Documentaire « Bouche cousue » le 18 novembre 2020 sur France 2

documentaire Bouche cousue sur la protection des droits de l'enfant à 22h30 sur les violences faites aux enfants et les violences familiales.
documentaire Bouche cousue sur la protection des droits de l'enfant à 22h30 sur les violences faites aux enfants et les violences familiales.

Documentaire Bouche cousue sur la protection des droits de l’enfant

Nous vous conseillons vivement de regarder mercredi 18 novembre sur France 2 le documentaire Bouche cousue sur la protection des droits de l’enfant à 22h30 sur les violences faites aux enfants et les violences familiales.

Karine Dusfour a filmé les audiences du juge des enfants Edouard Durand au Tribunal de Bobigny. Il y aura également un témoignage de Thierry Beccaro qui parlera de son passé d’enfant battu.

Ce documentaire produit par Melissa Theuriau interroge sur le maintien à tout prix du lien familial, même lorsque le parent est violent ou maltraitant. Et cette interrogation explique pourquoi nous souhaitons réformer le délit de non représentation d’enfant.


Ce documentaire sera précédé du téléfilm La maladroite, au sujet de la Marina Sabatier tuée à l’âge de 8 ans par ses parents, en 2009: l’état français a été condamné par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) parce qu’il n’a pas pris de mesures suffisantes afin de protéger la petite Marina.

documentaire Bouche cousue sur la protection des droits de l'enfant à 22h30 sur les violences faites aux enfants et les violences familiales.

Soirée spéciale protection droits de l’enfant

Il s’agit d’une soirée spéciale sur la protection des droits de l’enfant dans le cadre de la Journée de l’abolition des abus sexuels contre les enfants mercredi 18 novembre et le 31ème anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant vendredi 20 novembre.

Cette Convention contient quatre principes importants : l’intérêt supérieur de l’enfant, le droit de vivre et de se développer, le droit à la non discrimination et enfin le droit au respect des opinions de l’enfant.

Les différents chapitres des 54 articles énoncés sont :

  • le droit d’avoir un nom, une nationalité, une identité
  • le droit d’être soigné, protégé des maladies, d’avoir une alimentation suffisante et équilibrée
  • le droit d’aller à l’école
  • le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation
  • le droit d’être protégé contre toutes les formes de discrimination
  • le droit de ne pas faire la guerre, ni la subir
  • le droit d’avoir un refuge, d’être secouru, et d’avoir des conditions de vie décentes
  • le droit de jouer et d’avoir des loisirs
  • le droit à la liberté d’information, d’expression et de participation
  • le droit d’avoir une famille, d’être entouré et aimé

Vous trouverez le texte complet de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) sur le site de l’Unicef.

Selon le dernier rapport de l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), en 2018, 122 mineurs victimes d’infanticides ont été enregistrés par les forces de sécurité, l’auteur pouvant être un membre de la famille ou une personne extérieure à la famille; parmi ces mineurs, 80 sont décédés dans le cadre intrafamilial.

L’ONU dénonce la silenciation des victimes en France

ONU

Le silence et l’inaction de la justice française face à la protection des enfants a été dénoncé par deux rapports de l’ONU en 2003.. mais rien n’a changé depuis… hélas…

L’ONU y dénonce la suspicion des tribunaux et estime que l’on assiste en France à une silenciation des victimes.

ONU

M. Juan Miguel Petit, Rapporteur spécial de l’ONU sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants se rend à Paris et produit deux rapports:

Le rapporteur spécial du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme y dénonce les dysfonctionnements de la justice française, notamment la parole de l’enfant niée et la sous-estimation des réseaux pédophiles.

Il dénonce le fait qu’un enfant peut être contraint de rester avec le parent mis en examen pour l’avoir maltraité.

Juan Miguel Petit demande que soit respecté l’article 12 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant qui énonce que l’enfant doit pouvoir faire valoir son avis, en particulier dans toute procédure administrative ou judiciaire le concernant.

Enfin les personnes qui suspectent et signalent des maltraitances ne sont ni crues ni protégées. 

Voici des extraits de ces rapports de l’ONU, nous pourrions les réécrire mots pour mots encore aujourd’hui, en 2020… hélas..

ONU

1er rapport ONU

Rapport préliminaire E/CN.4/2003/79/Add.2, du 27 janvier 2003

  1. Le Rapporteur spécial ONU ne considère pas que les sévices sexuels contre des enfants constituent un phénomène plus courant en France que dans d’autres pays européens. On constate toutefois que de nombreuses personnes ayant une responsabilité dans la protection des droits de l’enfant, en particulier dans le système judiciaire, continuent de nier l’existence et l’ampleur de ce phénomène.
  2. Les personnes qui soupçonnent et signalent des cas de sévices à enfant peuvent se voir accuser de mentir ou de manipuler les enfants concernés et risquent des poursuites ou des sanctions administratives pour diffamation si leurs allégations n’aboutissent pas à des poursuites suivies de la condamnation de l’auteur présumé des sévices.
  3. Dans un nombre croissant de cas, un parent séparé, habituellement la mère, choisit d’amener l’enfant ou les enfants à l’étranger plutôt que de se conformer aux décisions d’un tribunal accordant des droits de visite ou attribuant la garde à l’auteur présumé des sévices, ce qui, à son tour, pourrait exposer l’enfant à de nouveaux sévices sexuels. Il est même arrivé que des juges et des avocats au courant des faiblesses du système judiciaire conseillent, officieusement, à certains parents d’agir de la sorte. Ces parents se trouvent donc sous la menace de poursuites criminelles pour leurs actes aussi bien en France que dans le pays où ils se rendent.
  4. Le manque de ressources, de formation et de spécialisation dont souffrent les juges et les avocats s’occupant d’affaires de sévices sexuels contre des enfants fait que les droits de l’enfant impliqué dans des poursuites judiciaires ne sont parfois pas suffisamment protégés. Il s’ensuit que les enfants concernés risquent souvent de continuer à subir des sévices.
  5. Il est certes possible que de fausses allégations de sévices sexuels contre des enfants aient été faites dans le cadre de procédures visant à attribuer la garde de l’enfant. Toutefois, le Rapporteur spécial, après avoir examiné les preuves concernant les affaires portées à son attention, a pu conclure que ces allégations étaient sérieuses et fondées et que la suite qui leur avait été donnée ne correspondait pas à l’intérêt supérieur de l’enfant.
  6. Dans les affaires civiles visant à attribuer la garde de l’enfant, celui-ci ne bénéficie pas d’un droit automatique d’être entendu. Bien que les tribunaux civils puissent entendre l’enfant à la discrétion du président du tribunal, l’enfant n’est quasiment jamais entendu.
  7. Lorsque des poursuites pénales sont engagées contre les auteurs présumés de sévices, les tribunaux civils ne sont pas supposés prendre de décisions quant à la garde ou aux droits de visite jusqu’à ce que la procédure pénale soit menée à son terme. Dans la pratique, toutefois, cette disposition n’est pas respectée, ce qui donne lieu à une situation où l’enfant est obligé de rester, souvent sans surveillance, avec une personne faisant l’objet d’une enquête pénale pour des sévices infligés à ce même enfant.
  8. Étant donné le nombre de cas laissant apparaître un grave déni de justice pour les enfants victimes de sévices sexuels et les personnes qui tentent de les protéger, il serait bon qu’un organe indépendant, de préférence la Commission nationale consultative des droits de l’homme, mène de toute urgence une enquête sur la situation actuelle.
  9. Les services de la Défenseure des enfants devraient être dotés de moyens humains et matériels suffisants, qui leur permettront de recevoir des plaintes et de mener des enquêtes lorsqu’il y a des signes d’un déni de justice concernant les droits de l’enfant.
  10. Le système judiciaire devrait se voir allouer des ressources suffisantes pour être en mesure de dispenser une formation en matière de droits de l’enfant et de suivre convenablement les affaires s’y rapportant.
  11. Lorsque des poursuites pénales sont engagées contre les auteurs présumés de sévices, les tribunaux civils ne doivent pas statuer sur la garde ou les droits de visite tant que la procédure pénale n’a pas été menée à son terme. Dans l’intervalle, l’auteur présumé des sévices ne devrait avoir accès à l’enfant que sous une supervision constante.
ONU

2ème rapport ONU

Rapport final E/CN.4/2004/9/Add.1 , du 14 octobre 2003

  1. Dans sa lettre du 6 mai 2003 et dans les 13 nouveaux cas soumis à cette date, le Rapporteur spécial ONU a évoqué les énormes difficultés auxquelles sont confrontées les personnes, en particulier les mères, qui portent plainte contre ceux qu’elles soupçonnent d’abuser de leurs enfants sachant qu’elles s’exposent à des mesures éventuelles pour accusations fallacieuses, mesures qui, dans certains cas, peuvent conduire à la perte de la garde de leur(s) enfant(s). Certaines de ces mères utilisent les voies de recours légales jusqu’à ce qu’elles n’aient plus les moyens de payer les frais d’assistance juridique; il leur reste alors seulement le choix entre continuer de remettre l’enfant à celui qui, selon elles, abuse d’elle ou de lui, ou de chercher refuge avec l’enfant à l’étranger.
    Il semblerait même que certains juges et avocats, conscients des faiblesses du système judiciaire, ont conseillé officieusement à certains parents d’agir de la sorte. Ces parents s’exposent à des poursuites pénales pour de tels actes en France et, souvent, dans le pays où elles se rendent.
  2. Il a été signalé au Rapporteur spécial que la crédibilité des allégations faites par les mères concernant les abus sexuels commis contre leurs enfants était contestable du fait qu’elles étaient invariablement émises au cours de procédures de divorce. Cela laisse entendre que de telles allégations seraient un moyen d’obtenir que la garde de l’enfant soit confiée à la mère.
    Le Rapporteur spécial est conscient de cette possibilité et a été informé que, dans certains cas, des avocats auraient conseillé à leurs clients de faire de telles fausses allégations. Toutefois, dans au moins plusieurs cas qui ont été présentés au Rapporteur spécial, un examen particulièrement approfondi de certaines des raisons pour lesquelles les parents divorçaient a révélé l’existence d’abus systématiques au sein de la famille, y compris des violences contre la mère. En conséquence, peut-être serait-il plus exact d’envisager la question des abus sexuels sur l’enfant comme étant l’une des raisons, sinon la principale raison du divorce. Il importe également de noter que dans certains cas portés à l’attention du Rapporteur spécial, des accords concernant la garde avaient déjà été conclus d’un commun accord et qu’aucune des parties n’avait un motif apparent de porter de fausses accusations contre l’autre.
  3. Le Rapporteur spécial de l’ONU recommande d’appliquer «le principe de précaution» pour toutes les procédures judiciaires dans le cadre desquelles sont formulées des allégations d’abus sexuels sur enfant, la charge de la preuve devant reposer sur la partie qui entend démontrer que l’enfant n’est pas exposé à un risque d’abus. Le droit de visite de l’auteur présumé d’abus devrait s’exercer sous supervision jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la véracité des allégations et lorsqu’un enfant a clairement exprimé le souhait, en présence de professionnels des droits de l’enfant compétents et qualifiés, de ne pas passer de temps avec l’auteur présumé d’abus, ce souhait devrait être respecté.
ONU

Rappelons que l’intérêt de l’enfant est censé être protégé en France par la Convention relative droits de l’enfant, ratifiée par la France, par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (art.8), et par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (al.10).

Alors… Pourquoi la justice française n’applique-t-elle pas les recommandations de l’ONU ?

Et la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) ? Et la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) ? Et la Convention d’Istanbul ? Et les recommandations du GREVIO issues du Conseil de l’Europe ? Et les recommandations issues du Haut Conseil à l’Egalité, organisme qui dépend du gouvernement français ?

Combien de temps encore ? Il est urgent de réformer le délit de non représentation d’enfant.

Pourquoi faut-il réformer le délit de non représentation d’enfant ?

Pourquoi faut-il réformer délit de non représentation d'enfant ?

Si vous souhaitez avoir des précisions au préalable sur la définition exacte du délit de non représentation d’enfant nous vous conseillons la lecture de cet article: « Le délit de non représentation d’enfant: qu’est-ce-que c’est ? ».

Cet article est basé sur l’article de Philippe Losappio, avocat au barreau de Paris, sur le site Village Justice, dont nous vous recommandons vivement la lecture pour une vision juridique complète et documentée: « Le délit de non représentation d’enfant porte atteinte à l’intérêt de l’enfant.« 

Le délit de non représentation d’enfant ne devrait pas s’appliquer dans deux cas précis

  1. Lorsqu’un parent craint un danger plausible pour l’enfant – maltraitance, attouchements , viols – il faudrait dans ce cas et dans l’intérêt de l’enfant appliquer le principe de précaution et la protection de l’enfant;
  2. Lorsque l’ado refuse de se rendre chez le parent qui a un droit de visite et d’hébergement. Que peut faire la mère ? dans ce cas pour ne pas être condamnée il faudrait que la mère violente l’enfant ou exerce sur lui des pressions psychologiques pour aller chez le père ? Faut-il que la mère commette un délit (violences sur l’enfant) pour en éviter un autre (non représentation d’enfant) ?

Pourquoi le délit de non représentation d’enfant ne devrait-il pas s’appliquer dans ces deux cas?

1. Il n’est pas dans l’intérêt de l’enfant de rencontrer un parent toxique ou violent.

Pourquoi réformer le délit de non représentation d'enfant?
  • Craindre un danger plausible pour l’enfant n’est pas refuser indument de représenter l’enfant ;
  • et respecter les peurs, les craintes et la vie privée de l’enfant – de l’adolescent(e) résistant(e) n’est pas refuser indument de représenter l’enfant.

2. On exige du parent protecteur de prendre le risque qu’un délit soit commis (violence sur l’enfant) pour en éviter un autre (non représentation d’enfant)

Il est insensé de se retrouver avec un casier judiciaire pour avoir voulu protéger l’enfant ou parce que l’adolescent(e) ne veut pas rencontrer son parent. Il est intolérable que la justice force un parent à contraindre psychologiquement ou physiquement son enfant. La jurisprudence exige ainsi du parent d’un enfant résistant d’aller jusqu’à user de contraintes psychologiques – voire physiques – sur l’enfant résistant, c’est-à-dire prendre le risque de commettre un délit – violence sur l’enfant- pour en éviter un autre- non représentation d’enfant.

3. Actuellement les droits de l’enfant (le droit d’être protégé) passent après les droits des parents (le droit de voir son enfant)

Droits de l'enfant

On a du mal à dissocier l’autorité parentale des besoins fondamentaux des enfants et de la nécessité de protéger le développement de l’enfant. L’exercice des droits de visite après la séparation devient pour le violent conjugal le moyen de perpétuer la violence et l’emprise sur son ex-femme et sur les enfants. Pourtant les violences conjugales sont une transgression majeure de l’autorité parentale : un mari violent est un père dangereux.

« Il faut être davantage dans une culture de la protection. Tant que l’on n’a pas traité de façon adaptée la parentalité, on ne peut protéger ni les femmes victimes de violences conjugales ni les enfants. »

Edouard Durand, Juge des enfants au tribunal de Bobigny

De plus aujourd’hui, quand il est difficile voire impossible de prouver la maltraitance, on est dans un principe de précaution inversé : actuellement le principe de précaution profite au parent soupçonné d’agression ( dans le doute il garde ses droits de visite) au lieu de profiter à l’enfant ( dans le doute il ne voit pas le père). Le principe de précaution profite au parent alors qu’il devrait profiter au plus faible, l’enfant.


4. Lorsque la mère souhaite légitimement protéger son enfant, elle peut être soupçonnée d’aliénation parentale…

…et condamnée pour non représentation d’enfant… or justement l’aliénation parentale peut être instrumentalisée par le parent violent.

Le syndrome d’aliénation parentale (SAP) n’a pas de fondement scientifique. Le 16 février 2020 L’Organisation Mondiale de la Santé a supprimé l’aliénation parentale de l’index de sa classification. Et non seulement le syndrome d’aliénation parentale ne repose sur aucun fondement scientifique mais il permet par une inversion accusatoire habile de condamner… le parent protecteur.

En substance donc le parent protecteur est présumé instrumentaliser l’enfant ou l’adolescent(e) résistant(e), et donc présumé toxique pour l’enfant lorsqu’il refuse de voir son parent.

La mère veut protéger l'enfant

On retrouve dans la jurisprudence les thèses sexistes de la mère menteuse, manipulatrice qui aliène l’enfant – mauvaise femme, mauvaise épouse, mauvaise mère. Le SAP est une arme qui conduit à maintenir et à prolonger l’emprise sur des mères qui cherchent légitimement à protéger leurs enfants; alors qu’au contraire il faudrait protéger ces mères… pour protéger leurs enfants.

Il faudrait cesser l’usage abusif et inapproprié du syndrome d’aliénation parentale.

Un exemple : la décision de la Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 novembre 2019, 19-83.357

La chambre criminelle de la Cour de cassation considère que la résistance de l’enfant, de l’adolescent (e) est présumée trouver sa cause dans l’aliénation de l’enfant par le parent qui est en charge de le représenter : «chaque parent devant faciliter l’exercice des droits de l’autre parent, sans instrumentalisation de l’enfant »

En fait la cour de cassation adopte le doute au bénéficie du père, elle suppose par principe que ce que dit l’enfant est faux, elle suppose par principe que l’enfant est sous aliénation parentale de la part de la mère. La jurisprudence va dans ce sens: lorsque les enfants ne veulent pas aller chez le père (ou lorsque la mère ne veut pas qu’il y aille parce qu’elle soupçonne une maltraitance) sont des aliénations parentales de la part de la mère.

Mais il y a un angle mort dans ce raisonnement: quid de tous les enfants qui sont réellement maltraités ou dont le père se comporte réellement mal? Tous ces cas-là sont balayés d’un revers de la main : ces enfants sont dans l’angle mort de la justice.


5. Le délit de non représentation d’enfant n’est pas compatible avec les recommandations de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH)

Cour européenne des droits de l'homme (CEDH)

Selon la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) , la décision de justice organisant le droit de visite et d’hébergement donne une appréciation de l’intérêt de l’enfant qui n’est plus d’actualité au moment des faits incriminés ; alors que l’intérêt actuel de l’enfant doit être qualifié par le juge pénal au moment des faits poursuivis.

Pourquoi la justice française ne s’inspire-t-elle pas de la jurisprudence de la CEDH ?

Un exemple : la décision de la CEDH du 3 octobre 2013

« La Cour estime que concernant les enfants très jeunes il est essentiel que les tribunaux évaluent avec objectivité si le contact avec le parent devrait être encouragé ou maintenu ou non. Cependant, au fur et à mesure que les enfants gagnent en maturité et deviennent le temps passant capables de formuler leur propre opinion quant au contact avec les parents, il convient que les tribunaux accordent tout le crédit nécessaire à leur avis et leurs sentiments ainsi qu’à leur droit au respect de leur vie privée. »

Gobec v. Slovenia, 3 octobre 2013 7233/04 not. 133 (traduction)

Voici la version originale en anglais:

 » While in respect of very young children it is essentially for the authorities to assess whether contact with the parent should be encouraged and maintained or not, as children mature and become, with the passage of time, able to formulate their own opinion on their contact with the parents, the courts should also give due weight to their views and feelings and to their right to respect for their private life. « 

Gobec v. Slovenia, 3 octobre 2013 7233/04 not. 133

Et il y a eu d’autres décisions du même type:

6. Le délit de non représentation d’enfant n’est pas compatible avec la Convention d’Istanbul

Qu’est ce que la Convention d’Istanbul ?

Convention d'Istanbul

La Convention d’Istanbul est issue du Conseil de l’Europe et porte sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.
La France a ratifié la Convention d’Istanbul qui a été adoptée le 11 mai 2011 et est entrée en vigueur 1er août 2014.

Que dit la Convention d’Istanbul à propos des enfants ?

« La violence à l’égard des femmes et la violence domestique, sous leurs formes directes ou indirectes, peuvent avoir des conséquences dangereuses pour leur santé et leur vie. »

« Dans le cas de la violence domestique, il est reconnu que les enfants n’ont pas besoin d’être directement touchés pour être considérés comme des victimes car le fait d’être témoin de violences est tout aussi traumatisant.
La Convention demande aux Etats de veiller à ce que les épisodes très violents contre les femmes et de violence domestique soient pris en compte pour décider de la garde et des droits de visite.
»

Convention d’Istanbul

Si la justice française appliquait cette Convention, le parent protecteur aurait le droit de protéger son enfant sans risquer d’être condamné pour le délit de non représentation d’enfant.

Pourquoi la France n’ applique-t-elle pas la Convention d’Istanbul ?
Il faudrait la transposition intégrale et l’application en droit français de la Convention d’Istanbul.

Et justement la France a été rappelée à l’ordre en novembre 2019 dans le rapport du Grevio.

Qu’est-ce que le GREVIO ?

Le GREVIO signifie « Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique « , c’est un organisme issu du Conseil de l’Europe. Il a évalué́ chaque pays d’Europe sur la qualité d’application de la Convention d’Istanbul ratifiée par l’ensemble des pays Européen, dont la France.

Que dit le GREVIO à propos du traitement des enfants par la justice française ?

En novembre 2019 le GREVIO a publié un rapport d’évaluation de la France; ce rapport a mis en évidences les lacunes de la France, notamment judiciaires, quand à la gestion des violences domestiques:

« Le GREVIO estime par ailleurs que les juges devraient pouvoir refuser l’exercice du droit de visite au parent violent en invoquant les motifs graves prévus dans la loi (Article 373-2-1 du Code civil). »

« En effet, si le GREVIO soutient pleinement le droit de l’enfant de maintenir ses liens avec ses deux parents, conformément à l’article 9, paragraphe 3, de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, l’exposition à la violence domestique – en tant que victime ou témoin – nécessite que des exceptions soient faites dans l’intérêt supérieur de l’enfant. »

« Le GREVIO insiste à ce propos sur la nécessité de chercher à déterminer les raisons d’une non-représentation d’enfant, de manière à ce que les indices de violence domestique puissent être pris en compte à tous les stades de la procédure. »

Pourquoi la France n’applique-t-elle pas les recommandations du GREVIO issues du Conseil de l’Europe ? Les magistrats devraient être mieux sensibilisés et formés.


Il faut supprimer la citation directe pour le délit de non représentation d’enfant

Pour en savoir plus au préalable sur la citation directe, vous pouvez lire notre article « La citation directe: qu’est-ce que c’est ? « .

Lorsque la poursuite emprunte la voie de la citation directe à l’initiative d’un des parents… cela paraît suspect.. si le parent était vraiment attaché à l’intérêt de l’enfant, il privilégierait le dialogue et les mesures éducatives pour renouer avec son enfant… et pas la citation directe contre l’autre parent… où l’instruction se fait à l’audience…

Le père veut faire condamner la mère à une peine d’emprisonnement bien souvent parce que l’enfant ne veut pas le voir… parce que le père se comporte mal… et comme l’enfant ne veut pas le voir parce qu’il se comporte mal… la mère est condamnée à une peine d’emprisonnement… cherchez l’erreur…

Il faudrait tout simplement interdire de poursuivre le délit de non représentation d’enfant par voie de citation directe.


Il faut réformer le délit de non représentation d’enfant, et c’est urgent

Il ne s’agit pas du cas d’un enfant isolé, tous les professionnels de l’enfance reçoivent en moyenne une dizaine d’appels au secours chaque mois, sur les réseaux sociaux il ne se passe pas un jour sans voir un appel à l’aide d’un parent concerné, inquiet pour son enfant, il s’agit en réalité de milliers de cas. Des enfants sont en grande souffrance.

Ce n’est pas l’existence de ce délit qui pose problème mais la façon dont il est interprété par les magistrats, alors que:

  1. Craindre un danger plausible pour l’enfant n’est pas refuser indument de représenter l’enfant.
  2. Respecter les peurs, les craintes et la vie privée de l’enfant – de l’adolescent(e) résistant(e) n’est pas refuser indument de représenter l’enfant.

Aujourd’hui l’interprétation du texte du délit de non représentation d’enfant par la chambre criminelle de la cour de cassation va au-delà̀ de la lettre : « le fait de refuser indument de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer.» (Code pénal article 227-5) ; alors que la loi pénale est d’interprétation stricte (Code pénal article 111-4).


Il faut réformer le délit de non représentation d’enfant en considérant que constituent des refus légitimes qui évitent au parent protecteur d’être condamné :

  • la crainte d’un danger plausible pour l’enfant
  • le refus de l’ado d’aller chez l’autre parent

Enfin il faut supprimer la possibilité de citation directe pour obliger le parquet à rechercher si le refus de confier l’enfant est légitime.

Des enfants victimes de la loi

Des enfants victimes de la loi

Il existe des cas où la justice rend des enfants victimes de la loi.

Le témoignage éclairant de Sylvie

J’ai divorcé en 2017. Le jugement énonçait que mon ex-mari pouvait s’occuper de Thomas, notre fils de 10 ans un week-end sur deux…Bien sûr, il n’était pas question de me soustraire à la justice, et j’ai organisé mon planning en conséquence. Mais souvent, lorsque je récupérais Thomas, après deux jours chez son père, je le trouvais bizarre.

Au début, je ne me suis pas inquiétée, mais petit à petit, mon instinct de mère me disait bien que quelque chose n’allait pas. Surtout quand je préparais ses affaires pour aller chez son père. Thomas devenait triste et anxieux alors que c’est un petit garçon joyeux d’habitude. Il traînait les pieds, cherchait des prétextes divers pour éviter la visite. Petit à petit, j’ai remarqué qu’il mangeait de moins en moins bien.

Un soir il s’est mis à pleurer et m’a confié que la perspective d’aller chez son père l’angoissait. Quand j’ai cherché à savoir pourquoi, il m’a expliqué qu’il recevait des gifles régulièrement, qu’il passait son temps seul dans une chambre, et que dès qu’il s’opposait à son père sur des détails de la vie quotidienne, celui-ci le frappait ou lui hurlait dessus. Bien entendu, cela m’a tordu le ventre, mais mon avocat m’a expliqué que je ne pouvais me soustraire à cette obligation. Si je refusais d’emmener Thomas chez son père, je risquais la prison, explique Sylvie.

Des enfants victimes de la loi

Le droit Français permet ce qui apparaît pour les spécialistes comme une anomalie juridique totale. D’un point de vue statistique, c’est souvent la mère qui a la garde des enfants. Si jamais elle craint des sévices, des attouchements, ou de la violence de la part de son ex-conjoint, elle n’a aucun moyen de se soustraire au droit de visite ou d’hébergement.

Ce témoignage n’a rien d’unique ou d’anodin. Comme beaucoup d’autres mères, ou pères, (car la maltraitance n’est pas l’apanage des hommes), il est possible de se retrouver derrière les barreaux si on refuse le droit de visite au parent qui n’a pas la garde de l’enfant. Ou si un adolescent refuse de se soumettre à cette obligation. Même si l’enfant court un danger. Des enfants victimes de la loi. Beaucoup de familles vivent cette situation, par exemple cette femme poursuivie pour délit de non représentation d’enfant. Et pour cause.

Les tribunaux correctionnels s’appuient sur l’article 227-5 du code pénal pour condamner. Les tribunaux se contentent de constater que l’ordonnance de non conciliation du juge aux affaires familiales n’a pas été respectée et condamne à des peines de prison le parent qui a pourtant simplement souhaité protéger son enfant. Dans ce cas les enfants sont véritablement victimes de la loi; et le parent protecteur également puisqu’il est puni d’une peine d’emprisonnement simplement pour avoir cherché à protéger son enfant. Le parent protecteur est traité comme un délinquant. Il faut mesurer la détresse des enfants et des parents concernés.

Le délit peut se justifier dans certains cas

Bien évidemment, il existe des cas où cette « non représentation » d’enfant constitue un outil de vengeance. Et ce refus totalement injustifié. De la même façon il existe des enlèvements internationaux où l’un des parents n’a que pour seul but de soustraire l’enfant à l’autre parent, sans motif valable, et dans ce cas le délit de non représentation d’enfant doit s’appliquer.

Mais dans tous les cas où le danger pour l’enfant existe bel et bien, la justice se base sur un article du code pénal qui peut avoir des conséquences dramatiques sur la santé psychique ou physique de l’enfant, et causer de nombreux dégâts dans les familles.

Comment lutter contre ce phénomène injuste avec tant d’enfants victimes de la loi?

Face à ce vide juridique, l’insurrection reste faible et démunie. D’abord parce que souvent, cette disposition est ignorée. Beaucoup de familles dans ce cas apprennent cela au cours de leur propre procédure de divorce. Et réalisent sur le moment les risques qu’ils encourent après consultation avec leur avocat. Ensuite parce que juridiquement, les possibilités de contester une disposition légale inscrite dans le code pénal sont quasiment nulles, donc difficile pour un particulier d’agir avec efficacité.

Nous avons crée l’association Protéger l’enfant dans ce but, nous souhaitons réformer le délit de non représentation d’enfant afin de diminuer le nombre d’enfants victimes de la loi, ils sont hélas trop nombreux aujourd’hui.

Pour en savoir plus nous vous invitons à lire l’article très documenté de l’avocat Philippe Losappio dans Village Justice « Le délit de non représentation d’enfant porte atteinte à l’intérêt de l’enfant« .