Le « Syndrome d’Aliénation Parentale » ou l’instrumentalisation du système judiciaire

Le « Syndrome d'Aliénation Parentale » ou l’instrumentalisation du système judiciaire

Par Caroline Bréhat


Romancière, psychanalyste et psychothérapeute française, Caroline Bréhat a travaillé quinze ans à l’ONU et dix ans comme journaliste à New York. Son roman autobiographique « J’ai aimé un manipulateur » (Éditions des Arènes), traduit en douze langues et son livre témoignage « Mauvais Père » (Éditions des Arènes) traitent tous deux du sujet des pervers narcissiques et des parents destructeurs. Enfin Caroline Bréhat a publié récemment ‘ Les mal aimées ‘. Elle y aborde sous un autre angle la violence familiale transgénérationnelle, nous avions rédigé un article.


Le « SAP » (Syndrome d’Aliénation Parentale) ou « AP  » (Aliénation Parentale), stratégie judiciaire employée par des pères maltraitants pour occulter les violences faites aux enfants, a le vent en poupe en France.

La lourde porte vient de se refermer derrière la jeune femme. Un claquement sourd, qui, une fois encore, lui a brisé le cœur. La rue grouille de vie sous le soleil de midi, mais elle, elle est seule au monde, glacée. Elle s’appelle Julie, et son visage, qui devait être joli, est ravagé par un torrent de larmes, figé dans une grimace atroce, un hurlement silencieux. Ne pas se retourner, ne pas se précipiter vers cette porte, vers l’interphone, ne pas supplier de pouvoir entrer à nouveau, « juste cinq minutes encore », ne pas être cette femme qu’ils imaginent, dont ils doivent parler avec condescendance, « immature », « théâtrale », « démonstrative », « intolérante à la frustration »… «manipulatrice », en fait. Il y a deux heures à peine, Julie se présentait à cette même porte, en avance, bien sûr :

– Bonjour, je suis… la maman de Lili !

Un grésillement électrique, et « clac », la porte qui s’entrouvre sur un couloir vide, où Julie s’engouffre, heureuse et terrifiée à la fois. A l’intérieur, des bruits carcéraux : des portes, des clés, des chaises qui tombent, des cris d’enfants étouffés derrière les murs. Des bâtiments jaunes ferment la cour. Derrière les hautes fenêtres, les salles monacales où se déroulent les « rencontres médiatisées » ne contiennent que des chaises et des tables en métal. Aucune décoration, pas de dessins sur les murs, pas un jouet, pas même un sapin pour Noël. Julie attend, la gorge serrée. Soudain, un bruit de course, effrénée, puis un cri : « MAMAN ! ». Une petite fille blonde d’environ 4 ans apparaît bientôt, accompagnée d’un éducateur.

La jeune femme tombe à genoux, ses bras se tendent, et elle ne sait plus si elle pleure ou si elle rit. L’enfant se jette sur elle, et les petits bras et les petites jambes se serrent si fort autour du cou et du torse maternels que c’en est douloureux. Leurs voix se mélangent : « Maman… Lili… maman… Lili… Que tu es belle… Et toi aussi »… Julie respire son enfant, la tête enfouie dans ses cheveux, pour mémoriser cette odeur qui lui a tellement manqué ces deux dernières semaines. Lili ne se décrochera de sa maman que quelques minutes pour dessiner leur « maison » à la craie sur le sol de la cour dans laquelle elle demandera à sa mère de s’asseoir et de l’enlacer, les yeux fermés. Les deux heures accordées passeront en un instant, et l’éducateur devra intervenir, comme il s’y attendait, pour arracher Lili à sa maman. La fillette hurlera de désespoir, les murs étoufferont ses cris, et Julie ressortira comme d’habitude, seule, chancelante.

Voilà bientôt deux ans que Julie ne voit Lili que 2 heures tous les 15 jours, de 10 h à midi, dans un centre de médiation familiale. Elle n’a fait l’objet d’aucune condamnation ni poursuite. Pourtant, elle est considérée par la justice comme une mère « hautement toxique » dont il faut protéger l’enfant. Son crime ? Avoir cru sa fille lorsque celle-ci lui a raconté le « secret de papa ». Une mécanique infernale s’est alors enclenchée malgré les signalements de professionnels de la santé alarmés par les jeux sexualisés de l’enfant aux autorités compétentes comme la loi les y oblige. La partie adverse a brandi le « Syndrome d’Aliénation Parentale » (SAP), et, par un incroyable retournement, c’est Julie qui a été immédiatement suspectée, car, de plus en plus, pour de nombreux intervenants judiciaires, les accusations de maltraitances sexuelles, mais aussi physiques, sont perçues comme des tactiques maternelles pour priver les pères de leurs enfants.

Aussi, en décembre 2013, Lili a, dans un premier temps, été confiée à son « père », Julie obtenant des droits de visite classiques (deux week-ends par mois et la moitié des vacances). Mais les jeux sexualisés de Lili ont alerté Hélène Romano, Docteure en psychopathologie clinique, spécialisée dans le psychotraumatisme, qui a immédiatement fait un nouveau signalement à propos d’une « petite fille d’environ 2 ans présentant via un jeu traumatique, des manifestations très spécifiques d’enfant agressée sexuellement ». Une expertise, réalisée par un praticien aujourd’hui gravement remis en cause par ses pairs, concluant que « Julie trouvait sa satisfaction dans l’utilisation de l’enfant contre le père, ce qui entre dans le cadre des syndromes d’aliénation parentale », a valu au signalement d’être classé sans suite. La pathologisation de la mère prenant soudain toute la place, les accusations de violences paternelles ont disparu du radar de la justice, et Julie est devenue en octobre 2014 la « visiteuse » de son enfant.

Le « SAP » a été inventé en 1985 par un sulfureux psychiatre américain nommé Richard Gardner dans un contexte de levée du tabou de l’inceste et de multiplication des plaintes.

Persuadé que la grande majorité des enfants qui refusaient de voir le parent non gardien, généralement le père , et qui alléguaient des violences paternelles avaient subi un « lavage de cerveau » par leur mère qui entretenait avec eux un lien pathologique, Gardner a déployé une énergie plus que suspecte à diffuser ses thèses douteuses, toutes d’ailleurs publiées à compte d’auteur et jamais soumises à la moindre évaluation par ses pairs. Malgré une levée de boucliers de la part de chercheurs sérieux, ses influentes théories ont provoqué une multitude de catastrophes judiciaires conduisant même des enfants au suicide [I]. Gardner, qui avait obtenu un titre de professeur honorifique à la faculté de médecine de Columbia, titre accordé à des cliniciens qui acceptent des étudiants à leurs consultations, n’avait pas hésité à usurper le titre de professeur de psychiatrie, même si ses revenus provenaient exclusivement de ses expertises qu’il facturait 500 dollars de l’heure à des pères accusés d’abus sur enfant [II].

De nombreux chercheurs ont conclu que la plupart des écrits de Gardner étaient fortement misogynes, axés sur la malveillance et la pathologisation des mères. Mais Gardner considérait aussi que la société avait « une attitude excessivement punitive et moralisatrice envers les pédophiles » [III], et estimait que la société devait reconnaître leur « rôle fondamental pour la survie de l’espèce humaine » [IV]. Gardner a notamment soutenu Woody Allen contre Mia Farrow dans le cadre de leur litige de garde en 1992 affirmant à Newsweek qu’ « invoquer des maltraitances sexuelles était un moyen très efficace pour se venger d’un mari détesté ». Ultime preuve de son déséquilibre, Gardner s’est suicidé en se lardant de coups de couteau en 2002. Malgré de nombreuses tentatives et un lobbying effréné, représenté en France par l’expert psychiatre auprès de la Cour de Cassation, Paul Bensussan, le « SAP/AP » vient à nouveau d’être refusé d’inclusion dans la nouvelle mouture du DSM V (Manuel diagnostique et statistique international des troubles mentaux ) et n’est PAS reconnu par l’ Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Considéré par l’avocat américain, Richard Ducote, comme « un cancer dans les tribunaux américains » , et par l’expert des violences sur mineurs, Jon Conte, comme « la pire saloperie pseudo scientifique rencontrée pendant sa carrière » , qui a ajouté « qu’élaborer des politiques sociales sur quelque chose d’aussi inconsistant était follement dangereux » , le « SAP/AP » n’en a pas moins le vent en poupe dans les prétoires Français.

En 2013, la Cour de Cassation a même approuvé le jugement de la cour d’appel de Rennes, qui avait ordonné le transfert de résidence de l’enfant chez le père en raison du « SAP »[V]. « La sensibilité des professionnels à ce concept conduit ainsi à déplacer le questionnement juridictionnel de l’auteur des violences conjugales vers la mère suspectée de nuire à la relation entre le père et l’enfant, occultant ainsi les violences et leur impact sur l’enfant. Ce déplacement de la problématique conduit aussi à culpabiliser la mère et à négliger la protection de l’enfant », affirme le magistrat Edouard Durand. D’abord utilisée uniquement pour contrer des accusations d’inceste, l’« aliénation parentale » est devenu une stratégie judiciaire à la mode, de plus en plus souvent brandie comme « diagnostic » dès lors qu’un enfant refuse de se rendre chez un parent, le rejette ou invoque des violences paternelles selon les associations de défense des droits des mères et des enfants.

Vous pouvez aussi consulter notre article sur l’invention du syndrome d’aliénation parentale.

Le « SAP/AP » suscite pourtant de vives polémiques.

Le Professeur Bernard Golse pédopsychiatre et chef du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker-Enfants Malades, considère le « SAP » comme un « pur fantasme d’une nosographie psychiatrique prétendument moderne qui ne repose sur aucune base scientifique, et ne fait que recouvrir l’agressivité et les carences des adultes sous les oripeaux d’une fallacieuse scientificité » . Le docteur Gérard Lopez, psychiatre Expert près la Cour d’Appel de Paris et Président fondateur de l’institut de Victimologie de Paris, considère le « SAP » comme un outil favorisant la non-assistance à personne en danger .

Comment expliquer qu’un concept fumeux qui brille avant tout par son manque de rigueur scientifique, promu par un psychiatre déséquilibré, connaisse un tel succès au pays de Descartes ? « Le SAP est un concept séduisant pour des spécialistes non formés ou insuffisamment formés aux conséquences du divorce sur les enfants, qui trouvent une explication simpliste à tout problème de contact entre un parent et son enfant, lequel s’explique le plus souvent par les carences parentales du parent rejeté ou la violence d’un conflit parental qui amène l’enfant émotionnellement vulnérable à prendre parti pour un parent contre l’autre », explique la présidente de l’Enfant d’abord, Jacqueline Phélip qui a étudié la question durant un an avec l’aide de chercheurs américains connus internationalement.

Car l’aliénation ou l’emprise existent bien, mais ils sont rares : «  Ils sont le fait d’individus déséquilibrés présentant des troubles psychiatriques », poursuit Phélip. Cependant le « SAP » commence à subir quelques revers de fortune dans d’autres contrées. En 2016, trois psychologues (2 américains dont Douglas Darnall, souvent cité par les pro-SAP, et 1 australien) ont été sanctionnés pour la nature « non professionnelle » de leurs expertises. L’une d’entre elles était accusée de « ne faire aucune différence entre les faits, la rumeur, l’ouï-dire et l’opinion personnelle et d’utiliser le « SAP », en postulant à tort que ce syndrome était une classification psychiatrique reconnue et fréquemment employée » [VI].

La lutte contre la violence faite aux femmes a été déclarée grande cause nationale en France en 2010, une femme meurt tous les trois jours (2,5 jours) sous les coups de son conjoint ou de son partenaire, deux enfants meurent chaque jour sous les coups de leurs parents [VII]. Selon l’Association internationale des victimes d’inceste (AIVI) et le Collectif féministe contre le viol (CFCV), il y aurait deux millions de victimes en France, un enfant par classe, des « crimes » majoritairement commis par des hommes. Pourtant, les tribunaux aux affaires familiales rechignent à faire le lien entre le fléau des violences intrafamiliales et l’utilisation manipulatoire, par les pères incriminés, du « SAP ». C’est d’ailleurs ce qu’a constaté en 2004 le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme des Nations unies, Juan Miguel Petit : « De nombreux individus occupant des positions de responsabilité dans le domaine de la protection de l’enfance, plus particulièrement dans la magistrature, refusent encore de reconnaître l’existence et l’ampleur de ce phénomène, incapables d’accepter le fait que beaucoup de ces accusations de violence sexuelle puissent être vraies »[VIII].

Malgré les affirmations d’associations telles que l’Association contre l’aliénation parentale (ACALPA), qui emploient des formules propres à frapper l’imaginaire telles que les « enfants-soldats » ou la « parentectomie »[IV], toutes les enquêtes prouvent que les fausses allégations sont marginales. La prise de conscience des ravages causés par le « SAP/AP » aux Etats-Unis est à l’origine du rapport de DV LEAP-OVW , financé par le Ministère de la justice américain, intitulé « Crises au tribunal de la famille : leçons sur des renversements de situations », qui présente la situation de 27 enfants, confiés au parent protecteur après avoir été initialement confiés à un parent maltraitant, en raison des preuves apportées par la suite des abus et violences de ce dernier. Il y est fait état d’une étude récente réalisée par les agences nationales américaines de protection de l’enfance, qui conclut que seulement 0.1% des allégations rapportées aux services de protection de l’enfance étaient considérés comme délibérément fausses . Une étude canadienne, réalisée par Trocme et Bala en 2005, conclut que le parent non gardien, en général les pères, sont plus susceptibles de faire des fausses allégations que les mères (15% versus 2%, respectivement).

Les pères seraient-ils plus enclins à mentir que les mères ? Non, bien sûr, mais les études s’accordent sur le fait que les litiges de garde comportent souvent un taux élevé de violences intrafamiliales par rapport à la population générale des divorcés, les familles non violentes résolvant généralement ces questions hors tribunal. Or selon l’Association américaine du Barreau, qui a publié un guide sur les meilleures conduites : « De nombreux agresseurs familiaux sont de grands manipulateurs, ils se présentent comme de bons parents coopératifs et dépeignent le parent victime comme une personne diminuée, vindicative ou excessivement protectrice » . C’est aussi l’avis de l’American psychological Association : « Les agresseurs intrafamiliaux projettent très habilement la faute sur leurs victimes ».

C’est face à ce type de situation, afin de dénoncer les reculs enregistrés ces dernières années en matière de protection de l’enfance, que la pédopsychiatre Eugénie Izard a créé le Réseau de Professionnels pour la Protection de l’Enfance et l’Adolescence (REPPEA) et dirigé en collaboration avec la psychologue Hélène Romano l’ouvrage « Danger en protection de l’enfance : dénis et instrumentalisations perverses ». « Depuis le procès d’Outreau, l’attention portée à la parole des enfants maltraités est retombée au niveau du XIXe siècle où les témoignages des violences subies par des enfants étaient systématiquement disqualifiés » écrit Hélène Romano. Les deux spécialistes plaident pour une « juridiction pluridisciplinaire spécialisée dans ce domaine ».

En France comme ailleurs, les promoteurs de cette théorie « antivictimaire » ont pignon sur rue. L’expert judiciaire belgo-canadien et professeur à l’Université de Montréal, Hubert Van Gijseghem, pense que « trop écouter et judiciariser la parole de l’enfant peut avoir des conséquences plus graves que l’abus lui-même ». Auditionné devant le comité de la Chambre des communes canadienne, au sujet d’un projet de loi voulant durcir les peines des prédateurs sexuels, Van Gijseghem a surpris son auditoire en soutenant que la « pédophilie » (il faut en fait parler de pédocriminalité) était une orientation sexuelle au même titre que l’hétérosexualité ou l’homosexualité [X]. Van Gijseghem intervient pourtant dans la formation de magistrats, de psychologues, de policiers, de gendarmes et de travailleurs sociaux dans différents pays.

L’autre thuriféraire du « SAP/AP » en Europe, Paul Bensussan, psychiatre et expert auprès de la Cour de Cassation, affirme lui aussi que les parents aliénants sont essentiellement les parents gardiens donc des mères. Devenu le « sachant » officiel de la remise en cause des enfants du procès d’Outreau qu’il n’a pourtant jamais expertisés , est un autre propagandiste ultrazélé du SAP, qui s’élève contre la « sacralisation » de la parole de l’enfant. Pourtant, selon la Défenseure des enfants, Claire Brisset, seulement 10 % des révélations de viols et agressions sexuelles débouchaient sur une procédure judiciaire en 2001. Bensoussan a réalisé une expertise en décembre 2013 après que la petite Marie, alors âgée de 3 ans, a manifesté des comportements sexualisés avec sa mère et à l’école envers d’autres enfants, et accusé son père d’attouchements.

Le pédopsychiatre de Marie expliquait dans son expertise que le père de Marie était une « figure anxiogène » pour l’enfant. Mais Bensussan balaie l’hypothèse des violences paternelles et préfère y voir l’ombre d’une mère pathologique : « ces accusations sont compatibles avec l’hypothèse d’un abus sexuel, mais tout aussi compatibles avec celle d’un abus fantasmé » en lien avec « les craintes de la mère nourries par de nombreux fantasmes de viols incestueux ». C’est sur la base de la « certitude maternelle inébranlable » et de « la vive réticence maternelle quant au contact père-fille » que Bensoussan, qui écrit qu’il se fonde notamment sur les paramètres définis par Van Gijseghem dans l’évaluation de la validité d’une allégation, a recommandé le transfert d’autorité et de garde de Marie à son père. La petite Marie, qui n’a donc jamais été expertisée, n’a pas vu sa mère depuis 26 mois car le centre désigné par le juge pour les visites médiatisées n’est pas habilité aux visites et les juges n’ont pas répondu à ses requêtes tendant à désigner un autre organisme.

Caroline Bréhat

Site de Caroline Bréhat : https://www.carolinebrehat.com


Notes :

[I] http://www.independent.co.uk/news/obituaries/dr-richard-a-gardner-36582.html

[II] http://www.nytimes.com/2003/06/09/nyregion/richard-gardner-72-dies-cast-doubt-on-abuse-claims.html

[III] Gardner, R.A. (1991), Sex Abuse Hysteria: Salem Witch Trials Revisited, Cresskill, NJ: Creative Therapeutics, 118.

[IV] Gardner, R.A. 1992. True and False Accusations of Child Sex Abuse, Cresskill, Creative Therapeutics.

[V] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000024952574

[VI] http://www.canberratimes.com.au/act-news/canberra-psychologist-disciplined-after-labelling-children-with-unrecognised-condition-20160603-gpaly1.html

[VII] http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/06/14/enfants-maltraites-deux-morts-par-jour_3430128_3224.

[VIII] Petit, J.M. 2004. Rights of the Child (Addendum : Mission to France, 25-29/11/2002), http:// ap. ohchr. org/ documents/ dpage_e. aspx? m= 102 (Internet, 29/12/2004).

[IX] https://affairesfamiliales.wordpress.com/tag/acalpa/

[X] http://www.lenfantdabord.org/lenfant-dabord/1202-2/

L’invention du syndrome d’aliénation parentale

L'histoire de l'invention du syndrome d'aliénation parentale

L’histoire du SAP, le syndrome d’aliénation parentale est intimement liée à son créateur, Richard Gardner

Richard Alan Gardner, psychologue américain né en 1931, est considéré comme l’inventeur du syndrome d’aliénation parentale.

Il a créé en 1987 cette théorie en s’appuyant sur ses observations personnelles de familles vivant des conflits de garde d’enfants.

Richard Gardner possède son cabinet de consultation à la Colombia University mais il gagne sa vie autrement. Il est utilisé comme expert psy par des avocats qui défendent principalement des pères accusés d’abus sexuels sur leurs enfants. Il est grassement payé à chaque victoire.

Gardner explique devant les juges que les dénonciations des enfants sont dans la majorité des mensonges fomentés par la mère.

L’enfant est manipulé par celle-ci dans le cadre du « conflit parental ». Il s’agirait d’un mécanisme d’autodéfense des mères pour pouvoir conserver la garde de leurs enfants.

Gardner publie plusieurs articles et établit alors le syndrome d’aliénation parentale (SAP), qui est décrit comme une manipulation de l’enfant qui, de manière continue, rabaisse et insulte un parent sans justification.

Les profils types de ces manipulateurs, selon Richard Gardner, sont très schématiques

Le parent aliénant cherche à se venger de l’autre parent par l’intermédiaire de l’enfant dont il « lave le cerveau ».

Quant à l’enfant, il a une absence de culpabilité face aux conséquences potentielles de ses accusations.

Gardner recommande une grande rigueur voire une certaine brutalité envers les enfants dit aliénés, moyen de les libérer de l’envoûtement qui les oppresse…

Gardner crée alors une liste de 83 critères qui lui permettent d’échelonner l’aliénation de l’enfant par le parent manipulateur (qui est presque toujours la mère selon lui). A la fin, on obtient un score final qui détermine le degré d’aliénation parentale.

Les critiques des confrères arrivent rapidement. La plus importante est celle de l’absence de démarche scientifique.

La sélection de ces critères part d’a priori de Gardner  et de ses convictions. Son échelle de mesure est donc jugée peu fiable et trop sujette à interprétation personnelle.

Le souci, c’est que Richard Gardner a des croyances effrayantes.

C’est un défenseur de la pédophilie.

Il minimise l’impact de ce type d’abus sur les victimes, banalise la pratique et cherche souvent à la justifier.

Dans son livre « True and false accusations of child sex », Gardner déclare que « la pédophilie a été considérée comme étant la norme par la vaste majorité des individus dans l’histoire du monde » et qu’il s’agit là « d’une pratique largement répandue et acceptée parmi littéralement des milliards de personne. »

«  De nombreuses sociétés ont été injustement répressives à l’égard de ceux qui ont des tendances sexuelles paraphiles et n’ont pas prêté attention aux facteurs génétiques qui peuvent les expliquer. Prendre en considération cette dimension pourrait permettre de mieux tolérer ceux qui ont des penchants sexuels atypiques. J’espère que cette théorie permettra de mieux comprendre et respecter ces individus qui par ailleurs jouent un rôle dans la survie de l’espèce. »

Gardner « True and False Accusation », note 27, 670

«  L’enfant victime d’agressions sexuelles est généralement tenu pour une victime alors que l’enfant peut parfaitement initier des rencontres sexuelles en ‘séduisant’ l’adulte. »

Gardner, R.A. (1986), « Child Custody Litigation: A Guide for Parents and Mental Health Professionals », p 93

Selon lui, les abus sexuels n’auraient pas forcément des conséquences traumatisantes pour les enfants concernés, les effets dépendraient des attitudes sociales vis-à-vis de la pédophilie. Plus on se détendrait sur le sujet, moins les enfants en souffriraient. Mais pourquoi n’y avait-on pas pensé avant !!

Malgré les fortes controverses au sein de la communauté scientifique, le syndrome d’aliénation parentale gagne du terrain

Pire, le syndrome d’aliénation parentale fait des ravages dans les affaires de pédocriminalité.

Il permet de ne pas tenir compte des paroles des enfants victimes ou de celles du parent protecteur (presque toujours la mère).

A cause du syndrome d’aliénation parentale, encore aujourd’hui, de nombreuses affaires d’inceste sont classées sans suite (malgré les dossiers médicaux…). Pire, on voit de plus en plus d’enfants retirés au parent protecteur puis confiés à l’abuseur qui devient la victime aux yeux de la Justice.

Les psychologues et les psychiatres sont témoins des dégâts majeurs provoqués par l’utilisation du SAP lors des séparations parentales.

Une ré-information est en cours.

Dans une réponse ministérielle du 12 juillet 2018, le Ministre de la Justice annonce la publication d’une note sur le site de la Direction des Affaires Civiles et du Sceau, destinée à informer les magistrats sur le caractère « controversé et non reconnu » du syndrome d’aliénation parentale.

La Catalogne vient d’inscrire dans sa loi que l’usage du syndrome d’aliénation parentale est désormais considéré comme une violence institutionnelle. Et le procureur général de la Cour de cassation à Rome a condamné l’usage de ce concept.

Mais encore beaucoup trop de magistrats utilisent le concept d’aliénation parentale pour justifier la condamnation du parent protecteur pour délit de non représentation d’enfant.

Ainsi par exemple en novembre 2019, une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) qui demandait une réforme du délit de non représentation d’enfant a été rejetée : la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que la résistance de l’enfant est due à  l’ « instrumentalisation » de l’enfant par le parent  : «chaque parent devant faciliter l’exercice des droits de l’autre parent, sans instrumentalisation de l’enfant » (Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 novembre 2019, 19-83.357) (voir à ce sujet nos articles La chambre criminelle s’intéresse-t-elle aux droits des enfants ? et Pourquoi faut-il réformer le délit de non représentation d’enfant ? )

Les institutions françaises doivent évoluer, c’est urgent !


Sources et liens utiles