants dit aliénés, moyen de les libérer de l’envoûtement qui les oppresse…

Gardner crée alors une liste de 83 critères qui lui permettent d’échelonner l’aliénation de l’enfant par le parent manipulateur (qui est presque toujours la mère selon lui). A la fin, on obtient un score final qui détermine le degré d’aliénation parentale.

Les critiques des confrères arrivent rapidement. La plus importante est celle de l’absence de démarche scientifique.

La sélection de ces critères part d’a priori de Gardner  et de ses convictions. Son échelle de mesure est donc jugée peu fiable et trop sujette à interprétation personnelle.

Le souci, c’est que Richard Gardner a des croyances effrayantes.

C’est un défenseur de la pédophilie.

Il minimise l’impact de ce type d’abus sur les victimes, banalise la pratique et cherche souvent à la justifier.

Dans son livre « True and false accusations of child sex », Gardner déclare que « la pédophilie a été considérée comme étant la norme par la vaste majorité des individus dans l’histoire du monde » et qu’il s’agit là « d’une pratique largement répandue et acceptée parmi littéralement des milliards de personne. »

«  De nombreuses sociétés ont été injustement répressives à l’égard de ceux qui ont des tendances sexuelles paraphiles et n’ont pas prêté attention aux facteurs génétiques qui peuvent les expliquer. Prendre en considération cette dimension pourrait permettre de mieux tolérer ceux qui ont des penchants sexuels atypiques. J’espère que cette théorie permettra de mieux comprendre et respecter ces individus qui par ailleurs jouent un rôle dans la survie de l’espèce. »

Gardner « True and False Accusation », note 27, 670

«  L’enfant victime d’agressions sexuelles est généralement tenu pour une victime alors que l’enfant peut parfaitement initier des rencontres sexuelles en ‘séduisant’ l’adulte. »

Gardner, R.A. (1986), « Child Custody Litigation: A Guide for Parents and Mental Health Professionals », p 93

Selon lui, les abus sexuels n’auraient pas forcément des conséquences traumatisantes pour les enfants concernés, les effets dépendraient des attitudes sociales vis-à-vis de la pédophilie. Plus on se détendrait sur le sujet, moins les enfants en souffriraient. Mais pourquoi n’y avait-on pas pensé avant !!

Malgré les fortes controverses au sein de la communauté scientifique, le syndrome d’aliénation parentale gagne du terrain

Pire, le syndrome d’aliénation parentale fait des ravages dans les affaires de pédocriminalité.

Il permet de ne pas tenir compte des paroles des enfants victimes ou de celles du parent protecteur (presque toujours la mère).

A cause du syndrome d’aliénation parentale, encore aujourd’hui, de nombreuses affaires d’inceste sont classées sans suite (malgré les dossiers médicaux…). Pire, on voit de plus en plus d’enfants retirés au parent protecteur puis confiés à l’abuseur qui devient la victime aux yeux de la Justice.

Les psychologues et les psychiatres sont témoins des dégâts majeurs provoqués par l’utilisation du SAP lors des séparations parentales.

Une ré-information est en cours.

Dans une réponse ministérielle du 12 juillet 2018, le Ministre de la Justice annonce la publication d’une note sur le site de la Direction des Affaires Civiles et du Sceau, destinée à informer les magistrats sur le caractère « controversé et non reconnu » du syndrome d’aliénation parentale.

La Catalogne vient d’inscrire dans sa loi que l’usage du syndrome d’aliénation parentale est désormais considéré comme une violence institutionnelle. Et le procureur général de la Cour de cassation à Rome a condamné l’usage de ce concept.

Mais encore beaucoup trop de magistrats utilisent le concept d’aliénation parentale pour justifier la condamnation du parent protecteur pour délit de non représentation d’enfant.

Ainsi par exemple en novembre 2019, une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) qui demandait une réforme du délit de non représentation d’enfant a été rejetée : la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que la résistance de l’enfant est due à  l’ « instrumentalisation » de l’enfant par le parent  : «chaque parent devant faciliter l’exercice des droits de l’autre parent, sans instrumentalisation de l’enfant » (Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 novembre 2019, 19-83.357) (voir à ce sujet nos articles La chambre criminelle s’intéresse-t-elle aux droits des enfants ? et Pourquoi faut-il réformer le délit de non représentation d’enfant ? )

Les institutions françaises doivent évoluer, c’est urgent !


Sources et liens utiles