La différence cruciale entre lien et contact face à un parent agresseur

La différence cruciale entre lien et contact face à un parent agresseur

Maintenir le lien ou le contact entre un enfant et son parent dangereux ?

Ces deux mots ont l’air voisin mais dans le cadre de violences intrafamiliales, ils ne signifient pas la même chose et ne portent pas aux mêmes conséquences…

  • Le lien fait référence à la connexion biologique, légale ou émotionnelle réciproque qui existe entre un enfant et ses parents ou autres membres de la famille. Ce lien est souvent perçu comme inaliénable et fondamental pour le développement de l’identité de l’enfant. Il est associé à des notions de patrimoine, d’héritage culturel et familial, et d’une continuité à travers les générations.
  • Le contact, en revanche, se réfère à l’interaction physique ou communicationnelle entre un enfant et un membre de sa famille. Il est possible de réglementer, limiter ou superviser ces interactions en fonction de ce qui est considéré comme étant dans le meilleur intérêt de l’enfant.

La distinction entre « lien » et « contact » est fondamentale lorsqu’on aborde la question de la nécessité ou non de maintenir des relations familiales en présence de violences intrafamiliales, entre des enfants victimes et des parents potentiellement dangereux. Cette différence prend une importance cruciale dans le contexte judiciaire et social, où les acteurs de la protection de l’enfance ne sont pas toujours assez formés sur ces notions.

La chercheuse canadienne Suzanne Zaccour explique :

« Les juges et les expert·es vont souvent considérer qu’il faut maintenir le lien père-enfant à tout prix, même en cas de violence familiale. Pourtant, le mythe selon lequel un enfant a absolument besoin de contacts avec ses deux parents, même en cas de violence, a été démenti par les sciences sociales, qui montrent plutôt que l’enfant a besoin d’une relation solide et sécuritaire avec la principale figure parentale.« 

Derrière le choix de maintenir un lien ou stopper le contact, se cache les gros pavés de l’autorité parentale et des droits de visite.

La société a tendance à penser que dès qu’il y a la filiation, il faut qu’il y ait absolument l’autorité parentale + le lien + la rencontre (le contact).

L’argument pour préserver le lien entre l’enfant et l’agresseur repose sur la fausse croyance que chaque parent a un rôle essentiel à jouer dans la vie de l’enfant, indépendamment de son comportement. Cette vision passéiste masque l’impact des violences subies par l’enfant, voire les renforce. Les professionnels devraient savoir que perpétuer un contact parent agresseur/enfant est très nocif, très traumatisant pour les victimes.

On le sait, on le voit, les espaces rencontres ne transforment pas un parent violent en bon parent. De même, le maintien d’un droit de visite est pour l’agresseur la preuve que finalement ce qu’il a fait n’est pas si grave, qu’il n’y a pas de danger, vu qu’il peut continuer le contact avec ses victimes…

Soutenir un parent violent dans sa parentalité au prétexte erroné qu’un enfant a besoin de ses 2 parents pour se développer, c’est faire preuve d’une grande méconnaissance de l’impact des violences faites aux enfants. Un enfant a besoin d’amour et de sécurité. Peu importe le nombre ou l’identité des personnes qui répondent à ces urgences vitales.

Et on revient alors à la différence entre le lien et le contact. Jean Louis Nouvel, pédopsychiatre, précise :

Le lien c’est psychique, le contact, c’est physique”.

Couper le contact est la seule option pour qu’un jour, peut-être, il existe à nouveau un lien en bonne santé.

Si on veut aider les victimes, il faut savoir couper le contact, pendant une période suffisamment longue. L’enfant a besoin du temps de la cicatrisation, de la prise en compte de ses traumatismes, du phénomène d’emprise. Il faut que la peur recule, que la confiance gagne du terrain. Et cela, seul l’éloignement total avec l’agresseur peut le permettre. On n’avance pas dans sa guérison en côtoyant son bourreau. Et les bourreaux ne doivent pas se servir des enfants comme médicaments.

Un jour, si l’enfant est protégé, s’il se sent assez fort, s’il en a envie, il pourra reprendre le lien avec le parent qui le maltraitait.  A son rythme.

D’ici-là, maintenir le contact ne rend service à personne. Ni à l’agresseur qui en retire un sentiment d’impunité et qui peut perpétuer les violences en accusant l’autre parent d’aliénation. Ni aux victimes qui ressortent de ces rencontres avec de la peur, un traumatisme renforcé et une perte de confiance vis-à-vis des professionnels qui ne prennent pas leur parole au sérieux.

La question finale est qui voulons nous protéger ?

Si on veut vraiment aider l’enfant à se « délier » de l’emprise psychologique de l’agresseur, cela passe par une rupture avec l’agresseur.

Les contacts doivent cesser pour préserver le bien-être psychologique de la victime.

Stopper le contact pour garantir que les enfants puissent vivre une vie sans être constamment hantés par les traumatismes passés.

Cela inclut de pouvoir dormir paisiblement, apprendre efficacement à l’école et interagir avec leurs pairs sans être submergés par les souvenirs traumatiques.

La Justice doit comprendre l’importance d’une approche centrée sur l’enfant, où les décisions concernant l’autorité parentale, le lien, le contact, sont prises en tenant compte de leur impact sur la santé mentale et physique de l’enfant, et non pas uniquement sur la préservation des structures familiales traditionnelles ou des droits parentaux.

Pourquoi on devrait s’inspirer de l’Écosse en matière de lutte contre les violences intrafamiliales

Pourquoi on devrait s’inspirer de l’Écosse en matière de lutte contre les violences intrafamiliales

Bonjour John Sturgeon. Vous êtes un maitre de conférences écossais, spécialisé sur les questions de violences intrafamiliales.

Vous connaissez aussi très bien le système français et ses dysfonctionnements. Pouvez-vous nous expliquer les méthodes d’intervention pour la protection de l’enfance en Écosse ?

Bien sûr. Déjà, pas d’angélisme, l’Écosse n’échappe pas à son lot de violences physiques, sexuelles, psychologiques. Néanmoins, depuis plus de 20 ans, nous avons privilégié plusieurs politiques de lutte efficaces, d’une manière très différente de la France.

Dès la fin des années 90, la priorité a été mise sur la prévention. L’idée était à la fois d’intervenir le plus rapidement possible pour protéger les victimes et en même temps de limiter les coûts pour la société.

Comment travaillent les autorités locales pour effectuer au mieux ces interventions ?

A l’inverse de la France, l’Écosse a pris le parti de faire travailler ensemble tous les services. Partant du principe que nul ne possède toutes les infos ou les compétences, il faut agir conjointement. La police, la Justice, les assistants sociaux, les soignants, etc. Tous travaillent dans les mêmes lieux, ils peuvent se parler des dossiers, échanger… Ils utilisent également les mêmes outils, faits pour faciliter la communication entre les services.

Effectivement, c’est différent de la France où tout est cloisonné entre les différents magistrats, où on peut condamner un médecin qui fait des signalements et où le secret professionnel est érigé en modèle.

Le secret professionnel existe en Écosse mais il est plutôt géré en circuit fermé. Si vous êtes un pro et avez besoin de savoir, vous saurez.

Nous pensons qu’il y a plus de problèmes liés au non partage des informations que l’inverse. Et beaucoup d’usagers apprécient de ne pas avoir à répéter les mêmes informations sensibles.

L’Ecosse est connue pour être un des pays où on prend le mieux en compte les traumatismes.

C’est vrai. Tous les employés des services publics sont formés aux traumas et à leurs effets. Ils savent repérer les signes, connaissent les marques d’un développement dysfonctionnel du cerveau chez un enfant ou une femme victime de violence… Cette conscience permet des interventions à la fois plus sympathiques pour les victimes mais aussi génère une aide plus adaptée aux genres, à l’âge et au contexte. Même au niveau de la loi, c’est intégré. Ainsi la Justice doit prendre en compte l’âge de l’agresseur jusqu’à ses 26 ans. Depuis 2019, les châtiments corporels sont interdits. Et actuellement, le parlement écossais étudie un projet de loi qui obligerait chaque future loi à respecter la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.

En France, hélas, le droit à l’enfant prime sur le droit de l’enfant.

Ici, le droit de l’enfant (ou son intérêt supérieur) passe avant le droit du parent. D’ailleurs, les parents n’ont pas de droits sur leurs enfants, juste des responsabilités. Ils ne doivent pas leur causer du tort et de la souffrance.

Ça fait rêver… Et sinon, concrètement, comment sont gérés les cas de violences intrafamiliales ?

Cela a pas mal changé depuis ces 20 dernières années. Au début de notre siècle, les assistants sociaux étaient formés pour identifier les dangers potentiels. C’était à eux de mettre en place la protection des enfants. Le corolaire de cela, c’est que les assistants sociaux avaient peur d’être accusés de ne pas s’être rendu compte du problème. Ils étaient donc toujours à la recherche de signes de violence. Ce n’était pas sain.

Il y a 5 ans, nous avons rééquilibré cette approche fondée sur la considération du risque pour se tourner vers le pendant, plus positif : les signes de sécurité (“Signs of Safety”). Les assistants sociaux travaillent en partenariat avec les familles et le reste des intervenants, dans des relations plus égalitaires. Tous travaillent pour identifier le problème et se tourner vers la solution : comment créer une famille sûre et saine. Cela a un gros impact sur la motivation des professionnels, la satisfaction des intervenants et surtout, cela améliore grandement la capacité d’identifier les risques et les dangers. La peur de l’erreur d’évaluation perdure, se faire confiance mutuellement (famille et services sociaux) n’est pas aisé pour tout le monde, mais les choses s’améliorent tous les jours.

C’est donc le système actuellement en place ?

Non, il est encore en train d’évoluer. Depuis 2 ans, des régions testent l’approche “Safe & Together”.

“Safe and together” signifie “En sécurité et ensemble” ? Quel est ce nouveau modèle ?

« Safe and Together » est utilisé spécifiquement dans les cas de violences intrafamiliales par la plupart des autorités écossaises. Cela a un effet transformateur sur notre pratique. Il fonctionne sur 3 principes :

  • Il n’y a pas de violence sans agresseur, donc l’attention doit porter sur cette personne, ses responsabilités ; et non pas sur le parent protecteur. En cas de signalement, la police intervient immédiatement. L’accusé sera retiré de la maison et interrogé au commissariat. Les enfants et la victime présumée seront interrogés à domicile. Dans le cadre des processus d’enquête et de suivi, un représentant de l’autorité locale (un assistant social), un employé du National Health Service (généralement une infirmière) effectueront des recherches dans leurs bases de données à la recherche d’informations.

L’enquête pénale est menée uniquement par la police, mais des dispositions sont prises pour obtenir des informations auprès d’autres organismes de l’État. Ces dispositions aident la police dans ses enquêtes et aident les organismes de l’État à s’acquitter de leurs responsabilités en matière de protection du public.

Cela facilitera l’enquête, éclairera l’évaluation des risques et guidera les stratégies de protection qui doivent être mises en place. Il s’agit là d’un très bon exemple de la façon dont nous travaillons ensemble en Écosse afin que chaque organisme d’État puisse exercer ses responsabilités légales en matière de protection des enfants et des personnes vulnérables, au motif qu’un seul organisme ne disposera pas de toutes les informations.

Tout le monde est formé au contrôle coercitif. En Écosse, on préfère cette dénomination plutôt que « emprise ». Dans le cas d’emprise – le focus est sur la capacité et réaction de la victime mais dans l’essence du contrôle coercitif, c’est la stratégie de l’agresseur qui est sous la loupe.

Et si la situation n’est pas “grave” ?

Alors l’agresseur pourra rentrer chez lui mais il saura que toutes les structures sont au courant de ses actes et qu’il est surveillé.

Les 2 autres principes du “safe and together” sont :

  • Le parent protecteur et les enfants doivent rester ensemble. C’est la personne problématique qui doit quitter le foyer. Les services sociaux s’engagent à maintenir les victimes ensembles.
  • Les services sociaux travaillent en partenariat avec le parent protecteur. Ils reconnaissent que cette personne prend en charge la sécurité de ses enfants.

Waooo…. Cela démontre combien le contrôle coercitif est un concept intégré chez vous.

L’Écosse est un des rares pays au monde à avoir des lois spécifiques contre le contrôle coercitif.

Depuis 2018, il est illégal de contrôler son partenaire en restreignant ses accès à ses amis, sa famille, ses finances, son travail, peu importe le moyen. La peine maximale prévue est de 14 ans de prison ferme.

Les services sociaux savent que la violence est genrée, ils sont formés à la recherche de ces signes. De plus, ils ont conscience que si une personne est “contrôlée” par son partenaire alors leurs enfants sont aussi victimes de cette stratégie, directement ou indirectement. C’est pourquoi, cette personne n’a pas besoin de porter plainte (ni même de le vouloir). Si elle est repérée comme subissant des violences coercitives, alors on peut porter plainte à sa place, que la personne se reconnaisse comme victime ou non, car c’est le comportement contrôlant qui est illégal.

Merci beaucoup John. Nous espérons que la France saura s’inspirer du meilleur de l’Écosse en matière de lutte contre les violences intrafamiliales.


Vous pouvez également consulter nos articles « Loi espagnole sur les violences intrafamiliales : pourquoi on devrait s’en inspirer » et « Violences sexuelles en Australie : une réalité glaçante révélée« .

Vies maternelles entravées

Vies maternelles entravées, protéger l'enfant

Merci à Philomène V. pour ce touchant et délicat témoignage : le parcours semé d’embûches d’une mère qui cherche à se protéger et à protéger son enfant.


Vous savez que la violence qui s’est insinuée dans votre couple devrait vous faire prendre la fuite. Mais il y a un bébé, qui, vous répète-t-on, « a besoin de ses deux parents ». Donc pas de départ.

La violence s’amplifie, « partez Madame, vous avez un petit, partez pour lui ! Mettez-le à l’abri », vous enjoint-on. Mais « si tu pars, tu vas voir ce que tu vas voir », vous susurre-t-on. Donc pas de sécurité.

Vous avez bravé la défense de quitter le territoire domestique, déclenchant l’ire conjugale ; vous savez qu’il vous faudrait partir sans laisser d’adresse pour vous évaporer enfin, légère et hors d’atteinte, vers la liberté. Mais ce conjoint, qui tait ses devoirs, hurle ses droits. Alors vous devez rester à sa portée. Donc pas de libération.

Vous devriez vous « protéger pour vous relever, couper les liens de cette relation maltraitante ». Mais vous avez l’obligation de tout faire pour favoriser « le dialogue coparental ». Donc pas de solution.

Vous devez être « une mère dans le compromis avec le père de l’enfant ». Mais vous devez vous montrer « une femme qui ne se laisse plus dominer par son ex-conjoint ». Donc pas de répit.

Vous suffoquez sous la chape des écrits menaçants et humiliants ; il vous faudrait suivre les préconisations du médecin et accepter les arrêts de travail. Mais pour le dossier concernant la garde de votre enfant, une mère en dépression, ce n’est pas bon. Donc pas d’arrêt.

Vous voudriez porter plainte contre le harcèlement que vous fait subir votre ex-conjoint mais sans arrêts de travail, pas de preuve suffisante de harcèlement : donc pas de plainte.

Vous êtes exsangue. Mais une mère triste, ce n’est pas bon pour les enfants, alors vous faites semblant : pas de repos.

Vous devez veiller au bien-être de votre enfant et déroger au jugement s’il est en danger physique ou psychologique avec son père. « Soyez une mère protectrice. C’est ça que fait une bonne mère ». Donc non représentation d’enfant.

Vous devez appliquer le jugement. Ne soyez pas une « mère toute-puissante ». « Une mère qui respecte les droits du père, c’est ça une bonne mère ». Donc pas de légitimité à préserver l’enfant.

Prise entre les coups réguliers du marteau de la violence psychologique et l’enclume institutionnelle, vous en venez quelques fois à souhaiter que ce marteau vous explose une bonne fois pour toutes le cerveau – fin du supplice.

Et quand vous parvenez parfois à vous endormir, vous rêvez de cette déflagration de votre chaire endolorie par toutes ces années de survie – d’asphyxie. Une déflagration qui mettrait fin à la torture des injonctions contradictoires. Vous n’auriez plus à assister, impuissante, à l’impunité de la violence qui abime votre enfant. Et, en mille morceaux, vous vous évaporeriez enfin, loin du bourreau – avec l’espoir que la moindre brisure de votre être s’en ira trouver les instants de légèreté partagés avec votre enfant, que tant d’années de tourment vous ont volés.

Mais pour protéger votre enfant, il vous faut rester. Donc vous restez, entre le marteau et l’enclume.

Philomèle V.


Vous pouvez retrouver de nombreux autres témoignages sur notre site.

Pourquoi la Justice favorise-t-elle le lien avec le père, au dépend des victimes ?

Pourquoi la Justice favorise-t-elle le lien avec le père, au dépend des victimes ?

Parmi les incompréhensions les plus fréquentes rapportées par les victimes de violences intrafamiliales, il y a celle où la Justice favorise le lien entre le père et l’enfant, même dans les cas d’inceste.

Pendant le temps des procédures, les enfants sont tenus d’aller vivre chez leur père ou de le voir dans des lieux prétendus neutres. Cela donne lieu à des scènes traumatisantes d’enfants terrorisés à l’idée d’être confrontés à leur agresseur, fut-il leur papa.

Du côté des mamans protectrices, c’est une aberration. L’image souvent invoquée est celle-ci : si un voisin était soupçonné de violences sur les enfants de la maison d’à-côté, personne ne demanderait que ces derniers continuent de le voir, au nom du maintien des bonnes relations de voisinage ou de la présomption d’innocence…

Parce qu’effectivement, quand une affaire n’est pas encore statuée, c’est souvent le principe de présomption d’innocence qui est invoqué. En France, chaque individu est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire. En conséquence, la Justice accepte de remettre un enfant à son père, pourtant accusé par sa progéniture du pire, tant qu’elle n’a pas rendu son verdict au nom du principe de la présomption d’innocence.

Or la présomption d’innocence n’est pas incompatible avec le principe de précaution : on peut vouloir protéger un enfant de son potentiel agresseur, sans pour autant que la condamnation ait eu lieu.

C’est exactement ce qui se passe pour les femmes avec l’ordonnance de protection : la femme est éloignée de son potentiel agresseur, même s’il n’a pas été condamné. Mais les enfants ?

Quand bien même ils n’auraient pas subis directement de violences mais auraient été témoins, et donc victimes, des violences faites à leur mère, dans tous les cas les enfants doivent être protégés.

Pourquoi ne pourrait-on pas appliquer une ordonnance de protection pour les enfants ?

Le Collectif pour l’enfance, qui regroupe 45 associations dont la nôtre, porte ce projet (voir proposition d’amendement législatif).

La CIIVISE également, elle préconise dans son rapport final (préconisation no 26) :

« Créer une Ordonnance de Sûreté de l’Enfant (OSE) permettant au juge aux affaires familiales de statuer en urgence sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas d’inceste parental vraisemblable. »

La Justice aime « donner une chance » au père, sur l’argument de favoriser le lien père/enfant. Pourtant, on le sait, maintenir un lien entre l’enfant et le parent toxique peut être totalement contre-productif pour l’enfant. A quel moment, un humain accusé de violences peut-il jouer un rôle positif dans la vie de la personne qu’il maltraite ?

Quand la Justice “donne une chance” à un parent violent, elle oublie que la chance lui a déjà été accordée trop souvent par la mère et que ça suffit ! Il s’agit d’un biais de genre qui favorise les pères aux dépens des mères.

Et si on essayait des critères validés par des experts formés aux violences intrafamiliales ?

  • La gravité et la fréquence de la violence sont des facteurs cruciaux. Dans les cas de violence grave, qui mettent en danger la sécurité physique ou émotionnelle de l’enfant, il est généralement peu probable qu’un parent violent puisse être jamais considéré comme un bon parent.
  • La sécurité de l’enfant est la priorité absolue. S’il y a risque, des mesures devront être prises pour protéger l’enfant, en interdisant son droit de visite.
  • La violence peut entraîner des conséquences graves sur le développement émotionnel et psychologique de l’enfant. Les professionnels de la santé mentale recommandent un éloignement total de l’agresseur pour permettre à la victime de s’apaiser et guérir doucement.
  • Pour être un bon parent, il faut avoir la capacité de prendre soin de l’enfant, de répondre à ses besoins émotionnels et physiques, en lui fournissant un environnement stable et aimant. Un parent violent en est dépourvu. Tout comme sa capacité à changer est faible. Peu de pères agresseurs sont disposés à chercher de l’aide, à suivre un traitement et à travailler sur leurs problèmes pour changer leur comportement.

En presque 2024, favoriser le lien père/enfant aux dépens des victimes n’a plus de sens. La diversité des modèles familiaux a démontré que l’important est de prioriser le bien-être de l’enfant dans TOUTES les situations. Ce dernier doit pouvoir grandir dans un environnement sûr et affectueux, et tant pis si cela implique de le séparer de son père violent. Les droits de l’agresseur ne devraient jamais être placés au-dessus de la sécurité et du bien-être de l’enfant.

Quand on perpétue des violences, est-ce qu’on est vraiment un parent ?

« C’est clair que l’agression physique est quelque chose qui abime les liens, ce qui est encore plus intolérable et scandaleux quand on est un parent, avec un devoir de responsabilité et de protection.
Et quand on violente un enfant, on casse plus que toute autre personne l’estime de lui. On lui envoie un message selon lequel il ne mérite pas le respect. Il ne mérite pas d’être préservé dans son intégrité physique. Il peut être détruit.

Et surtout, il peut être détruit par la personne qui apparemment désirait sa venue, qui avait l’air de l’accueillir et lui donner des repères.
Quand un parent blesse et frappe, il indique à son enfant que le monde entier est contre lui et ne l’accueille plus. Et il abime son estime. »

Sophie Galabru, Agrégée et docteure en philosophie
au micro de Grégory Pouy dans l’épisode 287 du Podcast Vlan

Vous trouverez l’ensemble des préconisation de la Ciivise (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants) dans notre article  » Les 82 recommandations de la CIIVISE « .

Merci à Édouard Durand pour son immense travail au sein de la Civiise

Merci à Édouard Durand pour son immense travail au sein de la Civiise

Édouard Durand : Un Engagement Inébranlable envers la Protection de l’Enfance

Vous le savez très probablement, le 11 décembre 2023, il a été annoncé que la Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants (Ciivise) serait reconduite avec des compétences élargies. Cependant, les coprésidents initiaux, Édouard Durand et Nathalie Mathieu, ont été remplacés. Les nouveaux responsables nommés sont l’ancien rugbyman et responsable associatif Sébastien Boueilh, en tant que président, et l’experte judiciaire Caroline Rey-Salmon, en tant que vice-présidente. Cette décision a été perçue comme surprenante par certains experts et par de nombreuses associations dont la nôtre, compte tenu de l’excellent travail accompli par la Ciivise sous sa première direction.

Avant toute chose, nous souhaitons rendre officiellement hommage à Édouard Durand, dont on ne comprend pas l’écartement de la Civiise tant il a incarné la figure emblématique de la protection de l’enfance dont on a tant besoin.

Magistrat dévoué, il s’est illustré en tant que juge des enfants à Marseille, juge aux affaires familiales, et formateur à l’École Nationale de la Magistrature. Sa carrière, marquée par un engagement profond pour la défense des plus vulnérables, a culminé avec son rôle de vice-président chargé des fonctions de juge des enfants au TGI de Bobigny et de membre du Conseil National de la Protection de l’Enfance.

Édouard Durand a toujours été un fervent défenseur de la parole des victimes. « Si la CIIVISE n’est plus l’espace de reconnaissance de la parole des victimes, ce n’est plus la CIIVISE« .

Il s’est battu pour que chaque voix soit entendue et chaque enfant protégé, comme en témoigne son implication puissante dans la Ciivise aux côtés de Nathalie Mathieu.

Nous reconnaissons et célébrons son apport inestimable à la cause et nous regrettons déjà sa persévérance, son intégrité et son esprit innovant.

Merci, Édouard Durand, pour votre passion sans concession et votre dévouement inébranlable à la protection des enfants.

Parallèlement, hélas, nous trouvons extrêmement symbolique le fait qu’il ait été démis de ses fonctions sans explication ni remerciement. Dix membres historiques sont actuellement en train de démissionner, comme Laurent Boyet de l’association Papillons, car “ils ne sauraient faire partie de cette mascarade”.

Nous sommes en droit de nous interroger sur la continuité de la Civiise, alors que ses membres dénoncent un “processus de silenciation” de la part de l’État. Processus qui rappelle étrangement celui des agresseurs que la commission dénonce justement.

La peur est celle d’un retour en arrière alors que les avancées mettent déjà tant de temps et d’énergie à voir le jour. Le travail sans précédent fourni par Édouard Durand et son équipe va-t-il retourner aux oubliettes ?

Sans parler des prises de positions du nouveau duo à la tête de la Civiise qui font déjà couler de l’encre car à rebours sur les préconisations de la commission.

Si le pire n’est jamais certain, il semblerait que les premiers signaux ne soient pas très encourageants.

A quand le retour d’Édouard Durand ??


Ce n’est pas une question de feuille de route, c’est d’abord une question de doctrine, une politique publique du soutien social : « je te crois, je te protège ». La nouvelle organisation ne donne aucune garantie sur cette doctrine.
Dans le communiqué de presse du gouvernement, il n’y a pas un seul mot pour les personnes qui ont confié leur témoignage à la CIIVISE. Les silences sont éloquents, les vides sont parfois à envahir tout l’espace. Pas un mot.

Edouard Durand 12 décembre 2023

Vous pouvez retrouver nos articles concernant les prises de position d’Édouard Durand et le travail de la Ciivise (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants) :

Juge Édouard Durand : violences conjugales et parentalité

Rapport CIIVISE : résumé et préconisations supplémentaires

Les 82 recommandations de la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants)

Pour en savoir plus sur les violences sexuelles faites aux enfants, nous vous recommandons la lecture de cet article, qui contient beaucoup de ressources et de liens utiles : Repérer, prévenir et agir contre les violences sexuelles faites aux enfants .

Enfin, voici un article qui permet de mieux comprendre le profil des agresseurs : Profil agresseur, dans les violences sexuelles faites aux enfants .

Témoignage de Françoise, victime d’inceste de la part de ses 3 frères dès l’âge de 10 ans…

Témoignage de Françoise, victime d’inceste de la part de ses 3 frères dès l’âge de 10 ans...

WARNING Attention contenu très sensible

Françoise est une enfant née dans les années 60, son père est boucher, sa mère nounou. Elle mène une enfance représentative de l’époque, ni malheureuse ni heureuse, avec des parents peu présents et peu chaleureux. Dernière enfant d’une famille de 5, c’est la seule fille, elle a donc 4 grands frères. Son père est le second compagnon de sa mère qui a eu un premier enfant à 17 ans, Joël, et qu’elle a délaissé en le confiant à sa propre mère pour aller travailler.

Françoise ne se souvient de rien de spécifique jusqu’à l’âge de ses 10 ans, période qu’elle associe à son premier souvenir d’inceste. Il reste néanmoins possible qu’il se soit passé des choses auparavant qu’elle aurait enfouie dans sa mémoire.

Un jour de ses 10 ans, sa mère s’affaire en cuisine en bas, ses frères sont à l’étage et Françoise s’ennuie.

Assise en haut des marches de l’escalier, elle demande à jouer avec ses grands frères, âgés de 12, 14 et 16 ans, qui sont enfermés dans la chambre. Cette chambre est aussi la sienne car elle dort habituellement dans la même pièce qu’eux dans son lit une place (seul l’ainé a une chambre pour lui tout seul).

Ses frères refusent qu’elle les rejoigne dans un premier temps puis changent d’avis 15 minutes plus tard, comme s’ils avaient réfléchi (ou manigancé ce qui suivra). Ils lui disent : « Si tu veux jouer avec nous, tu dois te laisser faire« . Françoise est toute contente et accepte bien volontiers les conditions. Ils lui demandent alors : « Allonge toi sur le lit« . Puis… ils lui enlèvent sa culotte.

Françoise est surprise mais elle a confiance dans ses frères. Elle voit le plus jeune faire le guet pour vérifier que leur mère reste en bas.

Et puis, les choses dérapent vraiment. L’ainé grimpe sur elle et la viole. Françoise ne comprend rien de ce qui se trame mais elle a mal, elle sent les va et vient dans son corps et elle demande qu’il arrête. Elle se souvient de lui avoir dit « Va-t’en« . Françoise est terrorisée. Le second de ses frères intervient, mais pas pour la sauver : « A moi maintenant” et tente à son tour de la pénétrer. Pareil pour le troisième ensuite mais ils ne savent pas vraiment y faire.

Françoise se souvient qu’ils étaient obsédés par être dedans « le trou » et qu’ils lui demandent sans cesse s’ils étaient “dedans”. Instinctivement, elle comprend qu’elle doit mentir pour se protéger et leur dit qu’ils sont bien dedans… La torture dure longtemps. Ses trois frères se relayeront 2 fois chacun jusqu’à ce que Françoise trouve le courage de dire : « J’entends maman, elle monte…« 

Elle profite de la confusion de ses frères pour remonter sa culotte et se sauver dans le salon. La fillette s’assoit sur un fauteuil, prostrée. Sa mère, qui est dans la cuisine, jette un œil et lui dit « Tu es bizarre« . Françoise ne répond rien, reste figée comme une statue. Ses frères arrivent rapidement après, le plus jeune s’approche d’elle et discrètement, la menace : « Si tu parles, on dira que tu mens et on te cassera la gueule« .

Françoise est persuadée que ses parents ne la croiront pas alors, terrifiée, elle garde tout sous silence.

Dès cet âge, elle culpabilise d’avoir participé à leurs jeux et d’avoir menti, comme si elle était responsable de ce qui lui était arrivé !

Parallèlement, Joël, le 1er enfant de sa mère, est devenu papa d’un petit Laurent. Il revient voir sa mère. L’histoire se répète, Joël et sa compagne abandonnent Laurent à sa mère.

Ils disparaissent pendant des mois. La mère de Françoise finit par aller voir la police pour abandon d’enfant et récupère la garde peu de temps après du jeune Laurent. Ce dernier dort dans la chambre de ses grands-parents durant ses premières années mais quelques mois après le viol de Françoise, ses parents décident qu’il doit déménager et dormir avec les autres enfants.

Il est prévu que Laurent dorme avec le plus jeune des frères de Françoise qui a un lit double. Mais Laurent est souvent malade, il passe des nuits compliquées qui perturbe le sommeil de son oncle. Un jour il vomit abondamment, alors le frère en profite et exige que ce soit Françoise qui dorme avec lui.

Rassemblant son courage, Françoise s’oppose fermement à cette disposition mais rien n’y fait, ses parents acceptent le changement.

Dès la première nuit, le frère tente à nouveau d’abuser d’elle. Il sait que Françoise ne veut pas dormir avec lui alors il met en place un chantage : « Si tu te laisses faire, je dis à Laurent de terminer la nuit dans mon lit et tu retournes dans le tien« . A vrai dire, dans tous les cas, Françoise n’a guère le choix… Et la violence sexuelle se remet en place… Toutes les nuits c’est la même chose. Son frère glisse son sexe entre ses cuisses pour tenter de la pénétrer. Et à chaque fois, elle lui fait croire qu’il y parvient.

Ce manège angoissant, traumatisant, va durer 3 ans. Pendant trois années, TOUTES les nuits, il vient se frotter contre elle et jouir contre son corps.

Ce qui mettra fin à cette horreur est un incident imprévu.

Françoise a 13 ans et ses premières règles arrivent. Elle file prévenir sa mère.

Celle-ci, pour une raison obscure, raconte l’événement à ses frères qui n’hésitent pas à retrouver Françoise pour se fiche de sa tête. Cela met Françoise en colère. Toute sa rage liée à son impuissance, tout ce qu’elle a subi la porte… Elle se lève face à ses frères et assène : “C’est fini, vous ne me toucherez plus ! »

Elle met son énergie à convaincre ses parents et elle récupère la chambre de son frère ainé, fraichement parti du domicile. Les violences sexuelles cessent enfin.

Aussitôt, le cerveau et sa mémoire amnésique font leur travail de protection. Françoise oublie ce qu’elle a subi les dernières années. Ses souvenirs disparaissent en surface.

Mais on sait bien que rien ne disparait réellement. Et le corps prend le relai, en dysfonctionnant, en criant sa douleur autrement.

Françoise grandit comme une cocotte-minute, toujours sous pression, régulièrement malade, apeurée. Il n’y a qu’à l’école puis au travail qu’elle s’épanouit, car elle s’y sent appréciée et reconnue pour ce qu’elle est.

A 27 ans, Françoise fait des crises d’angoisse, son sommeil est très perturbé, elle en vient à vouloir se suicider. Elle en parle à un médecin et au fil de l’eau, elle retrouve la mémoire de ce qu’elle a vécu ! Elle comprend enfin ce qui ne va pas et décide de se soigner, comme elle peut.

Elle participe à des séjours psychiatriques, pratique des séances d’EMDR, consulte des spécialistes… Des années durant, elle traine son mal-être sans trouver de solution miracle.

A la cinquantaine, elle se décide à tout raconter à sa famille, en commençant par sa mère qui lui reproche de ne pas lui en avoir parlé avant…

Elle a également une conversation avec un de ses frères des années plus tard, celui qui lui a fait subir des agressions sexuelles pendant 3 ans. Il reconnait son comportement et s’excuse, pensant ainsi être absout. Les autres diront plus tard ne pas s’en souvenir…

Alors il y a 6 mois, Françoise a décidé d’aller en justice, presque symboliquement. Elle se sent comme dépossédée de sa vie. Pour elle, ses frères ont tout eu, maison, femmes, enfants, petits-enfants. De son côté, tout a été compliqué, ses amours, sa sexualité… Françoise se sent seule.

Elle veut témoigner ici pour que sa parole aide d’autres victimes d’inceste de son âge, pour qu’elles trouvent le courage de dénoncer à leur tour les horreurs subies !

Le procureur de la république a transféré le dossier pour une enquête. On espère que la loi sur la prescription changera. Françoise demande justice !


Vous trouverez sur ce site d’autres témoignages d’anciennes victimes devenues majeures, elles témoignent courageusement de leur parcours chaotique : Ana Madet, victime d’inceste de la part de son père de ses 5 ans à ses 17 ans et Pierre, 39 ans, ancienne victime de violences sexuelles, physiques et psychologiques, assigne l’État pour fautes lourdes et déni de justice .

Un père a assassiné ses trois filles (4, 10 et 11 ans) dont il avait la garde pour le week-end, malgré une condamnation pour violences familiales

Un père a assassiné ses trois filles (4, 10 et 11 ans) dont il avait la garde pour le week-end, malgré une condamnation pour violences familiales

Ce père de 41 ans, auparavant reconnu coupable de violences conjugales, s’est rendu ce dimanche dans un poste de police à Dieppe, en Seine-Maritime. Il a confessé avoir assassiné ses trois filles chez lui, dans le Val-de-Marne, évoquant le motif de « la crainte de ne plus les voir ». Il avait échangé dans la soirée des mails conflictuels avec la mère et a pris dans la foulée la décision de les tuer.

En 2021, ce père avait été condamné à une peine de prison, incluant un sursis probatoire, pour des actes de violence envers sa conjointe et ses enfants.

Malgré une interdiction de contact avec les victimes, cette restriction avait été levée fin septembre 2022 pour faciliter l’exercice de ses droits parentaux… Il avait accompli une partie de sa peine sous surveillance électronique et avait suivi un stage de responsabilité parentale et un suivi psychologique.

Depuis, on sait que de nouvelles violences (non rapportées officiellement par la mère des enfants) avaient eu lieu, révélant un contexte familial toujours tendu. De plus, curieusement, le soir de la confession du père, le domicile de la mère a été cambriolé, un événement qui se rajoute à l’enquête (dissimulation de preuves ?).

En plus de cette funeste tragédie, ce triple infanticide soulève des questions troublantes et révélatrices de problématiques systémiques.

Premièrement, pourquoi un père, craignant de perdre le contact avec ses enfants, choisit-il de les tuer plutôt que de chercher à maintenir ou restaurer cette relation ?

Cette décision extrême pourrait indiquer un désir de contrôle absolu ou un acte de vengeance envers la mère des enfants, supérieurs au bonheur de sa parentalité et à la vie de ses trois filles.

Deuxièmement, on peut questionner la décision du père de se rendre aux autorités au lieu de se suicider, ce qui est la suite la plus fréquente observée lors de drames similaires.

Évidemment, aucune de ces attitudes n’est la bonne, la seule façon humaine de se comporter aurait été de ne pas tuer ses enfants. Mais cela semble néanmoins révéler un désintérêt pour les conséquences de ses actes. La prison ne lui fait pas peur. Ce n’est pas un frein versus l’exercice de sa domination et de sa capacité à nuire, même au-delà de la mort de ses filles.

Ces comportements et décisions, loin d’être rationnels interrogent sur la logique personnelle déviante des agresseurs et des meurtriers. C’est très difficile à comprendre et pourtant, le nombre des violences intrafamiliales qui ne cesse d’augmenter indique la fréquence de ces raisonnements.

Enfin, ce triple infanticide suscite des interrogations légitimes sur la manière dont le système judiciaire évalue la capacité parentale d’une personne ayant un passé de violence.

Pourquoi la justice actuelle estime-t-elle qu’un homme qui a été condamné pour violence est quand même un bon père ? Comme si la violence s’était évaporée…. L’idée sous-jacente est qu’une personne peut être un parent compétent malgré des antécédents de violence. Dans ce cas, la décision de justice a peut-être considéré la participation à des programmes de responsabilité parentale ou de suivi psychologique comme un changement positif de la capacité parentale ?

Mais pourquoi maintenir des liens parent-enfant, après des violences graves ? La sécurité de l’enfant ne devrait-elle pas être la priorité absolue ? Un passé de violence est toujours un indicateur d’un risque potentiel !

Il aurait certainement fallu vérifier si les fameux changements liés au suivi psy avaient eu lieu ! Car participation ne signifie pas révélation… Un travail d’évaluation des risques devrait être obligatoire. Surtout que la récidive dans les cas de violence familiale est malheureusement courante, et les programmes de réadaptation ne garantissent pas un changement de mentalité.

La preuve…

Il est crucial de s’interroger sur la manière dont les antécédents de violence sont évalués et pris en compte dans les décisions judiciaires.

La parole des victimes qui n’est déjà pas tellement prise en compte avant les jugements disparait totalement après l’exécution des peines, alors qu’elle devrait être la garante de l’effectivité du changement.


👉 https://www.tf1info.fr/justice-faits-divers/triple-infanticide-dans-le-val-de-marne-leur-pere-reconnait-avoir-tue-ses-filles-2277573.html

👉 https://www.sudouest.fr/faits-divers/val-de-marne-un-homme-se-denonce-apres-avoir-tue-ses-trois-enfants-deux-ont-ete-retrouves-morts-17604724.php

👉 https://www.leparisien.fr/val-de-marne-94/val-de-marne-le-pere-meurtrier-avait-administre-un-somnifere-a-ses-filles-avant-de-les-tuer-28-11-2023-PWOLRGQ3D5C2XHWS7OCEBCDCGI.php

👉 https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/val-de-marne/un-pere-de-famille-avoue-le-meurtre-de-ses-enfants-a-alfortville-deux-deces-ont-ete-confirmes-2879342.html


Pour comprendre les mécanismes de la violence et la stratégie des agresseurs et comment y faire face, vous pouvez lire « Profil agresseur, dans les violences sexuelles faites aux enfants« , « Comment les agresseurs continuent d’utiliser discrètement le controversé SAP« , « La coparentalité avec un pervers : 6 conseils pour vous aider à naviguer dans les eaux troubles sans faire naufrage » , et notre Manifeste.

Les 82 recommandations de la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants)

Les 82 recommandations de la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants)

La CIIVISE est une commission indépendante créée pour enquêter sur les violences sexuelles faites aux enfants en France et formuler des recommandations pour mieux protéger les enfants contre ces violences.

Le Président de la République a annoncé le 23 janvier 2021 le lancement de cette initiative pour deux ans.

La Ciivise a vu son mandat prolongé le 8 décembre 2022 jusqu’au 31 décembre 2023 et nous espérons qu’il le sera à nouveau.

Lundi dernier, elle a présenté son rapport, où elle restitue ces trois années d’engagement, livre son analyse des violences sexuelles faites aux enfants et présente 82 préconisations de politique publique selon 4 axes : le repérage des enfants victimes, le traitement judiciaire, la réparation incluant le soin, la prévention.

Update : la Ciivise a été renouvelée mais hélas avec une autre équipe à sa tête. Nous craignons que que cette version deux de la Ciivise ne soit pas du tout équivalente à la première.


AXE 1 de la Ciivise : Le repérage des enfants victimes

 1 : Organiser le repérage par le questionnement systématique des violences sexuelles auprès de tous les mineurs et auprès de tous les adultes par tous les professionnels

2 : Organiser le repérage pour les tout petits en s’appuyant sur le carnet de santé qui permet de vérifier le suivi médical

3 : Intégrer l’incestuel dans la pratique du repérage

4 : Intégrer les cyberviolences dans la pratique du repérage

5 : Intégrer le repérage des violences sexuelles dans les consultations de jeunes filles mineures pour une IVG et pour toute grossesse précoce

6 : Intégrer le repérage des violences sexuelles dans les consultations à la suite d’une tentative de suicide d’un enfant ou d’un adolescent

7 : Evaluer la mise en œuvre des 2 rendez-vous de dépistage et de prévention à l’école primaire et au collège

8 : Instaurer un entretien individuel annuel d’évaluation du bien-être de l’enfant et de dépistage des violences

9 : Veiller à l’utilisation effective du référentiel de la HAS d’évaluation du danger et du risque de danger et inclure le repérage systématique des violences sexuelles

10 : Rechercher, en cas de mort par suicide, si la personne a été victime de violences sexuelles dans l’enfance

11 : Former tous les professionnels au repérage par le questionnement systématique :

  • En garantissant une doctrine nationale par la formation avec l’outil « Mélissa et les autres » de la CIIVISE ; –
  • En mettant en œuvre le plan de formation initiale et continue des professionnels impulsé par la CIIVISE.

12 : Veiller au signalement des violences sexuelles faites aux enfants (plutôt qu’à la transmission d’une information préoccupante)

13 : Clarifier l’obligation de signalement par les médecins des enfants victimes de violences sexuelles

14 : Systématiser les retours du parquet sur les signalements émis par les administrations et les professionnels

15 : Clarifier et unifier la chaîne hiérarchique du signalement

16 : Créer une cellule de conseil et de soutien pour les professionnels destinataires de révélations de violences sexuelles de la part d’enfants

17 : Garantir l’immunité disciplinaire des médecins et de tous les professionnels

18 : Renforcer les moyens des services sociaux et des services de santé scolaires de la maternelle au lycée

19 : Veiller à prendre en charge le traumatisme vicariant des professionnels, via l’organisation d’un suivi psychologique individuel ou (et de préférence) collectif (analyse des pratiques)


AXE 2 de la Ciivise : Le traitement judiciaire

20 : Reconnaître une infraction spécifique d’inceste

21 : Créer par la loi une infraction spécifique réprimant l’incestualité

22 : Ajouter le cousin ou la cousine dans la définition des viols et agressions sexuelles qualifiés d’incestueux

23 : Elargir la définition du viol incestueux prévu à l’article 222-23-2 du code pénal et de l’agression sexuelle incestueuse prévue à l’article 222-29-3 du code pénal aux victimes devenues majeures lorsque des faits similaires ont été commis pendant leur minorité par le même agresseur

24 : Généraliser dans toutes les administrations le dispositif de prévention et de protection sur le modèle de la cellule “signal-sports”

25 : Faire appliquer, évaluer la mise en œuvre et renforcer les dispositions de l’article 6 du décret du 23 novembre 2021 afin de garantir la sécurité du parent protecteur en cas d’inceste parental

26 : Créer une Ordonnance de Sûreté de l’Enfant (OSE) permettant au juge aux affaires familiales de statuer en urgence sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas d’inceste parental vraisemblable

27 : Intégrer l’inceste et toutes les violences sexuelles faites aux enfants dans les schémas départementaux de protection de l’enfance

28 : Créer dans chaque département un service d’investigation, un service d’action éducative en milieu ouvert (AEMO) et une maison d’enfants spécialisée dans la protection et l’accueil des enfants victimes d’inceste et de toutes violences sexuelles

 29 : Garantir la protection des enfants victimes de violences sexuelles en suspendant toutes formes de visites médiatisées avec leur agresseur

30 : Envisager le domicile de la victime comme critère de compétence pour la procédure pénale

 31 : Veiller à l’information systématique des victimes en cas de dessaisissement d’une procédure par un parquet

32 : Assurer la mise en place de bureaux d’aide aux victimes dédiés aux violences sexuelles faites aux enfants

33 : Généraliser la réquisition aux fins de saisine d’une association d’aide aux victimes dès le début de l’enquête

34 : Garantir le respect des droits de l’enfant victime de violence sexuelle par l’intervention d’un administrateur ad hoc

35 : Assurer l’assistance de l’enfant par un avocat spécialisé dès le début de la procédure au titre de l’aide juridictionnelle sans examen des conditions de ressources

36 : Garantir que les enquêtes pénales soient conduites par des officiers de police judiciaire spécialisés

37 : Prioriser le traitement des enquêtes pour violences sexuelles faites aux enfants

38 : Désigner un interlocuteur référent accessible pour la victime ou ses représentants

39 : Poursuivre le développement des structures spécialisées dans l’accueil de la parole de l’enfant victime en :

  • Déployant sur l’ensemble du territoire national des unités d’accueil et d’écoute pédiatriques, à raison d’une UAPED par département conformément au second plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2020-2022 ;
  • Déployant les salles Mélanie, à raison d’une salle d’audition par compagnie dans les zones de gendarmerie ;
  • S’inspirant des dispositifs « barnahus ».

40 : Garantir que toute audition d’un enfant victime au cours de l’enquête sera réalisée conformément au protocole NICHD par un policier ou gendarme spécialement formé et habilité

41 : Vérifier la réalisation de tous les actes d’investigation

42 : Poser un principe d’interdiction des confrontations des victimes avec les agresseurs

43 : Encadrer la pratique des examens médico-légaux intrusifs

44 : Assurer la réalisation des expertises psychologiques, pédopsychiatriques et psychiatriques par des praticiens formés et spécialisés

45 : Évaluer les stocks de procédures en cours en attente de traitement

46 : Renforcer les moyens de l’OFMIN notamment contre la cyber-pédocriminalité et assurer cette compétence dans les services enquêteurs de terrain

47 : Renforcer les moyens des forces de sécurité intérieure

48 : Systématiser le visionnage par les magistrats des enregistrements audiovisuels des auditions de mineurs victimes, avec mention en procédure

49 : Interdire le traitement en temps réel (TTR) en matière de violences sexuelles faites aux enfants

50 : Abandonner la terminologie du “classement sans suite” chaque fois qu’une suite est susceptible d’intervenir ou chaque fois que cette décision n’a pas vocation à être définitive

  • Informer de la possibilité d’une suite judiciaire en réparation devant le juge civil
  • Informer d’une suite administrative, notamment disciplinaire
  • Pour les suites de l’enquête pénale elle-même, créer un avis de suspension provisoire d’enquête qui en informe la victime

51 : Améliorer la notification du classement sans suite à la victime

  • Contrôler et sanctionner le respect de l’obligation légale de notification de l’avis de classement sans suite à la victime
  • Généraliser la pratique des avis de classement sans suite personnalisés
  • Systématiser la notification verbale du classement sans suite à la victime par le procureur de la République ou toute personne désignée par lui, notamment une association d’aide aux victimes
  • Au-delà de la mention des voies et délais de recours sur l’avis de classement sans suite, continuer à informer la victime de ses droits

52 : Prévoir, dans la loi, la suspension de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi pour viol ou agression sexuelle incestueuse contre son enfant

53 : Assurer la préparation et la protection du mineur victime au procès en s’inspirant du dispositif québécois « Programme Témoin Enfant »

54 : Faire respecter à l’audience les obligations déontologiques de délicatesse et de modération des avocats de la défense

55 : Veiller à l’égalité des armes et au respect de l’interdiction des confrontations à l’audience

56 : Prévoir le retrait systématique de l’autorité parentale en cas de condamnation d’un parent pour violences sexuelles incestueuses contre son enfant

57 : Permettre à la partie civile de faire appel des décisions pénales sur l’action publique

58 : Veiller à ce que les victimes soient informées de la libération de leur agresseur

59 : Étendre la formation des magistrats sur les violences sexuelles sur mineurs à tous les magistrats spécialisés, siège compris, en cohérence avec la doctrine nationale

60 : Déclarer imprescriptibles les viols et agressions sexuelles commis contre les enfants


Axe 3 de la Ciivise : La réparation incluant le soin

61 : Garantir des soins spécialisés du psychotraumatisme aux victimes de violences sexuelles dans l’enfance en mettant en œuvre le parcours de soin modélisé par la CIIVISE

62 : Garantir la prise en charge par la solidarité nationale de l’intégralité du coût du parcours de soins spécialisés du psychotraumatisme

63 : Garantir une réparation indemnitaire prenant réellement en compte la gravité du préjudice en :

  • Reconnaissant un droit à l’expertise et en l’accordant systématiquement pour une plus juste reconnaissance des préjudices ;
  • Réparant le préjudice sous forme de provision pendant la minorité avec réévaluation du préjudice à l’âge adulte ;
  • Garantissant l’indemnisation par postes de préjudices conformément aux dispositions de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale ;
  • Elaborant un barème d’évaluation de tous les préjudices prenant en compte les effets du psychotraumatisme ;
  • Reconnaissant de façon plus juste le préjudice sexuel ;
  • Reconnaissant un préjudice intrafamilial spécifique en cas d’inceste ;
  • Reconnaissant un préjudice de peur de mort imminente ;
  • Reconnaissant un préjudice spécifique en cas de grossesse issue du viol ;
  • Reconnaissant un préjudice spécifique d’altération handicapante des fonctions cognitives, mentales ou psychiques liée aux violences sexuelles.

64 : Renforcer les droits des victimes en :

  • Garantissant la spécialisation des experts sur les conséquences des violences sexuelles subies dans l’enfance ;
  • Assurant par l’Ecole Nationale de la Magistrature la formation des experts judiciaires sur le modèle de celle créée sur les traumatismes des victimes d’attentats ;
  • Élaborant une mission d’expertise type du dommage corporel en matière de violences sexuelles dans l’enfance ;
  • Utilisant en expertise l’enregistrement de l’audition de l’enfant victime ;
  • Remboursant l’intégralité des frais du médecin conseil ;
  • Rappelant aux psychologues qu’ils peuvent remettre une attestation descriptive à leur patient, et en rappeler les règles de forme et de fond.

65 : Faciliter l’accès aux avocats spécialisés tant dans les violences sexuelles qu’en réparation du dommage corporel :

  1. En référençant les avocats spécialisés ;
  2. En améliorant la prise en charge au titre de l’aide juridictionnelle.

66 : Améliorer le traitement judiciaire de la demande en réparation du préjudice en :

  1. Complétant systématiquement, pendant l’instruction, l’expertise psychologique par une expertise en évaluation provisoire des dommages ;
  2. Formant au psychotraumatisme les magistrats qui statuent sur l’indemnisation des victimes ;
  3.  Créant des chambres spécialisées sur intérêts civils en matière de violences sexuelles ;
  4.  Créant une commission d’indemnisation dédiée aux violences sexuelles ;
  5.  Dotant les CIVI d’outils de suivi de leur activité, incluant l’identification des indemnisations des victimes dont la plainte a été classée sans suite.

67 : Assurer un soutien durable aux jeunes majeurs confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance victimes de violences sexuelles dans l’enfance

68 : Libérer les victimes d’inceste par ascendant de toute obligation à son égard (obligation alimentaire, tutelle)

69 : Inscrire dans la loi l’empêchement à reconnaissance par l’agresseur de l’enfant issu du viol


AXE 4 de la Ciivise : La prévention des violences sexuelles

70 : Généraliser le repérage des facteurs de risque par tous les professionnels, en particulier :

  • Violences conjugales
  • Grossesse.

71 : Dispenser rapidement des soins spécialisés du psychotaumatisme aux enfants victimes de violences sexuelles au titre de la prévention primaire

72 : Renforcer les dispositifs de prévention et d’écoute comme le numéro STOP des CRIAVS

73 : Renforcer les moyens des services spécialisés pour le suivi socio-judiciaire des agresseurs et garantir une prise en charge centrée sur le mode opératoire

74 : Renforcer l’efficacité du FIJAISV en :

  • Assurant l’effectivité de l’inscription au fichier ;
  • Allongeant la durée de conservation des données inscrites au FIJAISV pour les mineurs au-delà de la majorité ;
  • Permettant aux agents de police judiciaire d’avoir accès à la consultation du FIJAISV ;
  • Facilitant l’accès au FIJAISV lors des recrutements pour des activités mettant en contact avec des enfants et en permettant un contrôle régulier après le recrutement ;
  • Ajoutant l’état de récidive légale sur le FIJAISV ;
  • Créant la possibilité d’effectuer des recherches par zone géographique, afin de faciliter l’identification de suspects pendant les enquêtes.

75 : Interdire systématiquement l’exercice de toute activité susceptible de mettre une personne condamnée pour violences sexuelles en contact avec des enfants

76 : Renforcer le contrôle des antécédents lors du recrutement puis à intervalles réguliers

77 : Organiser le contrôle des établissements accueillant des enfants (de manière préventive, et en lien avec les remontées d’information relatives aux signalements, et les retours d’expérience/plans d’action qui y feront suite)

78 : Former les professionnels au respect de l’intimité corporelle de l’enfant

79 : Assurer l’organisation sur l’ensemble du territoire d’espaces d’écoute et d’échange accessibles à tous (Handigynéco)

80 : Assurer la mise en œuvre effective à l’école des séances d’éducation à la vie sexuelle et affective et garantir un contenu d’information adapté au développement des enfants selon les stades d’âge

81 : Organiser une grande campagne nationale de sensibilisation annuelle

82 : Assurer la continuité de la CIIVISE


Au sujet de la CIIVISE, nous vous conseillons de lire également Rapport CIIVISE du 31 mars 2022 : résumé et préconisations supplémentaires .

La Justice face aux violences intra-familiales

La Justice face aux violences intra-familiales

L’expertise à la française…

Les victimes nous confient régulièrement les phrases qui les ont le plus choquées durant leur procédure, elles sont nombreuses hélas, et témoignent souvent de méconnaissance des psychotraumatismes subis.

En voici quelques unes parmi tant d’autres.

C’est un Psy qui l’a dit…

 » Ben vous êtes avec un homme colérique, et quand il vous dit de vous taire, vous insistez, et ça vous étonne qu’il vous ait étranglée ? « 

C’est une Assistante sociale ASE* qui l’a dit…

 » Ce qui est dangereux, c’est que vous aimez trop votre fille, il va falloir casser un peu ce lien. « 

*ASE :  Aide sociale à l’enfance

C’est la psychologue de l’ASE* qui l’a dit…

“ Il faut comprendre qu’un enfant a aussi une sexualité. Vous savez, Monsieur a une masculinité très affirmée et votre fille peut fantasmer les actes sexuels avec son père, ce qui explique les irritations vulvaires. ”

*ASE :  Aide sociale à l’enfance

C’est une enquêtrice de la brigade des mineurs qui l’a dit… (à un jeune adulte victime d’inceste dans son enfance)

“Vous êtes vieux, vous habitez loin de vos parents, vous ne souffrez plus, donc ne relancez pas ! Cela n’est pas prioritaire, on a des urgences. ”

C’est un responsable d’association mandaté par l’ASE* qui l’a dit…

“ Mais Madame, même si Monsieur commet de l’inceste sur votre fille, il restera toujours son père et il faudra toujours qu’il s’occupe d’elle. ”

*ASE :  Aide sociale à l’enfance

C’est un agent de l’AVVEJ* qui l’a dit…

“ Dans la mesure où vos enfants dénoncent des violences, nous allons organiser une confrontation avec le père. ”

*Association Vers la Vie pour l’Éducation des Jeunes

C’est un agent de l’AVVEJ* qui l’a dit…

“ Madame, si vous continuez à alimenter le conflit en dénonçant les violences, nous n’aurons pas d’autre choix que de protéger les enfants en les plaçant. ”

*Association Vers la Vie pour l’Éducation des Jeunes

C’est un agent de l’EPDEF* qui l’a dit…

“ Quand tu offres un dessin à ton père en le représentant avec une tête de mort, tu le rends triste. ”

*Etablissement Public Départemental de l’Enfance et de la Famille

C’est une enquêtrice de la brigade des mineurs qui l’a dit…

“ Monsieur vous a agressée ? Surtout ne portez pas plainte ! C’est pour vous que je dis ça, dans votre intérêt, c’est déjà compliqué comme affaire, si vous portez plainte encore, vous allez alourdir le dossier à votre encontre ! ”


Pour en savoir plus sur les dysfonctionnements de la Justice en matière de violences intrafamiliales nous vous conseillons la lecture de notre Manifeste.

Le Rôle Crucial des Tiers de Confiance dans la Protection des Enfants Victimes de Violences Intrafamiliales

Le Rôle Crucial des Tiers de Confiance dans la Protection des Enfants Victimes de Violences Intrafamiliales

« Je viens de parcourir votre site et je peux vous dire à quel point c’est aussi compliqué pour les personnes tiers de confiance face aux services sociaux, toujours prêts à essayer de sauver l’insauvable, c’est-à-dire le parent maltraitant, au détriment des enfants.

La parole de l’enfant n’est pas entendue et on ne tient pas compte des observations des tiers dignes de confiance. On menace même ces derniers de placer les enfants s’ils disent quoi que ce soit. L’enfant est constamment obligé de faire face à son bourreau lors des visites médiatisées. Comment peut-il évoluer sereinement en faisant confiance aux adultes (qui lui répètent que le parent maltraitant est gentil et que ce que l’enfant dit, c’est du mensonge) ? »

Notre association reçoit beaucoup de témoignages bouleversants comme celui-ci, provenant de personnes confrontées à leur incapacité d’aider leurs proches victimes de violences intrafamiliales.

Nous profitons de la publication du décret n° 2023-826 du 28 août 2023 relatif aux modalités d’accompagnement du tiers digne de confiance pour partager notre vision des choses.

Dans ce paysage complexe de violences psychologiques, physiques, sexuelles, financières etc, les tiers de confiance émergent comme des figures cruciales dans la protection des enfants. Leur rôle qui devrait être essentiel et déterminant est souvent confronté aux mêmes dysfonctionnements de la Justice.

Et ils souffrent de ne pas être pris en compte par le système. Leurs responsabilités, leurs attentes, et la manière dont ils peuvent soutenir les enfants victimes de violences ne sont pas respectées.

Pour eux aussi, la confiance en la Justice est trahie.

Pourtant, les tiers de confiance devraient émerger comme des acteurs clés dans la protection des enfants.

Ces amis, membres de la famille élargie, enseignants, voisins, professionnels de la santé, etc., ont une relation privilégiée avec ces enfants et les familles, ils ont une connaissance éclairée de leurs souffrances. De part leur proximité, ils ont la confiance, la disponibilité, l’écoute active et le respect de leurs interlocuteurs. Ils sont un réceptacle important de confidences car ils croient la parole des victimes.

Cette proximité émotionnelle et leur accès à l’histoire des victimes devraient être exploitées par la Justice. Leurs observations devraient être rangées dans la catégorie des preuves en fournissant des détails précis.

Tous les tiers de confiance doivent faire face aux attentes formulées ou non des victimes : détecter les signes de maltraitance, fournir un espace sûr pour les enfants, agir comme des observateurs attentifs, etc. Mais on sait aussi qu’ils peuvent être malmenés : pression de la part des parents maltraitants, craintes pour leur propre sécurité, dilemmes moraux.

La Justice devrait apporter un accueil encourageant et un soutien sans faille aux tiers qui s’engagent pour protéger les victimes.

  • Créer un environnement accueillant : offrir aux tiers de confiance un espace où ils se sentent écoutés et compris.
  • Formation et soutien continu : renforcer leurs compétences pour reconnaître et agir face à la maltraitance.

Les tiers de confiance ne sont pas tous des professionnels formés à la protection de l’enfance. Ils ont besoin d’aide et de collaboration bienveillante avec des intervenants compétents. C’est ce travail en équipe qui a une chance de garantir la sécurité et le bien-être de tous (victimes et proches).

Si on trouve cet équilibre entre le soutien crucial aux enfants que les tiers peuvent apporter, leur coopération avec les services sociaux pour maintenir la confiance tout en partageant les informations nécessaires, alors on les aidera à naviguer dans le contexte complexe des violences intrafamiliales.

Le double objectif de soutenir les enfants sans compromettre leur propre sécurité sera respecté et la Justice pourra faire son travail au mieux.

Les tiers de confiance jouent un rôle essentiel dans la vie des enfants victimes de violences intrafamiliales. Leur engagement envers la protection et le bien-être de ces enfants est une force vitale pour un avenir meilleur.

En reconnaissant leur rôle complexe, en les soutenant avec bienveillance et en renforçant leur capacité à agir, nous pouvons contribuer à créer un environnement où les victimes de tout âge se sentent en sécurité, entendues et soutenues dans leur chemin vers la paix et la guérison.


Nous vous conseillons également la lecture de l’article « Les protecteurs experts… Ou comment la Justice force les victimes à devenir expertes dans les domaines liés à leur protection / survie« .