Violences intrafamiliales, Doit-on parler de victimes ou de proies ?

Violences intrafamiliales, Doit-on parler de victimes ou de proies ?

Quand on parle des personnes qui ont subi de l’emprise et des violences psychologiques, sexuelles, financière, etc… on les désigne comme « victimes« . Ce terme reconnait la gravité des préjudices. Il indique qu’une personne a été maltraitée (et dans le cadre de violences intrafamiliales, par un membre de sa propre famille). Il met aussi en évidence l’injustice de la situation et l’importance de soutenir la personne touchée. Cela permet une communication efficace et facilite la compréhension du problème.

Cependant, il est important de noter que le choix des mots peut varier en fonction du contexte et de la perspective.

Certaines personnes peuvent préférer utiliser le terme « proie » au lieu de “victime” pour mettre en lumière la vulnérabilité de la personne concernée.

Certains soutiennent que le terme « victime » peut être stigmatisant et accroitre les difficultés à demander de l’aide. On entend souvent l’expression « faire la victime« , pour reprocher à quelqu’un de se comporter de manière exagérée en mettant en avant sa souffrance. Et si la victime se “victimise”, ce qu’elle fait par essence, elle devient donc partie du problème, voire responsable aux yeux des observateurs.

Dès lors, ses difficultés ou ses problèmes passent en arrière-plan et l’interlocuteur pense qu’il ne s’agit que d’attirer l’attention, de susciter de la compassion ou d’éviter la responsabilité de ses actions. Et il intime d’arrêter de jouer un rôle de « victime » pour « faire face aux situations de manière mature et responsable ».

Comme si c’était le problème…

Comme si c’était la solution…

Au-delà du souci sociétal, c’est un point pour les partisans de l’utilisation du terme « proie » qui estiment qu’hélas « victime » peut renforcer un statut de passivité et de faiblesse, tandis que « proie » met davantage l’accent sur la non-responsabilité de la personne.

Opter pour le mot proie pourrait alors favoriser une meilleure compréhension de la situation en renforçant le fait que cette personne a été repérée, ciblée, qu’elle n’est pas responsable des agressions subies. L’agresseur l’a choisie pour son utilité et son intérêt unilatéral, il l’a harcelée, acculée. Se rendre compte de cela aide à mieux protéger les personnes qui souffrent de ces prédateurs. Le choix des mots influe sur la réception, l’écoute des situations et sur l’accompagnement qui en découle.

Autre argument : en utilisant le terme « proie », on met davantage l’accent sur l’agresseur en soulignant son rôle actif dans le fait de cibler une personne vulnérable au sein de la famille. On déplace la responsabilité /culpabilité vers le responsable/coupable de la nature abusive de du comportement.

Le terme « proie », perçu comme plus fort, plus accusatoire que le terme « victime », contribue à la condamnation sociale des auteurs de violences intrafamiliales.

Est-ce que si la victime se voit comme une proie, si la société aussi la voit en tant que telle, alors tout le monde admettra enfin davantage l’urgence de la situation, ce qui déclencherait, (on en rêve), des mesures de protection à la hauteur du problème ?

Car ces personnes ne sont pas faibles mais affaiblies !

Le choix entre « proie » et « victime » dépend souvent de la perspective de chacun, de la culture et des objectifs de communication. Mais ce débat nourrit une réflexion plus approfondie sur les motivations de l’agresseur et les facteurs qui le poussent à commettre des violences intrafamiliales. Cela contribue à une meilleure compréhension des causes sous-jacentes de ces comportements.

En changeant de langage et donc d’angle, on peut espérer changer la perspective de tous sur les violences intrafamiliales.

Dans tous les cas, l’essentiel est de mettre en lumière les violences intrafamiliales, de les condamner et de promouvoir des mesures pour les prévenir et soutenir les personnes touchées, quels que soient les termes utilisés.


Nous vous conseillons également la lecture des articles suivants :

Quand les sciences comportementales aident à mieux repérer les victimes de violences conjugales

Violences sexuelles : des conséquences dévastatrices sur la santé des victimes

La culture du viol a une incidence sur le cerveau des victimes comme sur celui des agresseurs

Violences intrafamiliales et RÉSILIENCE des jeunes victimes

Témoignage de Tamara, maman en fuite depuis 5 ans pour protéger sa fille victime d’inceste

Témoignage de Tamara, maman en fuite depuis 5 ans pour protéger sa fille victime d'inceste

L’histoire de Tamara et de sa fille Ana est extrême, mais ressemble, hélas à bien d’autres dossiers de victimes d’inceste où la mère protectrice devient l’accusée…

Tamara a 37 ans lorsqu’elle rencontre Gérald. Elle est architecte, peintre, et mène une vie sociale épanouie. Le coup de foudre est immédiat, et pourtant l’instinct de Tamara lui indique que quelque chose ne va pas… A plusieurs reprises, elle tente de quitter Gérald, ne se sentant pas libre dans leur relation. Mais il insiste, lourdement, et trouve, à chaque fois, les mots pour la convaincre de l’importance de leur histoire…

Un an plus tard, Tamara est enceinte et les violences psychologiques se font sentir. Gérald lui explique qu’il veut que leur relation continue sans que l’enfant ne sache qu’il est le père…

Puis, vu le refus de Tamara, il la harcèle pour qu’elle aille avorter, sinon « il va devenir fou » et « se suicider »…

Tamara ne cède pas, prend des distances, et se prépare à accueillir l’enfant seule. Mais Gérald revient, s’excuse, explique que « la paternité c’est compliqué pour lui », se montrant, à nouveau sous son meilleur jour. La naissance d’Ana se passe dans un bonheur trompeur.

Alors que leur fille a 15 jours, Gérald est en proie à la 1ère d’une série de crises délirantes, où son rejet de l’enfant va littéralement exploser. Ses crises sont terrifiantes et il reconnaîtra par écrit avoir « terrorisé, montrant l’effrayant portrait d’un autre »…

Gérald séquestre Tamara et Ana, profère des centaines de menaces à leur encontre, et jette une chaise visant Ana qui aurait pu la tuer…

Le 18 mars 2014, il force Tamara à se réfugier dans la réserve d’un magasin, alors qu’il exige de se rendre chez elle pour « exploser sa tête et celle du bébé »…

Les vendeurs appellent la police, mais le traitement de la plainte est lamentable : celle-ci est classée sans suite en moins de 2 heures, alors même que Tamara et Ana sont placées en chambre d’urgence le soir-même…

Incohérence totale, dont Gérald va jouer pour retourner la situation contre la mère auprès du Juge aux Affaires familiales… En effet, en dépit des preuves, c’est elle qui est accusée, par 2 experts judiciaires, de « fantasmer » et de nuire au lien père/enfant. Comme souvent, les juges occultent les violences et parlent d’un « conflit conjugal », faute de poursuites pénales du mis en cause…

C’est de justesse que Tamara conserve la garde d’Ana. Mais, si elle évite le pire, la Justice établit qu’elle aurait « privé le père » de l’enfant alors qu’elle fuyait pour protéger leurs vies… Gérald obtient un droit de garde élargi, mais plus grave encore il obtient la mise en cause de la mère dans 2 expertises judiciaires, ce qui lui permet de perpétuer d’autres violences, impunément…

Ana victime d’inceste…

Ainsi, lorsque Ana, à 2 ans et demi, révèle avoir subi des violences sexuelles chez lui, rien ne va se dérouler normalement… Les associations sont formelles : Tamara doit confier Ana au père, faute de quoi, elle perdra tous ses droits en quelques semaines… Tamara attend donc la réaction du parquet, qui ne saurait tarder, car les dires d’Ana sont criants de vérité. L’enfant mime les faits qu’elle rapporte et revient de chez son père avec les traces sur son corps des violences dénoncées….

MAIS LA JUSTICE NE FAIT RIEN… si ce n’est permettre à nouveau à Gérald de retourner la situation contre la mère…

Et en dépit de 6 signalements judiciaires alertant le Procureur sur la crédibilité des dires d’Ana, aucune enquête sérieuse n’aura lieu…

Le procureur met plus d’un an à auditionner Gérald qui entre temps peut arguer auprès du Juge des enfants que les faits sont « irréels » puisqu’il n’a même pas été entendu ! Et c’est avec cet argument ainsi que les 2 expertises judiciaires à charge contre Tamara qu’il obtient que des investigations soient menées, visant Tamara ! Celle-ci, sur les conseils de 2 psychologues et les dires d’Ana ne laissant plus de place au doute, a cessé de la confier à Gérald. L’enfant, dès qu’elle ne séjourne plus chez son père, va mieux, retrouve son sommeil, sa joie de vivre, tandis que les maladies qu’elle faisait à répétition cessent…

Mais l’enquête du Juge des Enfants est à charge contre la mère et les associations lui conseillent alors d’enregistrer ses entretiens, ce qui va révéler de graves fautes commises par la Justice.

En effet, lorsque Ana est entendue, on lui demande 26 fois en 15 minutes si « c’est maman qui raconte ça ? », puis, alors qu’elle dénonce les faits (« papa, il me met le zizi dans la zézette. Tous les jours il fait ça, ça fait très très mal, tu sais »), c’est le contraire qui est indiqué dans le rapport.

Son « c’est la vérité ce que je dis » se transforme en « c’est maman qui raconte la vérité » !

C’est à l’appui de ce rapport truqué que Gérald obtient la garde d’Ana, le 17 mars 2018, tandis qu’en juridiction pénale, des vidéos « Mélanie » disparaissent, des prélèvements sont détruits, et le Juge d’Instruction s’abstient de toute instruction… Tamara a alors le choix entre accepter qu’Ana aille vivre chez Gérald, ou fuir avec elle… ce qu’elle fait, ne pouvant se résoudre à livrer sa fille à l’homme que l’enfant accuse de viol.

Depuis, les décisions civiles se succèdent où la culpabilité pénale de Tamara est affirmée avant même son procès… Or, la loi en France ordonne à une mère de protéger son enfant, et ôte tout caractère délictueux aux actes nécessaires à la sauvegarde d’une personne (art 122-7 du Code pénal). Pourtant, la Justice, pour l’instant, refuse de reconnaître les erreurs commises dans ce dossier, à savoir que toutes les preuves de l’inceste dénoncé ont été passées sous silence dans les ordonnances judiciaires.

Le combat de Tamara n’est pas fini, même s’il dure depuis 9 ans et lui a déjà coûté 150 000€. Depuis 5 ans, elle vit cachée avec Anna et mène de front une autre bataille : vivre et vivre bien, en dépit de la clandestinité, pour que sa fille grandisse sans violence… N’hésitez pas à la soutenir !


De nombreuses mères ont également témoigné des dysfonctionnements judicaires.